AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Diffusion interrégionale du livre (DIL), société anonyme, dont le siège est ... Ivry-Sur-Seine,
en cassation d'un arrêt rendu le 6 octobre 1999 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre sociale), au profit de M. René X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
EN PRESENCE DE : l'ASSEDIC du Midi-Pyrénées, dont le siège est ...,
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 9 janvier 2002, où étaient présents : M. Chagny, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Lanquetin, conseiller rapporteur, Mme Lebée, conseiller référendaire, Mme Marcadeux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Lanquetin, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, avocat de la société Diffusion interrégionale du Livre, les conclusions de M. Bruntz, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que M. X..., engagé en 1972 en qualité de chef comptable, par la Société toulousaine du livre (STL), absorbée en 1995 par la société Diffusion interrégionale du livre, a été licencié par lettre du 23 janvier 1997 pour motif économique ;
Attendu que l'employeur reproche à l'arrêt attaqué (Toulouse, 6 octobre 1999) de l'avoir condamné à verser à M. X..., une somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ainsi qu'à rembourser à l'Assedic des indemnités de chômage dans la limite de 6 mois, alors, selon le moyen :
1 / qu'est justifié par un motif économique réel et sérieux le licenciement consécutif au refus du salarié d'accepter une modification de son contrat de travail consécutive à une réorganisation destinée à assurer la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que le licenciement de M. X... est intervenu à la suite de son refus d'accepter le transfert de son lieu de travail de Toulouse à Ivry - dans le cadre d'une centralisation de la comptabilité de la société DIL destinée à résoudre le problème des impayés que cette société ne pouvait plus supporter eu égard à ses résultats déficitaires (32,5 MF en 1995 et de 18,2 MF en 1996) ;
2 / qu'en relevant d'office le moyen selon lequel, la justification économique du licenciement décidé par la société DIL devait être établie dans le cadre du groupe Havas "lui-même secteur d'activité consacré à l'édition du groupe Vivendi", sans appeler à aucun moment les parties à s'expliquer sur le rôle de la société Vivendi (ex. CGE), ni sur ses liens éventuels avec le groupe Havas à l'époque des faits, l'arrêt a méconnu les droits de la défense et a violé les articles 7 et 16 du nouveau Code de procédure civile ;
3 / que le juge doit se placer à la date de la rupture pour apprécier si celle-ci est fondée sur une cause économique réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, le projet de fusion avec Vivendi (ex CGE) n'étant intervenu que deux ans plus tard, la société Havas n'appartenait pas à ce groupe au moment des faits ; qu'en estimant néanmoins que le niveau d'appréciation de la légitimité du licenciement économique de M. X... devait se situer au niveau du groupe Havas en son entier, dès lors que ce groupe constituait le secteur d'activité consacré à l'édition du groupe Vivendi, l'arrêt a violé les articles L 122-14-3 et L 321-1 du Code du travail ;
4 / qu'en considérant que c'est dans le cadre du groupe Havas "lui-même, secteur d'activité consacré à l'Edition du groupe Vivendi" que devait être recherchée la justification économique du licenciement, sans indiquer de quel élément de la cause il déduisait cette prétendue diffusion par Havas des publications du groupe Vivendi à l'époque des faits, l'arrêt n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles L 122-14-3 et L 321-1 du Code du travail ;
5 / qu'en toute hypothèse, à supposer que la réorganisation ait dû avoir pour objet d'assurer la sauvegarde de la compétitivité du secteur d'activité de l'édition dont relevait la société DIL, il résultait des procès-verbaux du comité d'entreprise versés aux débats que le regroupement de la comptabilité-clients concernait les sociétés DIL, Interforum et Livredis et que le problème de recouvrement des impayés que la centralisation du service à Ivry était destinée à résoudre, constituait un problème national ; qu'en retenant que la société ne fournissait aucune justification de ce que la mesure de réorganisation projetée était destinée à assurer la sauvegarde de compétitivité du secteur d'activité de l'édition dans son ensemble, l'arrêt n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles L 122-14-3 et L 321-1 du Code du travail ;
Mais attendu que, contrairement aux affirmations du moyen, la cour d'appel n'a pas retenu que le motif économique du licenciement devait être apprécié au sein du groupe Vivendi ; que la cour d'appel ayant constaté qu'aucun élément n'établissait que la compétitivité du groupe Havas auquel appartenait l'employeur était en danger de façon globale ou du fait de la société Dil, a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Diffusion initerrégionale du livre aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt février deux mille deux.