Sur les deux moyens, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 29 mars 2000), que la société d'exploitation cinématographique Rex, dont M. et Mme Y... sont les associés gérants, a donné à bail à la société X... Rex un immeuble lui appartenant ; qu'à la demande de la locataire, une réduction de 50 % du montant du loyer lui a été consentie par la bailleresse, le 21 mars 1988, à compter du 1er octobre 1987 aussi longtemps que le bilan d'exploitation serait négatif, sous réserve d'un rectificatif rétroactif du montant du loyer si ce bilan redevenait positif ; que Mme Y..., agissant en qualité de président et directeur général de la société X... Rex, a signé le 2 avril 1992 une reconnaissance de dette d'un montant de 383 319,35 francs " en capital " représentant l'addition des diminutions successives du loyer consenties entre le 1er octobre 1987 et le 30 septembre 1990, ces sommes portant intérêt au taux de 9 % l'an ; que la locataire ayant refusé de régler ladite somme, la bailleresse l'a assignée en paiement par acte du 11 décembre 1997 ;
Attendu que la société d'exploitation cinématographique Rex et les époux Y..., appelés en garantie, font grief à l'arrêt d'avoir dit l'action prescrite, alors, selon les moyens :
1° que la SARL société d'exploitation cinématographique Rex n'a jamais opposé dans ses conclusions d'appel l'existence d'une quelconque novation ; qu'en retenant qu'elle fait valoir qu'il y a eu novation de la dette de loyers en dette de capital, la cour d'appel a dénaturé ses conclusions d'appel, en violation des articles 1134 du Code civil et 4 du nouveau Code de procédure civile ;
2° que la prescription quinquennale ne s'applique pas lorsque la dette originairement périodique a été transformée en une dette de capital ; qu'en statuant au motif inopérant tiré de l'absence de novation, sans rechercher, comme elle y était invitée par la SARL société d'exploitation cinématographique Rex dans ses conclusions d'appel, si la dette initiale de loyers n'avait pas été transformée en une dette de capital, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2277 du Code civil ;
3° que les mentions de la reconnaissance de dette du 2 avril 1992 précisant que la somme due est constituée par la somme des réductions de 50 % des loyers et que chacune des sommes qui la constitue porte intérêt composé au même taux, loin d'exclure toute idée de transformation de la dette de loyers en dette de capital, impliquent au contraire une telle transformation ; que l'acte de reconnaissance de dette précise d'ailleurs à deux reprises que la dette est due " en capital " ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce document, en violation de l'article 1134 du Code civil ;
4° que la reconnaissance de dette est un acte unilatéral ; qu'en requérant le consentement des deux parties, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1326 du Code civil ;
5° qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée par la SARL société d'exploitation cinématographique Rex, si le consentement de la bailleresse à la reconnaissance de dette, à le supposer nécessaire, ne résulte pas de son action en exécution de cette reconnaissance de dette, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1326 du Code civil ;
6° que l'article 2277 du Code civil ne s'applique qu'à tout ce qui est dû à des termes périodiques ; qu'aux termes de l'accord du 21 mars 1988, la réduction du loyer avait été consentie par la bailleresse " aussi longtemps que le bilan d'exploitation ne sera pas positif, étant bien entendu que, dans ce dernier cas, il y aurait rectificatif rétroactif du montant des loyers " ; qu'il s'ensuit que les parties avaient prévu un paiement " en bloc " du solde des loyers au moment de la réalisation de la condition et que cette dette n'était pas payable à des termes périodiques ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 2277 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, sans dénaturation des conclusions des parties, a exactement décidé que, dès lors que la créance résultant de l'acte du 2 avril 1992 était, quoique exprimée en capital, une dette de loyers, la prescription applicable était celle de l'article 2277 du Code civil ; que, par ce seul motif, l'arrêt est légalement justifié ;
Par ces motifs :
REJETTE le pourvoi.
MOYENS ANNEXÉS
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société d'exploitation cinématographique Rex et les époux Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit prescrite sur le fondement de l'article 2277 du Code civil l'action en paiement de la SARL société d'exploitation cinématographique Rex (bailleresse) contre la SA X... Rex (locataire) ;
AUX MOTIFS QU'il ne ressort ni de l'acte de reconnaissance de dette ni des autres faits de la cause la preuve de la volonté des parties d'opérer une novation de la dette initiale de loyers ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la SARL société d'exploitation cinématographique Rex n'a jamais opposé dans ses conclusions d'appel l'existence d'une quelconque novation ; qu'en retenant qu'elle fait valoir qu'il y a eu novation de la dette de loyers en dette de capital, la cour d'appel a dénaturé ses conclusions d'appel, en violation des articles 1134 du Code civil et 4 du nouveau Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la prescription quinquennale ne s'applique pas lorsque la dette originairement périodique a été transformée en une dette de capital ; qu'en statuant au motif inopérant tiré de l'absence de novation sans rechercher, comme elle y était invitée par la SARL société d'exploitation cinématographique Rex dans ses conclusions d'appel, si la dette initiale de loyers n'avait pas été transformée en une dette de capital, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2277 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire) :IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit prescrite sur le fondement de l'article 2277 du Code civil l'action en paiement de la SARL société d'exploitation cinématographique Rex (bailleresse) contre la SA cinémas Rex (locataire) ;
AUX MOTIFS, à les supposer adoptés du jugement confirmé, QUE l'analyse de la reconnaissance de dette ne permet pas d'affirmer qu'il y a eu transformation de la dette de loyers en dette de capital, qu'une telle transformation aurait exigé le consentement des deux parties alors que l'acte ne comporte aucun signe de l'intervention et de l'accord des bailleurs ; que, par ailleurs, l'acte de reconnaissance de dette du 2 avril 1992 précise que la somme due est constituée par la somme des réductions de 50 % des loyers et que chacune des sommes qui la constitue porte intérêt composé au même taux, termes qui excluent toute idée de transformation de la dette de loyers en dette de capital ;
ALORS, D'UNE PART, QUE les mentions de la reconnaissance de dette du 2 avril 1992 précisant que la somme due est constituée par la somme des réductions de 50 % des loyers et que chacune des sommes qui la constitue porte intérêt composé au même taux, loin d'exclure toute idée de transformation de la dette de loyers en dette de capital, impliquent au contraire une telle transformation ; que l'acte de reconnaissance de dette précise d'ailleurs à deux reprises que la dette est due " en capital " ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce document, en violation de l'article 1134 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la reconnaissance de dette est un acte unilatéral ; qu'en requérant le consentement des deux parties, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1326 du Code civil ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QU'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée par la SARL société d'exploitation cinématographique Rex, si le consentement de la bailleresse à la reconnaissance de dette, à le supposer nécessaire, ne résulte pas de son action en exécution de cette reconnaissance de dette, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1326 du Code civil ;
ALORS, ENFIN ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE l'article 2277 du Code civil ne s'applique qu'à tout ce qui est dû à des termes périodiques ; qu'aux termes de l'accord du 21 mars 1988, la réduction du loyer avait été consentie par la bailleresse " aussi longtemps que le bilan d'exploitation ne sera pas positif, étant bien entendu que dans ce dernier cas, il y aurait rectificatif rétroactif du montant des loyers " ; qu'il s'ensuit que les parties avaient prévu un paiement " en bloc " du solde des loyers au moment de la réalisation de la condition et que cette dette n'était pas payable à des termes périodiques ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 2277 du Code civil.