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24/09/2002 | FRANCE | N°00-10768

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 24 septembre 2002, 00-10768


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., qui exerçait l'activité de marchand de biens, était titulaire à la société Banca Commerciale Italiana d'un compte de titres personnel et d'un compte courant professionnel sur lequel elle bénéficiait d'une ouverture de crédit dont les conditions d'intérêts devaient, selon les stipulations contractuelles liant les parties, faire l'objet d'accords ultérieurs ; que le 25 octobre 1991, la société Banca C

ommerciale Italiana a notifié à sa cliente l'interruption de son concours à ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., qui exerçait l'activité de marchand de biens, était titulaire à la société Banca Commerciale Italiana d'un compte de titres personnel et d'un compte courant professionnel sur lequel elle bénéficiait d'une ouverture de crédit dont les conditions d'intérêts devaient, selon les stipulations contractuelles liant les parties, faire l'objet d'accords ultérieurs ; que le 25 octobre 1991, la société Banca Commerciale Italiana a notifié à sa cliente l'interruption de son concours à l'issue d'un délai de préavis qui était précisé en lui proposant un plan d'amortissement du découvert qui s'établissait d'après elle à la somme de 1 718 384,52 francs ; que Mme X... a retourné un exemplaire de cette correspondance à son expéditeur après y avoir apposé la mention "lu et approuvé, bon pour accord" et que dans une autre correspondance du 31 octobre 1991, elle a sollicité l'accord de la banque sur de nouvelles modalités de remboursement de la créance, qui ont été acceptées, ainsi que sur la possibilité "d'envisager de revoir le taux du découvert et de le ramener à un taux proche des crédits normaux, à savoir le taux moyen de 12 ou 13 %" ; que Mme X... n'ayant pas respecté ses engagements, la société Banca Commerciale Italiana a réclamé judiciairement la fixation du montant de sa créance ; que Mme X... a fait valoir qu'en l'absence d'accord des parties, elle ne devait pas les intérêts comptabilisés par la société Banca Commerciale Italiana et que celle-ci avait engagé sa responsabilité à son égard pour avoir manqué à son devoir d'information et de conseil en laissant coexister deux comptes dont l'un générait des agios importants tandis que l'autre ne comportait que des actifs faiblement rémunérés et soutenu abusivement son activité

professionnelle ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt du rejet de ses prétentions, alors, selon le moyen, que l'acte que lui avait notifié la banque le 25 octobre 1991 comportait cumulativement l'indication d'une position débitrice de son compte courant à hauteur d'un certain montant, d'une notification de la rupture du découvert jusqu'alors accordé conformément à l'article 60 de la loi du 24 janvier 1984, et d'une proposition d'octroi d'un délai supplémentaire moyennant l'acceptation d'un plan d'amortissement ; que la cour d'appel n'a pas justifié l'attribution à ce document de la portée d'un arrêté de compte accepté par les parties en l'état des seules mentions indicatives d'une position débitrice du compte courant et de l'offre d'une continuation, certes moins importante, du concours bancaire ; que l'arrêt attaqué a, dès lors, violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui n'a pas déclaré Mme X... irrecevable à contester le montant de la créance mais a rejeté ses prétentions après en avoir examiné le bien fondé, n'a tiré aucune conséquence juridique de la portée qu'elle avait attribuée à l'acte notifié le 25 octobre 1991 en le qualifiant d'arrêté de compte ; d'où il suit que le grief, qui s'attaque à un motif de l'arrêt n'ayant eu aucune influence sur la solution du litige, est inopérant ;

Sur le second moyen, pris en ses deux branches:

Attendu que Mme X... fait encore le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :

1 / que la cour d'appel avait le devoir de rechercher, comme elle l'y avait invitée dans ses conclusions d'appel, si la banque n'aurait pas failli à son obligation d'information et de mise en garde en consentant des possibilités de découvert générant la perception d'agios importants et le maintien d'actifs de capitalisation faiblement rémunérés ; qu'en se bornant à déclarer, afin d'écarter la mise en jeu de la responsabilité de la banque, que la distinction du patrimoine personnel et du compte professionnel relevait de la seule décision de Mme X... et que ledit établissement n'avait commis aucun mouvement anarchique de compte, l'arrêt attaqué n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1135 et 1147 du Code civil ;

