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03/12/2002 | FRANCE | N°01-60823

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 décembre 2002, 01-60823


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué, que les institutions représentatives du personnel au sein de la Caisse d'épargne d'Alsace étaient organisées en application d'un accord collectif du 8 janvier 1993, qui prévoyait notamment une représentation des délégués syndicaux au niveau de chaque "groupe" ; que cet accord a été dénoncé le 29 septembre 2000 par la Caisse, qui a entrepris une réorganisation tendant à supprimer les échelons intermédiaires que constituent les "groupes"

; que, le 23 mai 2001, le syndicat Sud Caisse d'épargne a désigné M. X... délé...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué, que les institutions représentatives du personnel au sein de la Caisse d'épargne d'Alsace étaient organisées en application d'un accord collectif du 8 janvier 1993, qui prévoyait notamment une représentation des délégués syndicaux au niveau de chaque "groupe" ; que cet accord a été dénoncé le 29 septembre 2000 par la Caisse, qui a entrepris une réorganisation tendant à supprimer les échelons intermédiaires que constituent les "groupes" ; que, le 23 mai 2001, le syndicat Sud Caisse d'épargne a désigné M. X... délégué syndical du groupe Alsace Sud ;

Sur le second moyen qui est préalable :

Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué d'avoir débouté la Caisse d'épargne de sa contestation de la désignation de M. Y... en qualité de délégué syndical Sud Caisse d'épargne pour le "groupe Alsace Sud" intervenue le 23 mai 2001, alors, selon le moyen :

1 / qu'en l'absence totale de critères aussi essentiels que l'ancienneté et l'expérience, un syndicat ne peut être déclaré représentatif en fait ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations du jugement que le syndicat Sud Caisses d'épargne, ne s'est implanté au sein de la Caisse d'épargne et de prévoyance d'Alsace que le 24 janvier 2001 et qu'il a procédé le 23 mai suivant (soit 4 mois plus tard) à la désignation d'un délégué syndical pour le groupe Alsace Sud, en la personne de M. Y... ;

que le juge d'instance constate qu'en raison de cette création très récente, le syndicat Sud, qui ne pouvait invoquer l'expérience acquise par ses membres au sein d'un autre syndicat, ne pouvait se prévaloir de la désignation contestée, d'une ancienneté et d'une expérience significatives ; qu'en considérant que l'absence de ces deux critères essentiels de représentativité, pouvait néanmoins être compensée par la présence d'autres critères permettant de déclarer le syndicat représentatif, le jugement n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L 133-2 et L 412-11 du Code du travail ;

2 / qu'en tout état de cause, ne peut être reconnu représentatif en fait, un syndicat de création récente et dénué d'expérience, dont les cotisations émanant de ses 41 adhérents ne lui procurent à la date de la désignation contestée que des ressources encore limitées (d'un montant de 5 636 francs pour l'ensemble de la Caisse d'épargne d'Alsace) et dont l'activité se résume depuis son apparition dans l'entreprise, à la diffusion massive de tracts dont une minorité seulement présente un intérêt local, ainsi qu'à des interventions ponctuelles en faveur de certains salariés ; qu'en l'absence d'expérience et d'ancienneté et en dépit de ressources modiques, le jugement qui déclare néanmoins le syndicat Sud Caisse d'épargne représentatif au sein du "groupe" Alsace Sud sans caractériser l'exercice d'une véritable activité syndicale organisée de nature à révéler l'influence du nouveau syndicat auprès du personnel de ce groupe, a violé ce faisant les articles L 133-2 et L 412-11 du Code du travail ;

3 / qu'il résulte de l'article L 412-4 du Code du travail que les droits reconnus par la section II chapitre III du titre IV du Code du travail (dont celui de distribuer des tracts prévus par l'article L 412-8 du Code du travail) ne bénéficient qu'aux syndicats représentatifs ; qu'ainsi, un syndicat dont la représentativité n'est pas encore acquise ne peut prétendre exercer ce droit ; qu'en déclarant néanmoins le syndicat Sud représentatif au sein du "groupe" Alsace Sud, au vu de la distribution de tracts durant la période comprise entre le 25 janvier 2001 (date d'apparition de cette organisation dans l'entreprise) et le 23 mai 2001, date de la désignation de M. Y..., le tribunal a violé les articles L 133-2, L 412-4, L. 412-8 et L 412-11 du Code du travail ;

4 / qu'en tout état de cause, l'existence d'une activité syndicale organisée de nature à conférer à un syndicat le caractère représentatif, suppose une utilisation légitime par ce dernier des moyens d'action mis à la disposition des organisations syndicales ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations du jugement que le syndicat Sud s'est arrogé la possibilité d'utiliser le réseau Internet et Intranet de l'entreprise pour diffuser à tout moment à chaque salarié du Groupe Alsace, à son poste de travail, des messages dont une partie seulement concernait le personnel d'Alsace Sud, les autres tracts concernant l'entreprise dans son ensemble ou traitant de l'actualité sociale au plan national ; que l'illégitimité des moyens d'action ainsi déployés excluait l'existence d'une activité syndicale organisée de nature à compenser la défaillance des autres critères ; qu'en décidant que le contraire, quand le recours à une telle méthode dénotait de la part du nouveau syndicat un comportement totalement incompatible avec la reconnaissance de sa représentativité de fait, le tribunal a violé les articles L 133-2 et L 412-11 du Code du travail ;

