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14/01/2003 | FRANCE | N°00-43879

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 janvier 2003, 00-43879


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Mme X..., embauchée le 2 novembre 1977 en qualité de responsable juridique par la société Sifco Stanley, devenue la société Stanley Tools France, a été licenciée pour faute grave le 2 septembre 1997 après mise à pied conservatoire prononcée le 25 août 1997 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Besançon, 25 avril 2000) de l'avoir déboutée de sa demande tendant à ce que la société Stanley to

ols France soit condamnée à lui verser des sommes à titre d'indemnité de licenciement, à titre ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Mme X..., embauchée le 2 novembre 1977 en qualité de responsable juridique par la société Sifco Stanley, devenue la société Stanley Tools France, a été licenciée pour faute grave le 2 septembre 1997 après mise à pied conservatoire prononcée le 25 août 1997 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Besançon, 25 avril 2000) de l'avoir déboutée de sa demande tendant à ce que la société Stanley tools France soit condamnée à lui verser des sommes à titre d'indemnité de licenciement, à titre d'indemnité de préavis, à titre de salaire afférent à la mise à pied conservatoire et à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail alors, selon le moyen :

1 / que le salarié dispose de la liberté d'expression dans et hors de l'entreprise ; que l'exercice de la liberté d'expression ne peut constituer une cause licite de licenciement que si elle dégénère en abus ;

que tel n'est pas le cas du salarié qui, dans l'exercice de sa mission de responsable juridique, a émis, en termes mêmes vifs, des reproches à l'égard d'un commissaire aux comptes qui se bornait à lui reprocher de s'être fait remplacer par un stagiaire pour envoyer les convocations à une assemblée générale de la société, dès lors que la lettre de la salariée ne comportait aucun terme injurieux, ni diffamatoire, ni excessif ; que la cour d'appel, qui a décidé le contraire, en se bornant à considérer, sans s'en expliquer davantage, que le courrier de l'exposante avait terni l'image de l'entreprise et pénalisé son fonctionnement, dès lors que la salariée était entrée en conflit avec un partenaire important de la société, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 122-6, L. 122-9 et L. 122-14-4 du Code du travail ;

2 / qu'un courrier de reproche adressé par une responsable juridique à un commissaire aux comptes ne constitue pas une faute grave dès lors qu'il ne contient aucun terme injurieux ni diffamatoire, et n'implique aucune intention malveillante ; qu'en décidant que le courrier du 10 juillet 1997 constitue une faute grave, sans relever que celui-ci contenait des termes injurieux ou diffamatoires, ou qu'il révélait une intention malveillante, la cour d'appel n'a, de nouveau, pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 122-6 et L. 122-9 du Code du travail ;

3 / que Mme X... avait soutenu, dans ses conclusions d'appel, de première part, que son courrier ne faisait que répondre à une attaque professionnelle de la part du commissaire aux comptes, qu'elle avait le droit de rétablir la vérité sur sa propre personne, et que le commissaire aux comptes avait, au demeurant, reçu l'instruction de s'adresser, non à elle, mais à son supérieur hiérarchique, M. Y..., de deuxième part, que le courrier du commissaire aux comptes auquel elle répondait était ainsi rédigé ; "il me semble que cette convocation relevait de vos fonctions. Vous avez pris la liberté d'en déléguer la tâche à une jeune stagiaire (...1", de sorte que le commissaire aux comptes s'était ainsi permis de juger les choix de gestion de Mme X..., sans même savoir que la stagiaire précitée, diplômée BAC + 5 en droit, disposait d'une documentation complète pour effectuer les convocations sans avoir à recourir à l'assistance du commissaire aux comptes, et que les convocations ont été faites sous le contrôle de M. Y..., de troisième part, qu'il est surprenant que l'employeur se soit basé sur les dires d'un tiers à l'entreprise pour décider d'un licenciement pour faute grave après avoir prononcé un avertissement, lui aussi, sur la base des déclarations du commissaire aux comptes, alors qu'antérieurement à ces incidents, Mme X... ne s'était jamais vu infliger le moindre reproche et qu'en réalité, l'employeur avait trouvé là une aubaine pour monter un licenciement contre Mme X..., et enfin, que la lettre du 10 juillet 1997 doit être appréciée au vu de l'ensemble de ces circonstances de fait, étant entendu que Mme X... n'a employé aucun terme déplacé ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs en méconnaissance de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

