AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier et le second moyens, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 janvier 2001) que M. Paul X..., depuis décédé, aux droits duquel se trouvent ses héritiers les consorts X..., propriétaire de lots dans un immeuble en copropriété, a assigné le syndicat des copropriétaires, le syndic et un certain nombre de copropriétaires en remise en état des parties communes sur lesquelles ces derniers avaient édifié des verandas en infraction avec le réglement de copropriété ;
Attendu que certains des copropriétaires assignés font grief à l'arrêt de les condamner sous astreinte à supprimer les constructions élevées sur les balcons alors, selon le moyen :
1 / qu'il résulte de l'article 15 de la loi du 10 juillet 1965 qu'un copropriétaire ne peut exercer seul les actions en justice tendant à empêcher une utilisation illicite des parties communes que s'il justifie que les atteintes ainsi portées occasionnent soit un trouble collectif à la jouissance des parties communes, soit un préjudice qui lui est personnel ;
qu'en estimant, pour juger recevable l'action de M. X... en suppression de vérandas édifiées sur des parties communes, que la condition de troubles subis personnellement à la jouissance privative de son lot de copropriété ne trouve pas à s'appliquer en l'espèce, la cour d'appel a violé l'article 15 de la loi du 10 juillet 1965, ensemble l'article 31 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / qu'aux termes du compte-rendu produit aux débats de l'assemblée générale du syndicat de copropriété de l'ensemble immobilier Le Palais Royal du 5 juin 1987, celle-ci a décidé : "suite à l'étude réalisée depuis la dernière assemblée générale, un appartement du 2ème étage du bâtiment 6/8 s'est doté d'une verrière sur son balcon nord. Les personnes présentes estiment que le schéma est satisfaisant et peut être généralisé (...) En tout état de cause, l'assemblée confirme, à l'unanimité : a) qu'aucune transformation de ce genre ne sera autorisée sur les façades sud, b) que la fermeture d'un balcon impose que les murs de façade restent dans les teintes d'origine, qu'aucun radiateur ne soit installé, que l'on entrepose ni frigidaire, ni objet disgracieux. Les seuls rideaux tolérés seront des voilages blancs" ; qu'en énonçant que l'assemblée n'a valablement délibéré que sur l'interdiction des vérandas en façade sud et sur les prescriptions esthétiques à observer à l'occasion de l'installation de verrières en façade nord et qu'ainsi, il n'y a pas eu à proprement parler de vote sur le principe d'autoriser la pose de vérandas en façade nord, pour estimer que la loi commune exprimée dans le règlement de copropriété n'a pas été remise en cause de manière valable par la délibération de 1986 non plus que par celle de 1987, la cour d'appel a dénaturé le procès-verbal d'assemblée de copropriété qui lui était soumis, dont il résultait que le principe d'autoriser l'installation de vérandas en façade nord était acquis, violant ainsi l'article 1134 du Code civil ;
3 / qu'aux termes du compte-rendu produit aux débats de l'assemblée générale du syndicat de copropriété de l'ensemble immobilier Le Palais Royal du 5 juin 1987, celle-ci a décidé : "suite à l'étude réalisée depuis la dernière assemblée générale, un appartement du 2ème étage du bâtiment 6/8 s'est doté d'une verrière sur son balcon nord. Les personnes présentes estiment que le schéma est satisfaisant et peut être généralisé. (...) En tout état de cause, l'assemblée confirme, à l'unanimité : a) qu'aucune transformation de ce genre ne sera autorisée sur les façades sud, b) que la fermeture d'un balcon impose que les murs de façade restent dans les teintes d'origine, qu'aucun radiateur ne soit installé, que l'on entrepose ni frigidaire, ni objet disgracieux. Les seuls rideaux tolérés seront des voilages blancs" ; qu'en considérant que les copropriétaires ayant implanté une véranda sur le balcon dont ils avaient la jouissance n'ont pas à proprement parler obtenu une autorisation du syndicat, la cour d'appel a derechef dénaturé le procès-verbal d'assemblée générale de copropriété qui lui était soumis, qui emportait exactement le contraire, entachant sa décision d'une violation de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs adoptés, que le réglement de copropriété disposait que les balcons et garde corps constituaient des parties communes et stipulait l'interdiction d'y édifier aucune construction même légère, et retenu, par une interprétation souveraine exclusive de dénaturation que l'ambiguïté des termes du procès-verbal de l'assemblée générale du 5 juillet 1987 rendait nécessaire, qu' il n'y avait pas eu de vote sur la pose de vérandas en façades Nord, la cour d'appel, qui a exactement décidé que l'action de M. X... était recevable sans qu'il soit astreint à démontrer l'existence d'un préjudice personnel et spécial distinct de celui dont souffre la collectivité des membres du syndicat, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne, ensemble, Mme Y..., et MM. Z... et A... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne, ensemble, Mme Y... et MM. Z... et A... à payer la somme de 1 900 euros aux consorts X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé à l'audience publique du vingt-neuf janvier deux mille trois par M. Chemin, conformément à l'article 452 du nouveau Code de procédure civile.