AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que, par 8 actes notariés des 25 juillet et 6 août 1990, M. X..., alors âgé de 59 ans, a acquis des biens immobiliers dont les prix étaient payés par 8 emprunts de 560 000 francs chacun, consentis par la CRCAM du Centre Ouest et garantis par la Caisse nationale de prévoyance dans le cadre d'un contrat d'assurance groupe ; que par 4 actes notariés du 5 novembre 1991, il a acquis d'autres biens immobiliers au moyen de 4 prêts de 80 000 francs consentis et garantis dans les mêmes conditions ; que les garanties étaient limitées : -en ce qui concerne la garantie décès , lorsque l'assuré atteignait l'âge de 70 ou 75 ans selon le groupe de contrat, -en ce qui concerne la garantie invalidité permanente et absolue, lorsque l'assuré atteignait l'âge de 65 ans, -en ce qui concerne la garantie incapacité temporaire totale, lorsque l'assuré atteignait l'âge de 60 ans ; que M. X..., alors âgé de 64 ans et qui subissait un arrêt de travail, s'est vu refuser ces garanties au motif qu'elles avaient cessé à son 60e anniversaire ; que M. X... a alors assigné le Crédit agricole en responsabilité pour le refus de garantie des 8 premiers prêts et, subsidiairement, des 4 autres ainsi que la CNP pour la voir condamner à prendre en charge les 4
prêts souscrits le 5 novembre 1991 ; que l'arrêt attaqué a débouté M. X... de toutes ses demandes ;
Sur les première et deuxième branches du premier moyen :
Vu l'article 1131 du Code civil ;
Attendu que pour débouter M. X... de sa demande tendant à la garantie du remboursement des échéances des prêts, la cour d'appel a énoncé que M. X..., âgé de 59 ans, s'était engagé au remboursement de prêts pour une période de 20 ans et que l'assurance décès-invalidité qui les garantissait était limitée aux termes des 60e, 65e et 75e anniversaires de l'assuré mais que ces contrats d'assurance, bien que limités en leurs garanties, n'étaient pas pour autant dénués d'objet ;
Attendu qu'en statuant ainsi, après avoir relevé que la garantie ITT cessait au 60e anniversaire de l'assuré et que l'assuré avait 59 ans lors de la conclusion des premiers emprunts en juillet et août 1990 et plus de 60 ans lors de la souscription des derniers, sans rechercher, comme elle y était invitée si, compte tenu de l'âge de l'assuré lors de la conclusion des premiers crédits et des délais de carence de douze mois dont ils étaient assortis, l'obligation de l'assureur à ce titre ne se révélait pas d'exécution impossible, la clause la stipulant étant dénuée d'objet, et si les parties avaient entendu donner à cette clause un caractère déterminant du reste de l'accord, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le deuxième moyen :
Vu les articles 1135 et 1147 du Code civil ;
Attendu que pour débouter l'emprunteur de sa demande tendant à voir juger que l'établissement bancaire devait prendre en charge le remboursement des échéances de prêt à raison de la responsabilité qu'il encourait pour avoir manqué à son obligation d'information et de conseil, la cour d'appel a énoncé qu'il était démontré que M. X... devait être informé des limitations de garantie des contrats d'assurance dès lors qu'il résultait des actes de prêt qu'il avait reconnu que les notices d'assurance lui avaient été remises, qu'il en avait pris connaissance et avait accepté les conditions de l'assurance figurant dans la notice jointe à l'acte ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la banque, souscripteur du contrat d'assurance de groupe auquel avait adhéré par son intermédiaire M. X..., était tenue envers celui-ci d'une obligation d'information et de conseil qui ne s'achevait pas avec la remise de la notice prévue à l'article L. 140-4 du Code des assurances, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 février 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;
Condamne le CRCAM du Centre Ouest et la Caisse nationale de prévoyance aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne solidairement la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Centre Ouest et la Caisse nationale de prévoyance à payer à M. X... la somme globale de 2 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit février deux mille trois.