AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que, par acte authentique de donation-partage du 25 mars 1955, Mme Marie X... s'est vue attribuer la parcelle 1866 lieudit "Les Borderies" et la parcelle 2004 du "Pré de la Noue" ; que son frère, M. Armand X... a reçu les parcelles 2006 et 2007 des "Borderies" et 1760 du "Pré de la Noue" ; que le même jour ils ont signé un acte sous-seing privé aux termes duquel ils échangeraient entre eux les parcelles 1866 et 1760, lorsque Mme X... quitterait l'habitation sise sur la parcelle 1866 ; que, par acte du 20 avril 1965, Mme X... a vendu la parcelle 2004 du "Pré de La Noue", à son frère, qui est ainsi devenu propriétaire de l'intégralité de celui-ci ; que, le 2 février 1993, M. X... a assigné sa soeur aux fins de régularisation judiciaire de l'acte d'échange, sa soeur ayant quitté l'immeuble des "Borderies" ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1131 du Code civil ;
Attendu que, pour décider que l'acte d'échange était nul pour absence de cause, l'arrêt retient que la vente effectuée par Mme X... à son frère d'une parcelle non visée par l'échange avait fait disparaître la cause impulsive et déterminante de l'échange et rompu l'équilibre du contrat puisque Mme X... ne pouvait plus prétendre à un quelconque regroupement à son profit ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'existence du mobile déterminant d'un contrat doit s'apprécier à la date où il est souscrit, la cour d'appel, qui s'est fondée sur des faits postérieurs, a violé le texte susvisé ;
Et sur la seconde branche :
Vu l'article 1708 du Code civil ;
Attendu que, pour rejeter la demande de M. X..., l'arrêt retient que la vente du 20 avril 1965 devait s'analyser en une renonciation implicite mais non équivoque des parties à se prévaloir de l'acte d'échange du 24 mars 1955 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la vente, qui portait sur une parcelle non visée par l'échange, ne suffisait pas à elle seule à caractériser la renonciation non équivoque des deux parties aux droits qu'ils tenaient de l'acte d'échange du 24 mars 1955, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 novembre 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;
Condamne Mlle X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de Mlle X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois décembre deux mille deux.