2 / que le grief de soutien abusif à l'activité de marchand de biens devait être analysé par rapport aux revenus effectifs qu'elle avait perçus à raison de l'exercice de cette activité ; qu'en se bornant à examiner la valeur d'un tel grief par rapport aux actifs de fortune privée lui appartenant au début de l'année 1991, l'arrêt attaqué, qui a statué par un motif inopérant, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1147 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que Mme X... ayant choisi de dissocier ses intérêts personnels et professionnels en ouvrant deux comptes indépendants sans convention d'unité entre ceux-ci et la banque n'ayant ni le pouvoir de s'immiscer dans les affaires de sa cliente ni celui d'apprécier l'opportunité de ses décisions, la cour d'appel retient exactement qu'il n'appartenait qu'à celle-ci de procéder elle-même aux réajustements nécessaires pour éteindre sa dette de sorte que les manquements allégués n'étaient pas établis ;

Et attendu, d'autre part, que les concours litigieux ayant été demandés par Mme X... et celle-ci n'ayant jamais prétendu que la banque aurait eu sur la fragilité de sa propre situation financière des informations qu'elle-même aurait ignorées, la cour d'appel a, abstraction faite des motifs critiqués par la seconde branche, pu statuer comme elle a fait ;

Qu'ainsi, le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 1338 du Code civil, ensemble l'article 1907, alinéa 2, du même Code, l'article 4 de la loi du 28 décembre 1966 alors applicables et l'article 2 du décret du 4 septembre 1985 ;

Attendu que pour rejeter la contestation de Mme X... relative aux intérêts conventionnels comptabilisés par la société Banca Commerciale Italiana, la cour d'appel retient que si leur taux n'a pas été fixé par écrit, cette irrégularité a été couverte dès lors que l'intéressée avait reconnu, à deux reprises, en approuvant la teneur de l'acte de notification du 25 octobre 1991, puis en confirmant, dans sa propre correspondance du 31 octobre suivant, le montant du découvert dont le paiement lui était réclamé, son obligation de les payer ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la confirmation d'un acte nul exige à la fois la connaissance du vice l'affectant et l'intention de le réparer, et que la réalisation de ces conditions ne pouvait résulter de la seule approbation, a posteriori, et sans autre précision, du montant global d'un découvert dont le calcul et les éléments constitutifs, notamment ceux relatifs au taux d'intérêt pratiqué, n'étaient pas même détaillés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :

Vu les articles 455 du nouveau Code de procédure civile, 1907 alinéa 2, du Code civil et 4 de la loi du 28 décembre 1966 alors applicables ;

Attendu que pour condamner Mme X... au montant des sommes réclamées par la société Banca Commerciale Italiana, l'arrêt retient encore qu'à la date du 31 octobre 1991, celle-ci avait approuvé le taux de 12,35 % effectivement pratiqué par la banque ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que Mme X... avait fait valoir dans ses conclusions qu'elle s'était bornée, dans sa lettre du 31 octobre 1991, à solliciter pour l'avenir la réduction du taux du découvert et que la réponse que lui avait adressée la banque était restée taisante sur ce point, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions ayant rejeté les contestations relatives au calcul et au montant de la créance de la société Banca Commerciale Italiana, l'arrêt rendu le 18 novembre 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;

Condamne la société Banca Commerciale Italiana aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Banca Commerciale Italiana ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre septembre deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 00-10768
Date de la décision : 24/09/2002
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

BANQUE - Compte - Compte à affectation spéciale - Compte personnel et professionnel sans convention d'unité - Obligations du banquier - Non-immixtion dans les affaires du client.

BANQUE - Compte - Relevé - Connaissance du taux des intérêts pratiqués - Approbation du découvert (non).


Références :

Code civil 1147, 1338 et 1907, alinéa 2
Décret 85-944 du 04 septembre 1985 art. 2
Loi 66-1012 du 28 décembre 1966 art. 4

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (Chambre civile), 18 novembre 1999


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 24 sep. 2002, pourvoi n°00-10768


Composition du Tribunal
Président : Président : M. DUMAS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:00.10768
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