4 / que si les motifs de licenciement énoncés dans la lettre de licenciement fixent les termes du litige, c'est à la condition qu'ils constituent la vraie cause du licenciement; qu'ayant constaté que seul le grief tiré de la lettre du 10 juillet 1997 avait été à l'origine de la rupture, la cour d'appel qui a cependant examiné le caractère réel et sérieux du motif de licenciement tiré de l'utilisation à des fins personnelles du matériel informatique, a violé, par fausse application, l'article L. 122-14-2 du Code du travail ;

5 / que la cour d'appel, qui a relevé que le grief tiré de l'utilisation du matériel informatique ne constituait pas une faute grave, ne pouvait sur ce fondement rejeter les demandes d'indemnités de préavis et de licenciement de Mme X... ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles L. 122-6 et L. 122-9 du Code du travail ;

Mais attendu qu'examinant les motifs énoncés dans la lettre de licenciement, la cour d'appel, par motifs propres et adoptés, a relevé que la lettre du 10 juillet 1997 adressée par la salariée au commissaire au compte contenait des propos blessants et des allusions diffamatoires, faisant ressortir ainsi un abus ; qu'ayant relevé que ce fait constituait la réitération d'un fait de même nature survenu antérieurement et ayant déjà fait l'objet d'un avertissement, elle a pu décider, sans encourir les griefs du moyen, que le comportement de l'intéressé rendait impossible le maintien de celle-ci dans l'entreprise pendant la durée du préavis et constituait une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme X... de sa demande tendant à ce que la société Stanley tools soit condamnée à lui verser une somme à titre de remboursement des frais exposés par la salariée dans le cadre de la formation ICG alors, selon le moyen :

1 / qu'aux termes de l'article L. 931-1 du Code du travail, le congé de formation a pour objet de permettre à tout travailleur, au cours de sa vie professionnelle, de suivre, à son initiative, et à titre individuel, des actions de formation, indépendamment de sa participation aux stages compris dans le plan de formation de l'entreprise dans laquelle il exerce son activité ; que, selon l'article L. 931-6 du même Code, le bénéfice du congé demandé est de droit, sauf dans le cas où l'employeur estime, après avis du comité d'entreprise, ou s'il n'en existe pas des délégués du personnel, que cette absence pourrait avoir des conséquences préjudiciables à la production et à la marche de l'entreprise ; que l'octroi du congé de formation ne peut donner lieu à aucune discrimination quant aux facilités financières accordées par l'employeur avec les salariés bénéficiant d'actions de formation prévues par le plan de formation de l'entreprise ; qu'en refusant d'allouer à Mme X... le remboursement des frais qu'elle a exposés lors de son congé de formation aux motifs que ce congé formation ne faisait pas partie du plan de formation de l'entreprise, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les dispositions précitées des articles L. 931-1 et L. 931-6 du Code du travail ;

