AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office après avis donné aux parties :
Vu l'article R. 213-10 du Code de l'urbanisme ensemble l'article 620, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que le silence du propriétaire dans le délai de deux mois à compter de la réception de l'offre d'acquérir faite en application des articles R. 213-8 (c) ou R. 213-9 (b) équivaut à la renonciation à l'aliénation ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué ( Bordeaux, 20 avril 2000), qu'en avril 1993 la société civile immobilière Bernard (la SCI) et la société en nom collectif Godard ( la SNC) ont confirmé leur intention de vendre et d'acquérir des terrains situés dans une zone soumise au droit de préemption urbain de la Communauté urbaine de Bordeaux (la CUB) ;
que l'acte authentique de vente n'ayant pas été signé le 12 octobre 1993 la SCI a assigné la SNC en réalisation forcée de la vente ; que le notaire ayant, le 16 décembre 1996, adressé à la CUB une déclaration d'intention d'aliéner, celle-ci a exercé son droit de préemption par un arrêté du 10 février 1997 notifié le 14 février 1997 qui a été rapporté par une décision du 17 avril 1997 dont l'annulation a été demandée devant la juridiction administrative ;
Attendu que pour condamner la SNC à passer l'acte authentique de vente, l'arrêt retient que la CUB, qui a exercé son droit de préemption urbain par arrêté du 10 février 1997 y a renoncé, faute d'accord sur le prix, par arrêté du 17 avril 1997 conformément aux dispositions de l'article L. 213-7 du Code de l'urbanisme, et par là-même, à l'action en annulation de la vente dont elle seule disposait ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le silence gardé par la SCI pendant plus de deux mois après la réception de l'offre d'acquérir équivalait à une renonciation à la vente, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Attendu qu'il y a lieu, conformément à l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, de mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée aux faits souverainement constatés par les juges du fond et de décider que la demande de la SCI en réalisation forcée de la vente doit être rejetée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 avril 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déboute la SCI Bernard de ses demandes ;
Dit que les dépens de première instance et d'appel seront à la charge de la SCI Bernard ;
Condamne la SCI Bernard aux dépens du présent arrêt ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la SCI Bernard à payer 1 900 euros à la SNC Godard ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de la SCI Bernard et de la Communauté urbaine de Bordeaux ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juin deux mille trois.