Mais attendu que le tribunal d'instance, après avoir fait, ressortir que l'indépendance du syndicat n'était pas contestée, et caractérise son influence au regard des critères énoncés par l'article 133-2 du Code du travail, a estimé, sans encourir les griefs du moyen, qu'il était représentatif dans le cadre de l'établissement tel que défini par l'accord collectif pour l'exercice du droit syndical ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches :

Attendu qu'il est encore fait grief au jugement attaqué d'avoir débouté la Caisse d'épargne de sa contestation de la désignation de M. Y... en qualité de délégué syndical Sud Caisses d'épargne pour le "groupe Alsace Sud" intervenue le 23 mai 2001, alors, selon le moyen :

1 / que la disparition, par suite d'une réorganisation interne, du cadre de la mise en place des délégués syndicaux, interdit à une organisation syndicale de procéder à toute désignation de délégué à ce niveau ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que la réorganisation de l'entreprise mise en oeuvre à compter du 1er janvier 2001, a entraîné la disparition des différents "groupes" servant jusqu'alors de cadre à la désignation des délégués syndicaux ; qu'ainsi, faute de présence sur place d'un représentant de l'employeur à partir de cette date, aucune nouvelle désignation de délégués syndicaux ne pouvait valablement intervenir au niveau du "groupe" ; qu'en validant néanmoins la désignation de M. Y... en qualité de délégué syndicat Sud du "groupe Alsace Sud" de la Caisse d'épargne, notifiée le 23 mai 2001, soit à une date où le cadre de la mise en place de cette désignation avait cessé d'exister, le jugement a violé les articles L 411-11 et L 412-21 du Code du travail ;

2 / que la survie provisoire des dispositions de l'accord local remis en cause, ayant fixé le cadre conventionnel de désignation des délégués syndicaux au niveau des "groupes", peut tout au plus permettre la poursuite des mandats déjà encours, des délégués syndicaux désignés à ce niveau ; qu'elle ne peut en aucun cas autoriser l'existence d'une nouvelle désignation de délégué syndical effectuée après disparition du cadre de mise en place des délégués syndicaux ; qu'en l'espèce, il est constant qu'à partir du 1er janvier 2001, les "groupes" composant la Caisse d'épargne d'Alsace, au niveau desquels les délégués syndicaux étaient jusqu'alors désignés, ont disparu par suite de la réorganisation du réseau commercial s'accompagnant de la disparition sur place d'un représentant qualifié de l'employeur ; qu'ainsi, à compter de cette date, aucune nouvelle désignation de délégué syndical ne pouvait intervenir à ce niveau ; qu'en validant néanmoins la désignation de M. Y... en qualité de délégué syndical Sud pour le "groupe Alsace Sud" de la Caisse d'épargne d'Alsace notifiée le 23 mai 2001, soit postérieurement à la disparition du "groupe Alsace", le jugement a méconnu la portée de la survie provisoire de l'acte conventionnel et a violé les articles L 132-8, L 412-11 et L 412-21 du Code du travail ;

Mais attendu qu'en application de l'article L. 132-8, alinéa 3, du Code du travail, l'accord collectif dénoncé continue à s'appliquer pendant une durée d'un an à compter de la dénonciation si un nouvel accord n'est pas conclu pendant ce délai ; qu'ayant constaté que l'accord collectif du 8 janvier 1993 avait été dénoncé le 29 septembre 2000, la cour d'appel a exactement décidé qu'en l'absence d'un nouvel accord, il continuait de produire effet jusqu'au 31 décembre 2001 ;

Mais sur la dernière branche du premier moyen :

Vu les articles L. 412-11, R. 412-1 et R. 412-3 du Code du travail, ensemble l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que pour décider que la désignation litigieuse était régulière le jugement attaqué énonce que le syndicat Sud est représentatif dans le groupe Alsace Sud ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions du chef d'entreprise, qui faisaient valoir que le 20 avril 2001 le syndicat Sud avait désigné M. Z... délégué syndical d'entreprise, alors que cette désignation, non modifiée à la date de la désignation de M. Y..., rendait inopérante cette dernière, le tribunal d'instance a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 6 septembre 2001, entre les parties, par le tribunal d'instance de Mulhouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Colmar ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la Caisse d'épargne et de prévoyance d'Alsace ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois décembre deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 01-60823
Date de la décision : 03/12/2002
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONVENTIONS COLLECTIVES - Dispositions générales - Accord collectif - Dénonciation - Application pendant un an.


Références :

Code du travail L132-8, alinéa 3

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Mulhouse (contentieux des élections professionnelles), 06 septembre 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 déc. 2002, pourvoi n°01-60823


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BOUBLI conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:01.60823
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