AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses troisième et quatrième branches :
Vu l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Serge X... effectuait bénévolement des travaux de bûcheronnage dans la propriété de son frère, M. Pascal X... ; que le fils mineur de ce dernier était à proximité et a été blessé par un éclat échappé du coin métallique qu'il utilisait pour fendre des troncs d'arbre ; que l'enfant a perdu l'usage d'un oeil ; que M. Pascal X... et son épouse, agissant en qualité d'administrateurs légaux de leur fils mineur, ont assigné en responsabilité et dommages-intérêts, sur le fondement du texte susvisé, Serge X... et son assureur, la compagnie Assurances générales de France (AGF) ; que la Caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise a été appelée en la cause ; qu'à la suite du décès de Serge X... l'instance a été reprise contre ses ayants droit ;
Attendu que pour débouter les époux X... de leurs demandes, l'arrêt retient qu'il ne résulte pas des pièces versées aux débats que Serge X... était propriétaire de l'outil qu'il utilisait ou qu'il en avait la garde, alors que la charge de cette preuve incombait aux demandeurs ; que cet outil était utilisé dans le cadre d'un travail effectué en commun ; que les travaux de bûcheronnage, particulièrement dangereux quand ils sont effectués par plusieurs personnes travaillant à proximité les unes des autres, supposent une organisation assurant la sécurité des participants et des tiers ; que Pascal X..., au profit de qui étaient réalisés les travaux, se devait de prendre toutes précautions pour éviter la survenance d'un accident et avait, en conséquence, conservé les pouvoirs de surveillance et de contrôle caractérisant la garde des outils utilisés par ses assistants ; qu'ainsi, la responsabilité de Serge X... ne pouvait être recherchée sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;
Qu'en statuant ainsi, sans préciser les éléments de fait qui, caractérisant le maintien de la garde de l'outil à M. Pascal X..., empêchaient en l'espèce que la garde de l'outil ayant causé le dommage appartînt à celui qui l'utilisait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 juin 1999, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;
Condamne les consorts X..., la compagnie AGF et la CPAM du Val-d'Oise aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la compagnie Assurances générales de France ;
Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille deux.