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24/09/2002 | FRANCE | N°00-43528

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 septembre 2002, 00-43528


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X..., qui était entré au service de la société SAE Bâtiment France en 1973 et qui exerçait depuis le mois de mai 1992 des fonctions de directeur régional, a été licencié le 3 juillet 1997 pour faute grave ; qu'il a saisi le juge prud'homal de demande en paiement de dommages-intérêts, pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d'indemnités de rupture ;

Sur le moyen unique, pris en ses quatre premières branches :

Attendu que M. X... fait

grief à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de ses demandes en paiement de dommages-intér...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X..., qui était entré au service de la société SAE Bâtiment France en 1973 et qui exerçait depuis le mois de mai 1992 des fonctions de directeur régional, a été licencié le 3 juillet 1997 pour faute grave ; qu'il a saisi le juge prud'homal de demande en paiement de dommages-intérêts, pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d'indemnités de rupture ;

Sur le moyen unique, pris en ses quatre premières branches :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de ses demandes en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :

1 / qu'il appartient à l'employeur qui se prévaut, à l'appui d'un licenciement pour faute grave, de la violation par le salarié d'une règle instituée par l'entreprise en matière salariale, de prouver l'existence de l'obligation dont la violation constituerait la faute grave alléguée ; qu'en retenant qu'il appartenait au salarié de faire la preuve de l'étendue de ses pouvoirs en matière salariale, quand il incombait à l'employeur d'établir le contenu des règles en vigueur dans la société et de démontrer, en particulier, que le salarié avait l'obligation, avant d'attribuer des primes exceptionnelles, de soumettre celles-ci à l'approbation de ses supérieurs, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et ainsi violé l'article 1315 du Code civil ;

2 / que le salarié soutenait dans ses conclusions d'appel que la procédure d'approbation préalable en matière de rémunération concernait l'évolution de la rémunération globale des salariés et les primes d'intéressement, à l'exclusion des primes de chantier exceptionnelles qu'il avait le pouvoir d'attribuer de son propre chef ; qu'en retenant que le salarié avait excédé ses pouvoirs en attribuant de son propre chef des primes de chantier exceptionnelles, sans rechercher si l'approbation préalable de ses supérieurs hiérarchiques n'était pas requise, en matière de primes, uniquement pour les primes d'intéressement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil, L. 122-6, L. 122-8, L. 122-9 et L. 122-14-3 du Code du travail ;

3 / que le salarié n'a nullement reconnu, dans sa lettre du 19 juin 1997, l'existence de l'obligation qu'il aurait eu de faire préalablement approuver par ses supérieurs le versement de primes exceptionnelles ; qu'en retenant que le salarié avait reconnu, dans cette lettre, que l'attribution des primes exceptionnelles ne relevait pas de sa seule décision, la cour d'appel a dénaturé la lettre de M. X... du 19 juin 1997 et ainsi violé l'article 1134 du Code civil ;

4 / que la renonciation au droit de contester l'existence d'une obligation ne se présume pas et doit résulter d'actes positifs non équivoques, de sorte que les juges ne pouvaient retenir que le salarié avait reconnu l'obligation qu'il aurait eu de faire approuver par son supérieur le versement des primes litigieuses, sans relever d'acte manifestant sans équivoque sa volonté de renoncer à son droit de contester l'existence de cette obligation ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu que, sans limiter son examen à la seule lettre du 19 juin 1997, la cour d'appel a retenu, par motifs propres et adoptés et dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, d'une part, que M. X... n'avait pas le pouvoir d'accorder des primes de chantier au personnel placé sous son autorité sans l'accord préalable de ses supérieurs, d'autre part, qu'il avait excédé ses pouvoirs en consentant à des collaborateurs des primes exceptionnelles, sans en référer au préalable à l'employeur et sans même l'en informer ; qu'elle a, en conséquence, décidé que la faute de M. X... était établie ; que le moyen n'est pas fondé en ses quatre premières branches ;

Mais sur la cinquième branche du moyen :

Vu les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code du travail ;

Attendu que, pour débouter M. X... de ses demandes en paiement d'indemnités de préavis et de licenciement, la cour d'appel a retenu que l'excès de pouvoir commis par ce salarié dans un domaine sensible touchant aux rémunérations, en sachant que les décisions qui en relevaient étaient prises par la direction centrale, constituait un manquement caractérisé à ses obligations, qualifié à juste titre de faute grave et rendant impossible son maintien dans l'entreprise ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les faits retenus à la charge du salarié n'étaient pas de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise pendant la durée du préavis et ne constituaient pas une faute grave, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes en paiement d'indemnité de préavis, de congés payés s'y rapportant et d'indemnité de licenciement, l'arrêt rendu le 4 avril 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;

Condamne la société SAE Bâtiment France aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société SAE Bâtiment France ; la condamne à payer à M. X... la somme de 1 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre septembre deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00-43528
Date de la décision : 24/09/2002
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges (chambre sociale), 04 avril 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 sep. 2002, pourvoi n°00-43528


Composition du Tribunal
Président : Président : M. SARGOS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:00.43528
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