AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué (tribunal d'instance de Saint-Omer, 10 janvier 2002) d'avoir dit que les contrats de travail des salariés distributeurs de la société Delta diffusion étaient des contrats à temps plein de sorte que les salariés devaient être comptés un pour un pour le calcul des effectifs et que le seuil de 50 salariés était dépassé le jour du scrutin, et qu'il n'y avait pas lieu à annuler "l'élection" de M. X..., alors, selon le moyen :
1 / que les conditions particulières de l'exercice de leur activité par des salariés à temps partiel ne rendent pas nécessaire la mention dans le contrat de travail de la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou, le cas échéant, les semaines du mois ;
qu'en l'espèce, la société Delta diffusion avait soutenu dans ses conclusions qu'elle avait pour activité la distribution dans les boîtes aux lettres de journaux d'annonces gratuites et de différentes publications ou publicités et que ses distributeurs étaient rémunérés à la tâche, en fonction du nombre de documents distribués sur un secteur déterminé, sans être soumis à un horaire de travail déterminé par l'employeur ;
qu'elle en avait déduit que les conditions particulières de l'exercice de leur activité par ses salariés à temps partiel lui interdisait d'indiquer dans les contrats de travail à temps partiel un horaire de travail déterminé, de sorte que l'absence d'une telle précision ne pouvait faire présumer que ces contrats auraient été conclus pour un temps plein ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen déterminant de la solution du litige, le tribunal d'instance a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / subsidiairement, que la présomption de contrat à temps complet, tirée de l'absence d'un écrit constatant dans les formes requises l'existence d'un contrat de travail à temps partiel, est susceptible de preuve contraire ; que cette preuve doit nécessairement être apportée dans le cadre des dispositions de l'article L. 212-1-1 du Code du travail qui prévoient qu'"en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié" ; que si la Cour de Cassation déduit de ce texte qu'en cas de litige relatif à l'existence et au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires de travail effectivement pratiqués par le salarié, pour autant, elle juge aussi que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties de sorte que les juges du fond sont fondés à rejeter les demandes des salariés qui ne s'appuient sur aucune pièce probante ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations du juge du fond que la société Delta diffusion avait produit des listes informatiques sur lesquelles figuraient les horaires effectués par ses salariés ; que par contre, il ne s'évince d'aucun des motifs du jugement attaqué que M. X... ou le syndicat SNIPGDP UNSA aurait versé la moindre pièce tendant à établir que les salariés concernés auraient effectué des horaires de travail supérieurs à ceux allégués par l'employeur ; que dès lors, en statuant comme il l'a fait, le tribunal d'instance a mis la charge de la preuve sur le seul employeur et violé les articles L. 212-1-1 et L. 212-4-3 du Code du travail ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les contrats de travail des salariés ne mentionnaient aucune durée du travail et après avoir souverainement retenu que l'employeur ne rapportait pas la preuve, qui lui incombait, de la durée exacte de celui-ci, le tribunal d'instance a exactement décidé que, peu important les conditions particulières d'activité des salariés, la présomption de travail à temps complet devait s'appliquer en l'absence de mention de la durée hebdomadaire ou le cas échéant mensuelle du travail ; qu'il en a exactement déduit que le décompte de l'effectif de l'entreprise pour la désignation des délégués syndicaux devait se faire sur cette base ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit juin deux mille trois.