AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 10 novembre 1999), que la SCI "Le Clos de Bener" (la SCI), qui s'était vue consentir un crédit-bail sur un immeuble pour une durée de quinze ans, et qui n'avait pas déféré à une mise en demeure de l'administration fiscale d'avoir à publier celui-ci à la Conservation des hypothèques, a fait l'objet d'un redressement de droits d'enregistrement ; qu'après avoir vainement contesté cette imposition auprès de l'administration, la SCI a saisi le tribunal de grande instance pour obtenir la décharge des droits ainsi rappelés ; que sa demande ayant été rejetée, la SCI a fait appel du jugement ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt du rejet de sa demande, alors, selon le moyen :
1 / que ni les dispositions de l'article 742 du Code général des impôts, ni aucune autre disposition du même code applicable aux faits de l'espèce, ne soumet expressément le contrat de crédit-bail immobilier à la taxe de publicité foncière ; qu'en décidant dès lors qu'il apparaît logique de soumettre le contrat en cause à cette taxe, la cour viole, par fausse application, les textes susvisés ;
2 / que la convention de crédit-bail est une institution sui generis qui a pour seul objet l'acquisition d'un immeuble par celui qui s'oblige à faire des versements échelonnés sur la durée du contrat et non de faire jouir ce dernier d'une chose pendant un certain temps au sens de l'article 1709 du Code civil relatif au contrat de louage de chose ; que, par suite, en estimant que le contrat de crédit-bail litigieux doit être soumis à la taxe de publicité foncière sur la base de l'article 742 du Code général des impôts qui ne soumet à cette taxe que les baux à durée limitée d'immeuble, la cour a violé les dispositions susvisées ;
Mais attendu que le contrat de crédit-bail immobilier s'analyse comme une location suivie, le cas échéant, d'une cession ;
qu'aux termes de l'article 742 du Code général des impôts, les baux à durée limitée d'immeubles faits pour une durée supérieure à douze années sont soumis à la taxe de publicité foncière au taux de 0,60 % ; qu'il s'ensuit qu'en décidant que le contrat de crédit-bail consenti à la SCI entrait dans le champ d'application de ce texte, la cour d'appel loin de méconnaître celui-ci et les autres dispositions citées par le moyen, en a fait l'exacte application ; que le moyen, pris en ses deux branches, n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer la majoration de 40 % prévue par l'article 1729 du Code général des impôts lorsque la mauvaise foi du contribuable est établie, alors, selon le moyen :
1 / que toute décision doit être motivée afin de permettre à la Cour de cassation d'exercer son contrôle ; qu'en l'espèce, la cour d'appel n'a déduit aucun motif pour justifier sa décision de ce chef ; qu'elle a dès lors violé, par refus d'application, l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / que la condamnation au paiement de la majoration de 40 % prévue par l'article 1729 du Code général des impôts suppose que la mauvaise foi du contribuable soit établie ; qu'en la condamnant à payer au trésor public des droits d'enregistrement majorés de la pénalité prévue à l'article susvisé sans relever que la mauvaise foi du contribuable était établie, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de ce texte ;
Mais attendu que la cour d'appel, uniquement tenue de statuer sur le bien fondé de la contestation qui lui était soumise, n'avait pas à effectuer une recherche qui ne lui était pas demandée, ni à motiver l'application d'une majoration qui n'était pas contestée en tant que telle ;
que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société civile immobilière Le Clos de Bener aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois avril deux mille trois.