2 / qu'un engagement unilatéral de l'employeur favorable aux salariés revêt un caractère obligatoire ; qu'en l'espèce, le manuel de règles de conduite de l'entreprise, auquel fait référence le jugement entrepris, prévoit que "Stanley est un employeur qui pratique l'égalité des chances pour tous" en matière de formation, ce qui se traduit par des "possibilités de formation offertes aux employés pour les préparer à des emplois, aux responsabilités et qualifications plus élevées" ; que cet engagement de non-discrimination, conforme aux articles L. 931-1 et L. 931-6 du Code du travail en ce qui concerne les congés de formation, revêt un caractère obligatoire ; qu'en décidant que les frais de formation n'avaient pas à être remboursés à Mme X... aux motifs inopérants que le congé formation ne faisait pas partie du plan de formation, qu'il n'avait été obtenu que grâce à l'intervention du directeur des ressources humaines, et que le financement du stage n'avait été assuré par l'entreprise que pour dénouer une situation ambiguë avec le fongécif, la cour d'appel a violé, par refus d'application, ensemble les articles 1134 du Code civil, L. 931-1 et L. 931-6 du Code du travail ;

3 / que les juges ne peuvent modifier les termes du litige, tels qu'ils sont fixés, non seulement par les conclusions en demande, mais aussi par les conclusions en défense ; que la société Stanley tools, loin de contester l'inégalité de traitement dont faisait l'objet Mme X..., prétendait au contraire la justifier, en soutenant notamment qu'elle était libre de rembourser ou non les frais de formation d'un salarié en congé individuel de formation, que Mme X... oublie les conditions dans lesquelles ce congé lui a été accordé, et que le budget annuel ne permettait pas de mener à bien l'ensemble des actions de formation ;

qu'en relevant que Mme X... n'apportait pas la preuve d'une pratique de l'entreprise d'une prise en charge totale des frais liés à la formation, la cour d'appel a modifié les termes du litige, violant ainsi, par refus d'application, l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, qu'il résulte de la combinaison des articles L. 931-1, L. 931-6, L. 931-8-1, L. 931-8-2, L. 931-9, L. 951-1 et L. 951-3 du Code du travail que, sauf dispositions conventionnelles plus favorables non alléguées en l'espèce, l'employeur n'est pas tenu de prendre en charge les frais de transport et d'hébergement afférents au stage du salarié bénéficiaire d'un congé individuel de formation ; qu'à bon droit, abstraction faite du motif surabondant visé par le moyen, la cour d'appel a décidé par motifs propres et adoptés, que l'employeur n'avait pas à payer les sommes demandées de ce chef par la salariée ;

Attendu, ensuite, qu'interprétant le manuel des règles de conduite de l'entreprise, l'arrêt a retenu par motifs propres et adoptés, qu'il n'en résultait aucun engagement unilatéral de l'employeur relatif aux conditions d'exécution des différentes formations, quelle que soit leur nature ;

Attendu, enfin, que la cour d'appel n'a pas modifié les termes du litige, ayant pour seul objet le remboursement des frais engagés par la salariée à l'occasion du stage, en relevant que l'employeur contestait devoir ce paiement ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer ni sur le deuxième ni sur le quatrième moyen annexés au présent arrêt, qui ne seraient pas de nature à permettre d'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Stanley Tools France,venant aux droits de la société Sicfo Stanley ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00-43879
Date de la décision : 14/01/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRAVAIL REGLEMENTATION - Formation professionnelle - Congé individuel de formation - Frais de formation - Frais de transport et d'hébergement - Charge - Détermination .

Il résulte de la combinaison des articles L. 931-1, L. 931-6, L. 931-8-1, L. 931-8-2, L. 931-9, L. 951-1 et L. 951-3 du Code du travail que, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, l'employeur n'est pas tenu de prendre en charge les frais de transport et d'hébergement afférents au stage du salarié bénéficiaire d'un congé individuel de formation.


Références :

Code du travail L931-1, L931-6, L931-8-1, L931-8-2, L931-9, L951-1, L951-3

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, 25 avril 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 jan. 2003, pourvoi n°00-43879, Bull. civ. 2003 V N° 7 p. 6
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2003 V N° 7 p. 6

Composition du Tribunal
Président : M. Sargos .
Avocat général : M. Duplat.
Rapporteur ?: M. Bouret.
Avocat(s) : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, la SCP Monod et Colin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:00.43879
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