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29/04/2003 | FRANCE | N°00-45767

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 29 avril 2003, 00-45767


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° X 00-45.767, Y 00-45.768, C 00-45.795 et P 00-46.311 ;

Sur la fin de non recevoir, commune aux pourvois, soulevée par la défense ;

Attendu que l'employeur invoque la déchéance des pourvois aux motifs que les mémoires ampliatifs ne sont pas signés par les salariés et que l'avocat qui les a rédigés ne justifie pas d'un pouvoir spécial ;

Mais attendu que les mémoires sont annexés à une lettre de transmission signée

des salariés ; qu'il a été ainsi satisfait aux dispositions de l'article 989 du nouveau Code d...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° X 00-45.767, Y 00-45.768, C 00-45.795 et P 00-46.311 ;

Sur la fin de non recevoir, commune aux pourvois, soulevée par la défense ;

Attendu que l'employeur invoque la déchéance des pourvois aux motifs que les mémoires ampliatifs ne sont pas signés par les salariés et que l'avocat qui les a rédigés ne justifie pas d'un pouvoir spécial ;

Mais attendu que les mémoires sont annexés à une lettre de transmission signée des salariés ; qu'il a été ainsi satisfait aux dispositions de l'article 989 du nouveau Code de procédure civile ; que la fin de non recevoir doit être rejetée ;

Sur les moyens réunis, communs à tous les pourvois :

Attendu que l'Association départementale des pupilles de l'enseignement public de l'Aude, au sein de laquelle s'applique la Convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, a pour mission de gérer des établissements qui accueillent des adolescents ou jeunes majeurs en difficulté ; que Mlle X..., MM. Y..., Z... et A..., engagés en qualité d'éducateurs spécialisés, assurent une permanence de nuit dans une chambre dite de "veille" mise à leur disposition dans chaque établissement pour leur permettre de répondre aux sollicitations des pensionnaires et à tout incident ; que ces heures de surveillance nocturne leur sont payées conformément à l'article 11 de l'annexe 3 de la convention collective prévoyant que les neuf premières heures sont assimilées à trois heures de travail éducatif et qu'entre neuf heures et douze heures, chaque heure est assimilée à une demi-heure de travail éducatif ; quen se prévalant d'une jurisprudence nouvelle de la Cour de Cassation, qui a décidé que ces heures de surveillance nocturne constituaient un temps de travail effectif et ne pouvaient être rémunérées selon le régime d'équivalence institué par une convention collective simplement agrée et non étendue, les salariés ont saisi le conseil de prud'hommes pour obtenir le paiement de rappels de salaires ;

Attendu que les salariés font grief aux arrêts attaqués (Montpellier, 12 septembre 2000) d'avoir rejeté leur demande, alors, selon les moyens :

1 / que le principe de prééminence du droit et de la notion de procès équitable s'opposent, sauf pour d'impérieux motifs d'intérêt général, à l'ingérence du pouvoir législatif dans l'administration de la justice dans le but d'influer sur le dénouement judiciaire d'un litige ; que la primauté de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sur le droit interne devrait conduire à laisser inappliqué l'article 29 de la loi du 19 janvier 2000 au présent litige qui était en cours lors de l'entrée en vigueur de ladite loi ; qu'en faisant application de l'article 29 de la loi du 19 janvier 2000, texte à portée rétroactive, la cour d'appel a violé l'article 6, paragraphe 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2 / que l'employeur n'ayant pas réglé, depuis de nombreuses années, les salaires réellement dus à ses salariés, le préjudice contractuel subi du fait de cette violation du contrat de travail devrait être réparé dans l'hypothèse où il serait fait application de l'article 29 de la loi du 19 janvier 2000 ; qu'en affirmant qu'aucune faute ne pouvait être imputable à l'employeur dans ces circonstances pour non-paiement de salaire, la cour d'appel a violé l'article 1142 du Code civil ;

3 / que la cour d'appel ne vise à aucun moment l'article 6, paragraphe 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi, en ne répondant pas à l'argument soulevé par les salariés sur l'application de ladite convention, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que si la cour d'appel devait, en application de l'article 55 de la Constitution, se prononcer sur la conformité de l'article 29 de la loi du 19 janvier 2000 avec les dispositions de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et si le législateur peut adopter, en matière civile, des dispositions rétroactives, le principe de la prééminence du droit et la notion de procès équitable résultant de l'article 6 de cette convention s'opposent, sauf pour d'impérieux motifs d'intérêt général, à l'ingérence du pouvoir législatif dans l'administration de la justice afin d'influer sur le dénouement judiciaire des litiges ;

Et attendu qu'obéit à d'impérieux motifs d'intérêt général, l'intervention du législateur destinée à aménager les effets d'une jurisprudence nouvelle de nature à compromettre la pérennité du service public de la santé et de la protection sociale auquel participent les établissements pour personnes inadaptées ou handicapées ; que dès lors, la cour d'appel, en faisant application de l'article 29 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 au présent litige, et en estimant qu'aucune faute ne pouvait être imputable à l'employeur dans ces circonstances pour non-paiement de salaires, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne les demandeurs aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de l'Association départementale des pupilles de l'enseignement public ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf avril deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00-45767
Date de la décision : 29/04/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 - 1 - Equité - Application d'une loi nouvelle - Ingérence du pouvoir législatif dans l'administration de la justice (non) - Prééminence du droit.

CONVENTIONS COLLECTIVES - Etablissements pour inadaptés et handicapés - Durée du travail - Heure de nuit et de veille.


Références :

Convention collective nationale des établissements pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, annexe 3, art. 11
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950, art. 6
Loi 2000-37 du 19 janvier 2000 art. 29

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier (Chambre sociale), 12 septembre 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 29 avr. 2003, pourvoi n°00-45767


Composition du Tribunal
Président : Président : M. MERLIN conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:00.45767
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