AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu que M. X..., employé par la SNCF en qualité d'agent commercial trains principal, qui a été doté, pour les besoins du service, d'un téléphone portable, a fait l'objet d'une retenue sur son salaire de novembre 1998 correspondant à des communications téléphoniques personnelles excédant le forfait de communications fixé à 100 minutes par mois ; que soutenant que cette retenue constituait une sanction pécuniaire illicite, il saisi le conseil de prud'hommes pour en obtenir l'annulation ainsi que la restitution de la somme prélevée ;
Attendu que la SNCF fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 12 septembre 2000) d'avoir fait droit à cette demande, alors, selon le moyen :
1 / que le contrat d'utilisation des téléphones portables signé le 20 novembre 1997 par M. X... prévoit les différentes situations professionnelles dans lesquelles ce téléphone doit être utilisé ; qu'il est expressément indiqué que l'agent aura accès à tous les numéros publics pour pouvoir parer à toutes les situations dans la limite de 100 minutes par mois; qu'il indique clairement que tout dépassement de ces 100 minutes devra être justifié par un rapport auprès du chef d'équipe et qu'après consultations, l'ECT se réservera le droit de refacturer à l'agent ses communications personnelles ; qu'en énonçant que le contrat d'utilisation remis à M. X... valait uniquement reconnaissance de la remise de l'appareil et que la SNCF ne pouvait prétendre que la retenue effectuée pour dépassement de forfait avait un caractère contractuel, la cour d'appel a dénaturé la convention signée le 20 novembre 1997 par l'agent et a violé l'article 1134 du Code civil ;
2 / que le statut des relations collectives de la SNCF et son personnel constitue un acte administratif dont la légalité ne peut être appréciée par les tribunaux de l'ordre judiciaire ; que l'article 28 du règlement P S 17 A de la SNCF prévoit qu'il est interdit aux agents d'employer à leur usage personnel les fournitures diverses qui sont mises à leur disposition en raison de leur fonction; que l'article 185-1 du règlement du personnel PS2 prévoit que la SNCF peut effectuer sur le salaire des agents "des retenues pour fournitures diverses" ; qu'en application de ces textes, les partenaires sociaux ont établi une charte d'utilisation des téléphones portables prévoyant en cas de dépassement de forfait, le prélèvement sur la solde des agents du montant de leurs communications personnelles ; qu'en décidant que la retenue opérée par la SNCF sur le salaire de M. X... à la suite d'une utilisation personnelle du téléphone portable, mis à sa disposition en raison de ses fonctions, était illicite, la cour d'appel a violé l'article 28 du règlement P S 17 A. l'article 185 du règlement P S 2 et l'article L. 122-42 du Code du travail ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 144-3 du Code du travail que dans les entreprises visées par ce texte, dont fait partie la SNCF, il est interdit aux employeurs d'opérer des retenues sur salaires à l'occasion de l'exercice normal du travail ;
Et attendu que si la SNCF a la possibilité, en vertu du contrat régulièrement conclu entre les parties, de refacturer à l'agent le coût de ses communications téléphoniques personnelles excédant le forfait, et qu'elle dispose de la faculté de recouvrer sa créance par les voies du droit commun, elle ne peut, en revanche, procéder à une retenue illégale sur la rémunération de cet agent ;
Que par ce motif de pur droit substitué au motif erroné, après accomplissement des formalités prévues par l'article 1015 du nouveau Code de procédure civile, la décision attaquée est légalement justifiée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SNCF aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit février deux mille trois.