AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu selon l'arrêt attaqué (Limoges, 18 novembre 1999) que, le 29 juillet 1994, M. X... a traversé une voie ferrée sur le platelage d'un passage à niveau dont les barrières étaient fermées, alors que les feux rouges annonçant l'arrivée d'un train clignotaient, que le signal sonore fonctionnait et qu'un écriteau attirait son attention sur le danger d'une telle traversée ; qu'il a été heurté par un autorail et est décédé des suites de ses blessures ; que les consorts X... ont assigné la SNCF en réparation de leur préjudice sur le fondement de l'article 1384 du Code civil ;
Attendu que la SNCF fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à dédommager à concurrence de la moitié les consorts X... du préjudice moral qu'ils avaient subi alors, selon le moyen, que le gardien d'une chose est exonéré de toute responsabilité si la faute de la victime, même prévisible, mais irrésistible, constitue la cause exclusive de l'accident ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui, après avoir constaté que la faute de M. X... était irrésistible pour la SNCF, le passage à niveau en cause comportant toutes les sécurités nécessaires à la protection des usagers, et que cette faute se trouvait à l'origine de l'accident, n'en a pas déduit qu'elle constituait la cause exclusive de l'accident, de sorte que la SNCF devait être exonérée de toute responsabilité, a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;
Mais attendu qu' après avoir constaté que la victime s'était engagée dans le passage à niveau jouxtant la gare alors que les demi-barrières étaient fermées et que cette infraction caractérisée à l'article R. 29 du Code de la route était à l'origine de l'accident, l'arrêt retient que la présence fautive d'un piéton sur ce passage à niveau était prévisible, d'autant plus qu'il était normalement emprunté par les voyageurs souhaitant traverser les voies ferrées ; que le conducteur de l'autorail avait déclaré qu'il estimait que le passage était particulièrement dangereux ; que la SNCF n'apportait pas la preuve qui lui incombait qu'elle avait pris toutes les précautions rendues nécessaires par l'éventuelle présence intempestive d'un piéton à cet endroit ;
Que de ces constatations et énonciations la cour d'appel a justement déduit que la SNCF n'était pas totalement exonérée de sa responsabilité ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SNCF aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la SNCF à payer aux consorts X... la somme globale de 2 200 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois janvier deux mille trois.