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20/03/2002 | FRANCE | N°00-42077

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 mars 2002, 00-42077


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les pourvois n° M 00-42.077, P 00-42.079, Q 00-42.080, R 00-42.081, S 00-42.082 formés par la société Sylvain Joyeux, société anonyme, dont le siège est ...,

en cassation des arrêts rendus le 15 février 2000 par la cour d'appel de Paris (18ème chambre, section A) , au profit :

1 / de M. Rachid X..., demeurant ...,

2 / de M. Christian Z..., demeurant ...,

3 / de M. Benaïssa B..., demeurant ...,

4 / de M. Slim A..., demeurant Foyer Sonacotra

...,

5 / de M. Abdelmalek Y..., demeurant ...,

6 / de l'ASSEDIC de la Seine-Saint-Denis, dont le si...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les pourvois n° M 00-42.077, P 00-42.079, Q 00-42.080, R 00-42.081, S 00-42.082 formés par la société Sylvain Joyeux, société anonyme, dont le siège est ...,

en cassation des arrêts rendus le 15 février 2000 par la cour d'appel de Paris (18ème chambre, section A) , au profit :

1 / de M. Rachid X..., demeurant ...,

2 / de M. Christian Z..., demeurant ...,

3 / de M. Benaïssa B..., demeurant ...,

4 / de M. Slim A..., demeurant Foyer Sonacotra ...,

5 / de M. Abdelmalek Y..., demeurant ...,

6 / de l'ASSEDIC de la Seine-Saint-Denis, dont le siège est ...,

7 de l'ASSEDIC de la Seine-et-Marne, dont le siège est ...,

defendeurs à la cassation ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 1, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 5 février 2002, où étaient présents : M. Sargos, président, M. Bailly, conseiller rapporteur, MM. Boubli, Ransac, Chagny, Bouret, Lanquetin, Coeuret, Chauviré, Gillet, conseillers, M. Frouin, Mmes Trassoudaine-Verger, Lebée, Andrich, MM. Funck-Brentano, Leblanc, conseillers référendaires, M. Duplat, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Bailly, conseiller, les observations de Me Le Prado, avocat de la société Sylvain Joyeux, les conclusions de M. Duplat, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu leur connexité, joint les pourvois n° M 00-42.077, P 00-42.079, Q 00-42.080, R 00-42.081 et S 00-42.082 ;

Attendu que la société Sylvain Joyeux a mis en place en 1996 une procédure de licenciement collectif pour motif économique, en élaborant un plan social, soumis au comité d'entreprise ; qu'à la demande de ce comité, le tribunal de grande instance de Bobigny, par jugement du 28 novembre 1996, a déclaré nulle et de nul effet la procédure de licenciement ; qu'au cours de l'instance d'appel qui a suivi ce jugement, un accord a été conclu entre le syndicat CGT et l'employeur, le 18 décembre 1996, dans lequel le comité d'entreprise s'engageait notamment à mettre fin à l'action en nullité qu'il avait introduite ; que cet accord ayant été ratifié le lendemain par le comité d'entreprise, la cour d'appel a constaté l'extinction de l'action en nullité, en conséquence de cette transaction, et la renonciation du comité d'entreprise à sa prévaloir du jugement ; que des salariés licenciés le 10 septembre 1996 pour motif économique ont saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de dommages-intérêts, pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et formé en cause d'appel une demande nouvelle en nullité de leurs licenciement et en paiement de salaires ;

Sur le moyen unique des pourvois de l'employeur :

Attendu que la société Sylvain Joyeux fait grief aux arrêts attaqués (Paris, 15 février 2000) de l'avoir condamnée au paiement d'indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen,

1 / que lorsque le plan social a un caractère définitif, les licenciements économiques ont une cause réelle et sérieuse ; et que si avant tout licenciement pour motif économique, l'employeur doit rechercher ou proposer au salarié les postes disponibles, lorsqu'un plan social a été établi, il incombe seulement au juge de vérifier si l'employeur a mis en oeuvre, à l'égard du salarié concerné, les possibilités de reclassement, comprenant des mesures précises et concrètes pour éviter des licenciements et en limiter le nombre, prévues par le plan ;

2 / qu'ayant constaté que les salariés ne justifiaient pas d'un droit propre à agir en nullité du plan social, la cour d'appel ne pouvait sans se contredire, retenir que le plan social ayant précédé le licenciement économique des salariés avait été annulé par jugement définitif du tribunal de grande instance de Bobigny du 28 novembre 1996 pour défaut de mesures suffisantes de reclassement ; qu'elle a ainsi violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

