AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 21 juin 2001), que par acte authentique du 8 février 1993, la société Frank immobilier a acquis de la SNCF divers terrains ; qu'aux termes de cet acte, M. X... agissant en qualité de représentant légal de la société Fran immobilier, a déclaré s'engager à revendre les terrains dans le délai de quatre ans, en application de l'article 1115 du Code général des impôts ; que la vente par acte authentique avait été précédée par un compromis en date du 22 novembre 1991 contenant promesse synallagmatique de vente par la SNCF et d'achat par la société Frank immobilier, sous réserve de diverses conditions ; que, le 5 février 1998, le directeur des services fiscaux du Bas-Rhin a procédé à un rappel de droits de mutation à défaut de revente des immeubles dans le délai légal ; que sa réclamation auprès de l'administration fiscale ayant été rejetée, la société Frank immobilier a saisi le tribunal de grande instance qui a accueilli la demande ; que le directeur des services fiscaux a relevé appel du jugement, au motif que l'acte notarié contenant la déclaration imposée par l'article 1115 du Code général des impôts étant postérieur au 1er janvier 1993, la société Frank immobilier ne pouvait revendiquer le bénéfice de la prorogation légale du délai accordée pour les biens acquis avant cette date ;
Attendu que la société Frank immobilier fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté son recours formé contre la décision du 1er octobre 1998 par laquelle le directeur des services fiscaux du Bas-Rhin a écarté sa réclamation tendant à l'annulation de l'avis de mise en recouvrement du 8 juillet 1998 qui lui impose le paiement d'un rappel de droits de 62 236 francs et des pénalités de 47 060 francs, alors, selon le moyen :
1 / que les dispositions de l'article 1589, alinéa 2, et 3, du Code civil attribuent les effets d'une vente à toutes les promesses visant les terrains lotis ou à lotir, qu'elles soient unilatérales ou synallagmatiques, dès la date du paiement d'un premier acompte par l'acquéreur qui a été mis en possession, peu important la date d'établissement de l'acte de vente définitif ; qu'il s'ensuit qu'en l'état du paiement d'un premier acompte, en février 1992, par la société Frank immobilier qui avait alors pris possession des lots, la vente était formée avant le 1er janvier 1993 si bien que le délai imparti à l'acquéreur par l'article 1115 du Code général des impôts pour revendre son bien, en contrepartie de l'exonération fiscale des droits de mutation, était prorogé jusqu'au 31 décembre 1998 ; qu'en retenant -pour décider que la société Frank immobilier ne pouvait pas se prévaloir de la prorogation du délai de revente des lots qu'elle aurait acquis après le 1er janvier 1993, en exécution d'un acte notarié du 8 février 1993- que l'article 1589, alinéas 2 et 3, du Code civil régit la formation de la vente, dans la seule hypothèse où le vendeur a souscrit une promesse unilatérale de vente des terrains lotis, la cour d'appel de Colmar a violé les dispositions précitées, ensemble l'article 1115 du Code général des impôts ;
2 / que les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures ; qu'à défaut, elles sont réputées les avoir abandonnées et la cour d'appel ne statue que sur les dernières conclusions déposées ; qu'en statuant sur le moyen invoqué par l'administration fiscale qui soutenait, dans ses écritures initiales, que l'un des terrains acquis par la société Frank immobilier ne relevait pas d'un lotissement, bien qu'elle ait renoncé à ce moyen qu'elle n'a plus invoqué dans ses dernières écritures, la cour d'appel a violé l'article 954 du nouveau Code de procédure civile ;
3 / qu'il ressort de l'article 1115 du Code général des impôts que les ventes immobilières conclues avant le 1er janvier 1993 sont exonérées de droit de mutation à la condition que l'acquéreur ait manifesté son intention de revente avant le 31 décembre 1998, peu important qu'il ait manifesté la volonté de se prévaloir du régime fiscal de faveur prévu par cette disposition, après la conclusion de la vente, dans un acte de vente notarié établi après la date du 1er janvier 1993 ; qu'en s'attachant à la date à laquelle l'EURL Frank immobilier a manifesté son intention de revendre les terrains acquis de la SNCF dans les délais de l'article 1115 du Code général des impôts, la cour d'appel a déduit un motif inopérant ; qu'ainsi, elle a violé l'article 1115 du Code général des impôts, ensemble les articles 1583 et 1589 du Code civil ;
4 / que la vente est parfaite dès que les parties ont convenu de la chose et du prix, à moins qu'elles n'aient entendu que la solennité de l'acte fut une condition nécessaire pour les engager; qu'en se déterminant au vu de la date de passation de l'acte notarié, le 8 février 1993, quand cette seule considération ne permettait pas de différer la conclusion de la vente qui résultait de la prise de possession des terrains lotis et du paiement d'un premier acompte en février 1992, la cour d'appel a violé les articles 1583 et 1589 du Code civil, ensemble l'article 1115 du Code général des impôts ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article 1115 du Code général des impôts que pour les biens acquis avant le 1er janvier 1993, dès lors qu'il est en cours à cette date, le délai dans lequel les personnes qui réalisent les affaires définies au 6 de l'article 257 du même Code ont déclaré qu'elles feraient connaître leur intention de revendre les biens qu'elles ont acquis est prorogé jusqu'au 31 décembre 1998 ;
Attendu que l'arrêt ayant relevé que c'est aux termes d'un acte notarié du 8 février 1993 que M. X... a déclaré s'obliger à revendre ses terrains dans le délai de quatre ans, ce dont il résultait que ledit délai n'était pas en cours, au sens de l'article 1115, précité, à la date du 1er janvier 1993, la société Frank immobilier ne pouvait bénéficier de la prorogation légale prévue par cette dernière disposition ;
Que, par ce seul motif, abstraction faite de ceux surabondants critiqués par le moyen, la décision se trouve légalement justifiée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Frank immobilier aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Frank immobilier ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mai deux mille trois.