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19/12/2002 | FRANCE | N°00-22085

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 décembre 2002, 00-22085


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X..., salarié marocain occupé en France dont l'épouse était demeurée au Maroc, a fait venir celle-ci sur le territoire national afin qu'elle y reçoive les soins que nécessitait son état de santé ;

que Mme X... a été hospitalisée de son arrivée en France en mai 1996 jusqu'au 2 juin 1997 ; que la caisse primaire d'assurance maladie a refusé de prendre en charge les frais correspondants au motif que l'article L.161-25-2 du Code de la sécurité sociale subo

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AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X..., salarié marocain occupé en France dont l'épouse était demeurée au Maroc, a fait venir celle-ci sur le territoire national afin qu'elle y reçoive les soins que nécessitait son état de santé ;

que Mme X... a été hospitalisée de son arrivée en France en mai 1996 jusqu'au 2 juin 1997 ; que la caisse primaire d'assurance maladie a refusé de prendre en charge les frais correspondants au motif que l'article L.161-25-2 du Code de la sécurité sociale subordonne l'octroi des prestations d'assurance maladie aux ayants droit majeurs de nationalité étrangère d'un assuré social à la condition d'une situation régulière sur le territoire français et que M. X... ne produisait pour son conjoint aucun des justificatifs de séjour énumérés par l'article D.161-15 du même Code ;

que la demande de prise en charge formée par M. X... a été rejetée par la cour d'appel (Paris, 11 octobre 2000) ;

Sur les première, troisième, quatrième et cinquième branches du moyen unique, telles qu'elles figurent en annexe :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces branches du moyen qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Et sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, que l'article L.161-25-2 du Code de la sécurité sociale édicte une discrimination fondée sur la nationalité des ayants droit de l'assuré social puisqu'il exige à leur égard une condition de résidence en France qui n'est pas exigée pour les ayants droit de nationalité française ; que cette discrimination qui n'a aucune justification tenant aux nécessités d'une société démocratique et qui est utilisée pour faire échec à la prise en charge de soins en France dont la cour d'appel relève qu'ils sont "appropriés", est directement contraire aux dispositions des articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ensemble l'article 1 de son Protocole n° 1, qui ont ainsi été violés ;

Attendu, cependant, que l'article L.332-3 du Code de la sécurité sociale subordonne en principe la prise en charge des assurés et de leurs ayants droit, sans distinction de nationalité, à la condition que les soins soient dispensés en France ; que le bénéfice des prestations d'assurance maladie est en outre soumis, s'agissant des ayants droit majeurs de nationalité étrangère, à une exigence de régularité de leur présence sur le territoire national ;

Attendu, d'une part, qu'une telle disposition revêt un caractère objectif puisqu'un refus d'entrée sur le territoire ne peut, en vertu de l'article 3 2 du Protocole n° 4, être opposé par un Etat à ses propres ressortissants ; que, d'autre part, elle est justifiée par la nécessité pour un Etat démocratique d'exercer un contrôle à l'entrée sur son territoire ; qu'enfin, l'ouverture des droits sociaux pour le conjoint de l'assuré n'est subordonnée qu'à la production d'un récépissé de demande de titre de séjour et non à une autorisation administrative ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la distinction résultant des articles L.161-25-2 et D.161-15 du Code de la sécurité sociale n'est pas contraire aux exigences des articles susvisés de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de son Protocole additionnel ; d'où il suit que cette branche du moyen n'est pas fondée ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la Caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00-22085
Date de la décision : 19/12/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

SECURITE SOCIALE, ASSURANCES SOCIALES - Prestations (dispositions générales) - Bénéficiaires - Ayants droit majeurs de nationalité étrangère d'un assuré - Conditions - Détermination - Portée .

ETRANGER - Sécurité sociale - Assurances sociales - Prestations - Bénéfice - Condition

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 14 - Principe de non-discrimination - Sécurité sociale - Assurances sociales - Prestations - Bénéficiaires - Ayants droit de nationalité étrangère d'un assuré - Conditions - Conditions distinctes pour les ayants droit de nationalité française d'un assuré - Distinction justifiée - Portée

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Premier protocole additionnel - Article 1er - Protection de la propriété - Sécurité sociale - Prestations - Bénéficiaires - Ayants droit de nationalité étrangère d'un assuré - Conditions - Portée

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 8 - Respect de la vie familiale - Sécurité sociale - Prestations - Bénéficiaires - Ayants droit de nationalité étrangère d'un assuré - Conditions - Portée

L'article L. 332-3 du Code de la sécurité sociale subordonne en principe la prise en charge des assurés et de leurs ayants droit, sans distinction de nationalité, à la condition que les soins soient dispensés en France et le bénéfice des prestations d'assurance maladie est en outre soumis, s'agissant des ayants droit majeurs de nationalité étrangère, à une exigence de régularité de leur présence sur le territoire national. Une telle disposition revêt un caractère objectif dès lors qu'un refus d'entrée sur le territoire ne peut, en vertu de l'article 3§2 du Protocole n° 4, être opposé par un Etat à ses propres ressortissants, qu'elle est justifiée par la nécessité pour un Etat démocratique d'exercer un contrôle à l'entrée sur son territoire, et qu'enfin, l'ouverture des droits sociaux pour le conjoint de l'assuré n'est subordonnée qu'à la production d'un récépissé de demande de titre de séjour et non à une autorisation administrative. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la distinction résultant des articles L. 161-25-2 et D. 161-15 du Code de la sécurité sociale n'est pas contraire aux exigences des articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du Protocole n° 1.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, art. 8 et 14, protocole n° 1 art. 1er, protocole n° 4 art. 3 § 2

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11 octobre 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 déc. 2002, pourvoi n°00-22085, Bull. civ. 2002 V N° 404 p. 402
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2002 V N° 404 p. 402

Composition du Tribunal
Président : M. Sargos .
Avocat général : M. Lyon-Caen.
Rapporteur ?: Mme Guihal-Fossier.
Avocat(s) : la SCP Waquet, Farge et Hazan, la SCP Gatineau.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:00.22085
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