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11/02/2003 | FRANCE | N°00-44238

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 février 2003, 00-44238


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que, par décision en date du 5 octobre 1993, le tribunal de commerce de Meaux a arrêté le plan de cession totale des activités de la société en redressement judiciaire Elysold en faveur de la société Vetura ; que M. X..., salarié protégé de la société Elysold, a été licencié le 4 janvier 1994 après autorisation administrative du 23 décembre 1993 retirée le 8 mars 1994 par l'inspecteur du Travail et remplacée par une décision de refus d'autorisation de licenciem

ent ; que la société Vetura, après s'être opposée à la réintégration du salarié, ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que, par décision en date du 5 octobre 1993, le tribunal de commerce de Meaux a arrêté le plan de cession totale des activités de la société en redressement judiciaire Elysold en faveur de la société Vetura ; que M. X..., salarié protégé de la société Elysold, a été licencié le 4 janvier 1994 après autorisation administrative du 23 décembre 1993 retirée le 8 mars 1994 par l'inspecteur du Travail et remplacée par une décision de refus d'autorisation de licenciement ; que la société Vetura, après s'être opposée à la réintégration du salarié, a signé avec lui une transaction aux termes de laquelle il renonce à sa réintégration et abandonne tous ses droits résultant de la décision de retrait du 8 mars 1994 ;

Sur les moyens réunis du pourvoi principal :

Attendu que la société Vetura fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 24 mai 2000) de l'avoir condamnée à payer au salarié une indemnité compensatrice de salaire pendant la période de protection, des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d'avoir ordonné le remboursement des allocations chômage au profit de l'ASSEDIC, alors, selon les moyens :

1 / que selon l'article L. 412-19 du Code du travail, le droit à réintégration n'est ouvert au salarié qu'en cas d'annulation de l'autorisation de licenciement sur recours hiérarchique ou sur recours contentieux, et non en cas de retrait de sa décision par l'inspecteur du Travail ; qu'en appréciant, dès lors, la valeur de la transaction, passée en l'espèce postérieurement au licenciement autorisé et créateur de droit, et la valeur des concessions réciproques, au regard d'un droit à réintégration qui n'existait pas en l'état d'un simple retrait de l'autorisation de licenciement, pour estimer que le salarié avait été placé dans l'impossibilité de tirer bénéfice de la décision de retrait de l'inspecteur du Travail obtenue à son profit, la cour d'appel a violé ensemble l'article 2044 du Code civil et l'article L. 412-19 du Code du travail ;

2 / que n'est pas illicite le licenciement d'un salarié protégé prononcé en vertu d'une autorisation postérieurement rétractée par son auteur ; qu'en retenant dès lors que nonobstant le licenciement prononcé par le mandataire-liquidateur pour motif économique le 4 janvier 1994 sur le fondement de l'autorisation accordée le 23 décembre 1993, le contrat de M. X... s'est poursuivi avec la société Vetura en application de l'article L. 122-12, du fait du retrait de ladite autorisation par l'inspecteur du Travail le 8 mars 1994, la cour d'appel a violé l'article L. 412-19 du Code du travail ;

3 / que selon l'article L. 412-19 du Code du travail, le droit à réintégration n'est ouvert au salarié qu'en cas d'annulation de l'autorisation de licenciement sur recours hiérarchique ou sur recours contentieux ; qu'en retenant dès lors que la société Vetura se trouvait débitrice d'une indemnité de non-fourniture de travail à partir de la date de cession, au moins jusqu'au jour où prenait fin la protection de l'intéressé par suite de la cessation de son mandat ou par suite de la disparition de l'institution à raison du transfert, comme le prévoit l'article L. 425-1 du Code susvisé, que par ailleurs le refus de la réintégration qui aurait permis la poursuite de l'exécution du contrat en raison de son transfert par l'effet de l'article L. 122-12 constitue la rupture du contrat à l'initiative du cessionnaire, dont les effets sont à apprécier à la date à laquelle les protections susvisées prenaient fin, que cette rupture s'analyse alors en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a derechef violé l'article L. 412-19 du Code du travail ;

