AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° K 01-01-761 formé par Mme X..., épouse Y... et le pourvoi n° V 01-01.816 formé par Mme Z..., épouse A... et autres ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° 01-01.761, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que Mme A..., mise une première fois en redressement judiciaire le 5 novembre 1993, a été condamnée, par jugement du 6 juin 1995, à exécuter sous astreinte divers travaux dans l'immeuble donné à bail à Mme Y... ; que le 7 août 1998 celle-ci a demandé au juge de l'exécution de liquider l'astreinte ayant couru du 6 février 1996 au 6 septembre 1998 ; que Mme A..., dont le plan de continuation a été résolu le 3 avril 1998 et qui a fait l'objet d'une nouvelle procédure de redressement judiciaire convertie ensuite en liquidation, a relevé appel du jugement du 7 octobre 1998 ayant accueilli la demande de liquidation de l'astreinte à une certaine somme et de fixation d'une nouvelle astreinte ;
que Mme Y... a demandé au juge-commissaire de la nouvelle procédure de la relever de la forclusion encourue dans la déclaration de sa créance établie par le jugement précité ; que sa demande a été rejetée ;
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt d'avoir dit n'y avoir lieu à liquidation de l'astreinte et fixation de sa créance, alors, selon le moyen :
1 ) que la créance née de la liquidation d'une astreinte a pour origine le manquement à l'obligation assortie de cette astreinte de sorte que l'action en liquidation de l'astreinte sanctionnant le manquement commis par le débiteur postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective de ce dernier, n'est pas soumise à la règle de l'interdiction des poursuites ni à l'obligation de déclaration des créances ;
qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 47 et 50 de la loi du 25 janvier 1985 devenus les articles L. 641-40 et L. 621-43 du Code de commerce ;
2 ) que les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture sont payées à leurs échéances, nonobstant la circonstance qu'elles ne résultent pas de la poursuite de l'activité ; qu'en se fondant, pour rejeter la demande de liquidation de l'astreinte afférente à la période postérieure au jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, de la poursuite de l'activité commerciale de Mme A..., la cour d'appel a violé l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 621-32 du Code de commerce ;
Mais attendu qu'après avoir exactement énoncé que l'action en liquidation d'une astreinte prononcée par une décision antérieure au jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire qui a suivi la résolution du plan de continuation et en condamnation au paiement de l'astreinte liquidée est soumise à la suspension des poursuites individuelles sans distinguer selon la période, antérieure ou postérieure à ce jugement, pendant laquelle l'astreinte a couru, l'arrêt, qui constate que Mme Y... n'avait déclaré sa créance correspondant à l'astreinte liquidée que le 25 mars 1999 et que sa demande en relevé de forclusion avait été rejetée par arrêt du 24 février 2000, n'encourt pas les griefs du moyen ; que celui-ci est mal fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi n° V 01-01.816 :
Vu l'article 47 de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 621-40 du Code de commerce ;
Attendu que, pour accueillir la demande de Mme Y... tendant à la fixation d'une astreinte à compter du 3 avril 1998 destinée à assortir la condamnation prononcée par le jugement du 6 juin 1995, l'arrêt retient que la suspension des poursuites individuelles ne concerne que l'action visant la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent et ne s'applique pas à une obligation de faire ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la fixation d'une astreinte définitive pour contraindre à l'exécution d'une obligation de faire née antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective du débiteur entraîne pour celui-ci le paiement d'une somme d'argent, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi n° K 01-01.761 formé par Mme Y... ;
Sur le pourvoi n° V 01-01.816 formé par Mme A... :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit qu'à défaut d'exécution des travaux prescrits par le jugement du 6 juin 1995, dans un délai de 60 jours à compter de la signification du présent arrêt, la condamnation prononcée est assortie à l'expiration de ce délai, à l'encontre de Mme Marie-Hélène Z..., épouse A... et M. Torelli, en sa qualité de liquidateur judiciaire de Mme A..., d'une astreinte définitive de 1 000 francs par jour de retard pendant une durée de trois mois, l'arrêt rendu le 16 novembre 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare irrecevable la demande de Mme Y... tendant à dire qu'à compter de l'arrêt à intervenir, il sera dû, faute de réalisation des travaux tels qu'ordonnés par jugement du 6 juin 1995, une astreinte de 1 000 francs par jour de retard ;
Condamne Mme Y... aux dépens y compris ceux exposés par elle devant les juges du fond ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette toutes les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un janvier deux mille trois.