AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Marie-Josée X..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 6 avril 1999 par la cour d'appel d'Agen (chambre sociale), au profit de la société Gavarret automobile, société anonyme, dont le siège est ...,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 20 février 2002, où étaient présents : M. Chagny, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Frouin, conseiller référendaire rapporteur, M. Chauviré, conseiller, Mme Tarssoudaine-Verger, conseiller référendaire, M. Kehrig, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Frouin, conseiller référendaire, les observations de Me Blondel, avocat de Mme X..., de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Gavarret automobile, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que Mme X..., embauchée par la société Gavarret le 1er mai 1984, a été licenciée pour motif économique le 11 juin 1996 ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de ses demandes tendant à voir condamner son employeur à lui payer des indemnités dans la mesure où le licenciement économique prononcé ne reposait sur aucune cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen, que le juge doit statuer selon la ou les règles de droit applicables à la cause, il tire donc de son office l'obligation de vérifier ce qu'il en est de la réalité et du sérieux du motif économique de licenciement en l'état de la lettre de rupture qui détermine les termes du litige, qu'en ne se prononçant pas à cet égard cependant que la lettre se bornait à faire état de la suppression d'un poste compte tenu de la forte baisse d'activité générale depuis le dernier exercice et notamment de déficit occasionné par le secteur atelier sans préciser en quoi le déficit devait entraîner la suppression du poste de la salariée licenciée, la cour d'appel méconnaît son office au regard des articles 12 du nouveau Code de procédure civile, L. 122-14-2, L. 122-14-3 et L. 321-1 du Code du travail ;
Mais attendu que satisfait aux exigences de l'article L. 122-14-2 du Code du travail, la lettre de licenciement qui énonce que le licenciement économique du salarié est prononcé en raison de la suppression de son poste consécutive à une forte baisse d'activité générale de la société et notamment au déficit de son secteur atelier ; qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article L. 122-14-2 du Code du travail ;
Attendu que, pour débouter la salariée de sa demande d'indemnité, la cour d'appel énonce que, par courrier du 18 août 1996, Mme X... a demandé à son employeur de préciser les critères retenus pour déterminer le choix de son licenciement et s'est donc placée dans le cadre des dispositions visées aux articles L. 122-14-2 et L. 321-1-1 du Code du travail, que la réponse de la société Gavarret fait référence non aux critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements mais au motif de ce licenciement, soit une réponse qui ne correspond pas aux prescriptions légales, que cependant le 30 août 1996, Mme X... conteste le montant des sommes perçues mais ne formule pas à nouveau sa demande de précision des critères retenus pour l'ordre des licenciements et accepte tacitement la réponse de l'employeur ;
Attendu, cependant, que la cour d'appel a constaté que l'employeur n'avait pas répondu à la demande de la salariée de lui indiquer les critères retenus pour l'ordre des licenciements, et que la seule circonstance qu'elle n'ait pas réitéré sa demande ne pouvait valoir de sa part renonciation claire et non équivoque à ladite demande ;
D'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que si le manquement de l'employeur à son obligation d'indiquer au salarié qui le demande les critères retenus en application de l'article L. 321-1-1 du Code du travail, ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse, il constitue une irrégularité qui cause nécessairement au salarié un préjudice que le juge doit réparer selon son étendue, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement sur la demande d'indemnité de la salariée en tant qu'elle a pour fondement le manquement de l'employeur à son obligation d'indiquer les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements, l'arrêt rendu le 6 avril 1999, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne la société Gavarret automobile aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de proécédure civile, condamne la société Gavarret automobile à payer à Mme X... la somme de 1 600 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois avril deux mille deux.