4 / que la décision d'autorisation de licenciement est créatrice de droits au profit de l'employeur ; que le retrait rétroactif d'un tel acte, lorsqu'il est régulier, est donc interdit et l'autorisation ne peut être annulée que par l'autorité hiérarchique ou sur recours contentieux, dont les effet sont, eux, prévus par la loi ; qu'en prenant en considération les motifs de la décision de retrait de l'autorisation de licenciement pour en déduire une fraude de l'employeur, la cour d'appel a violé le principe de la séparation des pouvoirs ;

5 / que sont opposables à tous les dispositions du plan de cession retenues par le tribunal de commerce limitant les obligations du repreneur aux contrats attachés aux seuls fonds repris ; qu'en l'espèce, par jugement du tribunal de commerce de Meaux du 5 octobre 1993, la société Vetura s'est engagée à reprendre l'ensemble des contrats de travail attachés aux fonds repris, dont se trouvait exclu le siège social du 42, rue de l'Epinette à Meaux, et il a été donné mission à M. Y..., administrateur judiciaire de la société Elysold, de procéder aux licenciements du personnel non repris dans le cadre du plan de cession ;

qu'en estimant néanmoins que le contrat de travail de M. X... rattaché au siège social de la société Elysold, exclu de la cession intervenue au profit de la société Vetura, avait été néanmoins transféré au repreneur, la cour d'appel a violé les articles 62 à 64 de la loi du 25 janvier 1985, ensemble l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail ;

Mais attendu, cependant, que le retrait de l'autorisation administrative produit les mêmes effets que son annulation ; qu'il en résulte que le salarié protégé qui a été licencié en vertu d'une autorisation administrative peut, lorsque cette autorisation est retirée, demander, dans les deux mois à compter de la notification de la décision de retrait, sa réintégration dans son emploi ou un emploi équivalent ; qu'il a, en outre, droit au paiement d'une indemnité réparant le préjudice subi depuis son licenciement jusqu'à sa réintégration ou l'expiration du délai de deux mois suivant la notification de la décision de retrait et, le cas échéant, aux indemnités dues selon le droit commun du licenciement ;

Et attendu, d'abord, qu'ayant relevé que l'autorisation administrative de licenciement avait été retirée et que la transaction ne prenait pas en considération les droits du salarié résultant de cette décision de retrait, la cour d'appel a exactement décidé, d'une part, que la transaction devait être annulée, faute de concessions réciproques et, d'autre part, que le salarié protégé avait droit à l'indemnisation du préjudice subi pendant la période de protection qui s'est écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois à compter de la notification de la décision de retrait ;

Attendu, ensuite, qu'après avoir retenu, sans méconnaître le principe de la séparation des pouvoirs, que le cessionnaire, auquel la décision de retrait était opposable, avait refusé, en violation de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail, de reprendre le salarié dont le contrat de travail, en cours au moment de la cession, s'était poursuivi de plein droit avec lui, la cour d'appel a exactement décidé que la rupture du contrat de travail s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;

Sur l'irrecevabilité du pourvoi incident soulevée par la défense :

Vu l'article 991 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que le salarié a formé un pourvoi incident par mémoire en date du 8 mars 2001, postérieur de plus de deux mois à la notification du mémoire du demandeur ; que le pourvoi incident est donc irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi principal ;

Déclare irrecevable le pourvoi incident ;

Condamne la société Vetura aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze février deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00-44238
Date de la décision : 11/02/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Salarié protégé - Retrait de l'autorisation administrative - Conséquences - Réintégration.


Références :

Code du travail L412-19

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (22e Chambre, Section A), 24 mai 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 fév. 2003, pourvoi n°00-44238


Composition du Tribunal
Président : Président : M. RANSAC conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:00.44238
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