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22/05/2002 | FRANCE | N°99-11052

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 22 mai 2002, 99-11052


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par Mme Martine Y..., ès qualité de mandataire liquidateur de la SCI l'Ebène, société civile immobilière, demeurant ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 27 novembre 1998 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (8e chambre civile), au profit :

1 / de la société Sofal, société anonyme, dont le siège est ...,

2 / de la société Vinco MT, société anonyme, dont le siège est ...,

3 / de M. Emmanuel Z..

., ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Vinco MT, en redressement judiciaire, demeura...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par Mme Martine Y..., ès qualité de mandataire liquidateur de la SCI l'Ebène, société civile immobilière, demeurant ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 27 novembre 1998 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (8e chambre civile), au profit :

1 / de la société Sofal, société anonyme, dont le siège est ...,

2 / de la société Vinco MT, société anonyme, dont le siège est ...,

3 / de M. Emmanuel Z..., ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Vinco MT, en redressement judiciaire, demeurant ...,

4 / de M. Marc X..., ès qualités de représentant des créanciers au redressement judiciaire de la société Vinco MT, demeurant ...,

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 26 mars 2002, où étaient présents : M. Dumas, président, Mme Collomp, conseiller rapporteur, M. Métivet, conseiller, Mme Moratille, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Collomp, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de Mme Y..., ès qualités de mandataire liquidateur de la SCI l'Ebène, de la SCP Vier et Barthélémy, avocat de l'Union industrielle, venant aux droits de la société Sofal, de la SCP Gatineau, avocat de la société Vinco MT et de MM. Z... et X..., ès qualités, les conclusions de M. Viricelle, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte du 21 mars 1989, la société civile immobilière l'Ebène (la SCI) a acquis des parcelles de terrain à bâtir dont elle a financé le prix au moyen notamment d'un prêt et d'une ouverture de crédit que lui consentait la société Sofal aux droits de laquelle se trouve l'Union industrielle de crédit ; que pour garantir le remboursement de ces crédits, la SCI s'est engagée envers la société Sofal à lui "céder, déléguer, transporter" le montant de tous les loyers et toutes les indemnités d'occupation qui pourraient être perçus sur les immeubles qu'elle envisageait de louer ;

que des baux ayant été conclus, la société Sofal a fait signifier la clause lui bénéficiant au preneur, la société Vinco MT par acte extra-judiciaire du 27 juin 1989 laquelle lui a réglé tous ses loyers jusqu'à la fin du bail en 1995 ; que la SCI a été mise en redressement puis en liquidation judiciaires les 28 juin et 22 octobre 1991, Mme Y... étant désignée comme administrateur puis comme mandataire liquidateur ; qu'après avoir demandé en vain à la société Vinco MT de lui régler désormais le montant de ses loyers et à la société Sofal de lui restituer ceux qu'elle avait perçus depuis l'ouverture de la procédure collective de la SCI, Mme Y... les a fait assigner en paiement ;

Sur le moyen, pris en sa première branche :

Attendu que Mme Y... agissant en qualité de mandataire liquidateur de la SCI l'Ebène fait grief à l'arrêt du rejet des demandes qu'elle avait formées contre les sociétés Vinco MT et Sofal, alors, selon le moyen, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que le juge ne peut, au motif que la convention conclue serait nulle et que les parties n'ont pu vouloir conclure une convention nulle, substituer à la qualification retenue par les parties, une nouvelle qualification que l'économie de la convention ne justifie pas ;

que la Sofal et la SCI l'Ebène avaient convenu d'assortir le prêt fait par la première à la seconde, à titre de garantie, d'une délégation de loyers ;

que cette délégation se référait expressément aux loyers en cours, la SCI s'interdisant de modifier la situation locative des biens en cause sans l'autorisation écrite et préalable de la Sofal ; qu'il est établi que la SCI a loué postérieurement une partie des biens à la société Vinco MT sans qu'il ait été établi ni même prétendu qu'elle avait eu l'autorisation préalable et écrite de la Sofal ; que la Sofal a notifié à la société Vinco MT par acte extra judiciaire du 27 juin 1989 la clause de délégation de loyers ; que Mme Y..., contestant la validité de la délégation de loyers, avait fait valoir que celle-ci était nulle au regard de l'article 1275 du Code civil, faute d'intervention à l'acte et d'acceptation du débiteur délégué ; qu'en décidant que, si l'on se référait à la commune intention des parties, la SCI l'Ebène avait convenu par avance avec la Sofal, afin de lui garantir le remboursement des sommes qu'elle lui empruntait, de lui céder le montant des loyers que lui verseraient ses futurs locataires, et que cet acte constituait une cession de créances futures à exécution successive, la clause ne pouvant constituer une délégation, faute d'intervention de la société Vinco MT à l'acte, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt relève qu'aux termes de l'acte du 21 mars 1989, la SCI s'était engagée envers la société Sofal à lui "céder, déléguer, transporter" les loyers et indemnités d'occupation à percevoir sur les immeubles qu'elle envisageait de louer, cette dernière étant "subrogée dans tous les droits de l'emprunteur contre tous les locataires pour le paiement des loyers.." ; qu'en l'état de ces stipulations contradictoires et ambiguës, qui rendaient nécessaire une interprétation de l'acte pour permettre sa qualification, la cour d'appel, qui n'a pas violé le texte susvisé, a pu en déduire, après recherche de la commune intention des parties, que la convention litigieuse s'analysait non pas en une délégation de créance mais en une cession de créance ; que le grief n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :

Vu les articles 1689, 1690 du Code civil ainsi que les articles 33 et 107-3 de la loi du 25 janvier 1985 devenus les articles L. 621-24 et L. 621-107.3 du Code de commerce ;

Attendu que pour rejeter les demandes de Mme Y..., l'arrêt retient qu'à compter de la signification du 27 juin 1989, la créance "cédée, déléguée, transportée" est définitivement sortie du patrimoine de la SCI l'Ebène pour entrer dans celui de la société Sofal, devenue ainsi, dans la limite de ses droits, créancière de la société Vinco MT pour le montant des loyers dus par cette dernière ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le jugement d'ouverture de la procédure collective à l'égard du cédant fait obstacle aux droits du cessionnaire sur les créances nées de la poursuite d'un contrat à exécution successive postérieurement à ce jugement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 novembre 1998, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne les sociétés Union industrielle, Vinco MT, MM. Z... et X... ès qualités aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de la société Vinco MT et MM. Z... et X... ès qualités, d'une part, de l'Union industrielle, d'autre part ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mai deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 99-11052
Date de la décision : 22/05/2002
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CESSION DE CREANCE - Définition - Différence avec la délégation de créance - Constatations suffisantes.

CESSION DE CREANCE - Définition - Effets - Procédure collective ouverte à l'égard du cédant - Obstacle aux droits du cessionnaire sur les créances nées de la poursuite du contrat.


Références :

Code civil 1134, 1689 et 1690
Code de commerce L621-24 et L621-107.3°
Loi 85-98 du 25 janvier 1985 art. 33 et 107-3

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence (8e chambre civile), 27 novembre 1998


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 22 mai. 2002, pourvoi n°99-11052


Composition du Tribunal
Président : Président : M. DUMAS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:99.11052
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