3 / qu'en se fondant sur l'annulation du plan social par le jugement définitif du 28 novembre 1996 pour défaut de mesures de reclassement suffisantes, sans tenir compte de ce que, ainsi que le faisait valoir l'employeur, le comité d'entreprise avait, postérieurement à cette décision, le 19 décembre 1996, approuvé l'accord relatif au plan social, conclu le 18 décembre 1996 entre le syndicat CGT et l'entreprise, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, et violé l'accord d'entreprise du 19 décembre 1996 ;

4 / qu'ayant constaté à juste titre que les salariés n'étaient pas recevables à remettre en question le plan social et ainsi admis que le plan social était opposable aux salariés et donc définitif à leur égard, la cour d'appel, dès lors que le plan social prévoyait des modalités de reclassement des salariés, ne pouvait, pour décider que les licenciements n'avaient pas de cause réelle et sérieuse, se contenter de constater que la société n'avait pas recherché à reclasser les salariés au sein du groupe, notamment en région parisienne ; qu'elle aurait dû rechercher si la société avait mis en oeuvre les possibilités de reclassement prévues par le plan à l'égard des salariés ; qu'en statuant comme elle l'a fait, elle a entaché ses arrêts d'un manque de base légale au regard de l'article L. 321-4-1 du Code du travail ;

Mais attendu, d'abord, que l'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur, avant tout licenciement économique n'est pas limitée à la mise en oeuvre du plan social ; qu'il lui incombe de rechercher s'il existe des possibilités de reclassement dans l'entreprise ou dans les sociétés du groupe dont elle relève, qu'elles soient ou non prévues dans le plan social, et de les mettre en oeuvre au bénéfice des salariés dont les postes sont supprimés ;

Attendu, ensuite, que la cour d'appel a constaté, que la société Sylvain Joyeux ne justifiait pas avoir cherché de façon sérieuse à reclasser au sein du groupe et notamment en région parisienne, les salariés dont le licenciement était envisagé ; qu'ainsi, abstraction faite du motif tiré de l'annulation du plan social par la juridiction civile, qui est surabondant, elle a légalement justifié sa décision ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique des pourvois incidents des salariés :

Attendu que les salariés licenciés font grief à l'arrêt attaqué de les avoir déboutés de leurs demandes fondées sur la nullité du licenciement alors, selon le moyen,

1 / que s'il est vrai que l'autorité de la chose jugée a une valeur relative en ce qu'elle ne peut nuire ni aux tiers, ni produire des droits à leur profit, il est incontestable que tout jugement produit des effets substantiels qui entraînent une modification de l'ordonnancement juridique ; que cette modification s'impose à tous ; que la cour d'appel a ainsi violé la loi ;

2 / que la cour d'appel ayant relevé que le plan social qui a précédé les licenciements économiques a fait l'objet d'une annulation par décision définitive du tribunal de grande instance de Bobigny du 28 novembre 1996 à la suite de l'action en nullité exercée par le comité d'entreprise, n'a pas tiré toutes les conséquences juridiques que pose l'article L. 321-4-1, alinéa 2, du Code du travail, en ce qu'il dispose que la nullité qui affecte le plan social affecte tous les actes subséquents et en particulier les licenciements prononcés par l'employeur, qui constituent la suite et la conséquence de la procédure de licenciement collectif suivie ;

3 / que la cour d'appel ayant relevé que la société Sylvain Joyeux ne démontre pas qu'elle a recherché de façon sérieuse à reclasser les salariés au sein du groupe et notamment en région parisienne, ne pouvait débouter les salariés de leurs demandes consécutives à la nullité du licenciement pour insuffisance du plan social, alors que chacun des salariés a un droit propre à agir en nullité du plan social qui était sous-entendu dans les demandes et qu'en tout état de cause la cour d'appel aurait dû retenir d'office ;

Mais attendu que dès lors que le comité d'entreprise avait renoncé à poursuivre l'action en nullité du plan social, mettant ainsi fin à cette procédure, les salariés ne pouvaient invoquer à leur profit le bénéfice d'un jugement d'annulation, rendu dans une instance qui s'était éteinte accessoirement à l'action, par l'effet d'une transaction ;

Et attendu que la cour d'appel a constaté que les salariés, qui n'invoquaient que les effets du jugement rendu le 28 novembre 1996, ne faisaient pas valoir devant elle un droit propre à l'annulation de leurs licenciements au regard de l'article L. 321-4-1 du Code du travail ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Sylvain Joyeux aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00-42077
Date de la décision : 20/03/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Reclassement - Limitation à la mise en oeuvre d'un plan social (non) - Recherches nécessaires.


Références :

Code du travail L321-4-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (18ème chambre, section A), 15 février 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 mar. 2002, pourvoi n°00-42077


Composition du Tribunal
Président : Président : M. SARGOS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:00.42077
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