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05/02/2002 | FRANCE | N°98-15366

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 février 2002, 98-15366


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

I - Sur le pourvoi n° B 98-15.366 formé par M. Max-Henri Z..., mandataire judiciaire, domicilié ..., pris en sa qualité de :

- liquidateur à la liquidation judiciaire de la société X..., société anonyme, de la SEE X... et de la société X..., société à responsabilité limitée,

- représentant des créanciers au redressement judiciaire de M. André X..., de M. Jean X... et de M. Jean Y...,

en cassation d'un arrêt rendu le 26

mars 1998 par la cour d'appel de Nîmes (2e chambre B), au profit :

1 / de M. Jean X..., demeurant...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

I - Sur le pourvoi n° B 98-15.366 formé par M. Max-Henri Z..., mandataire judiciaire, domicilié ..., pris en sa qualité de :

- liquidateur à la liquidation judiciaire de la société X..., société anonyme, de la SEE X... et de la société X..., société à responsabilité limitée,

- représentant des créanciers au redressement judiciaire de M. André X..., de M. Jean X... et de M. Jean Y...,

en cassation d'un arrêt rendu le 26 mars 1998 par la cour d'appel de Nîmes (2e chambre B), au profit :

1 / de M. Jean X..., demeurant ...,

2 / de M. André X..., demeurant ...,

3 / de la société Aux Produits du Mont Ventoux X... et fils, société à responsabilité limitée, dont le siège est ...,

4 / du Procureur général près de la cour d'appel de Nîmes, domicilié en cette qualité, Palais de justice, ...,

5 / de M. Jean Y..., domicilié ...,

defendeurs à la cassation ;

II - Sur le pourvoi n° N 98-15.813 formé par M. Jean Y..., demeurant ...,

en cassation du même arrêt rendu au profit :

1 / de M. Max-Henri Z..., mandataire judiciaire, pris en sa qualité de :

- liquidateur à la liquidation judiciaire de la société X..., société anonyme, de la SEE X... et de la société X..., société à responsabilité limitée,

- représentant des créanciers au redressement judiciaire de M. André X..., de M. Jean X... et de M. Jean Y...,

2 / de M. Jean X...,

3 / de M. André X...,

4 / de la société Aux Produits du Mont Ventoux X... et fils, société à responsabilité limitée,

5 / du Procureur général près de la cour d'appel de Nîmes,

defendeurs à la cassation ;

III - Sur le pourvoi n° A 98-15.825 formé par M. Jean X...,

en cassation du même rendu au profit de M. Max-Henri Z..., mandataire judiciaire, pris en sa qualité de :

- liquidateur à la liquidation judiciaire de la société X..., société anonyme, de la SEE X... et de la société X..., société à responsabilité limitée,

- représentant des créanciers au redressement judiciaire de M. André X..., de M. Jean X... et de M. Jean Y...,

defendeur à la cassation ;

Le demandeur au pourvoi n° B 98-15.366 invoque à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Le demandeur au pourvoi n° N 98-15.813 invoque à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Le demandeur au pourvoi n° A 98-15.825 invoque à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 12 décembre 2001, où étaient présents : M. Dumas, président, M. Delmotte, conseiller référendaire rapporteur, M. Tricot, conseiller, Mme Moratille, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Delmotte, conseiller référendaire, les observations de la SCP Nicolay et de Lanouvelle, avocat de M. Z..., ès qualités, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. Jean X..., de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. Y..., de la SCP Rouvière et Boutet, avocat de M. André X... et de la société Aux Produits du Mont Ventoux X... et Fils, les conclusions de M. Viricelle, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Donne acte à M. Frédéric A..., domicilié ..., de sa reprise d'instance, d'une part, en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société anonyme
X...
, de la SEE X... et de la société à responsabilité limitée
X...
et, d'autre part, en sa qualité de représentant des créanciers au redressement judiciaire de M. André X..., de M. Jean X... et de M. Jean Y... ;

Vu leur connexité, joint les pourvois n° B 98-15.366, n° N 98-15.813 et A 98-15.825 ;

Attendu, selon l'arrêt partiellement confirmatif attaqué, que la société Aux Produits du Mont Ventoux X... et fils (la SARL), dont M. André X... était le gérant, a donné en location-gérance à la société anonyme
X...
(la SA), dont M. Jean X... était président du directoire et M. Y..., membre du directoire, le fonds de commerce dont elle était propriétaire ; que la SARL a ultérieurement vendu ce fonds à la SA et lui a consenti un bail commercial relatif aux locaux dans lesquels le fonds était exploité ; que, par acte du 26 janvier 1993, la SA a donné le fonds en location-gérance à la société d'exploitation des établissements
X...
(la SEE), dont M. Y... était le dirigeant ; qu'après la mise en redressement puis liquidation judiciaires de la SA et de la SEE, M. Z..., liquidateur des deux sociétés, a demandé au tribunal d'étendre la procédure collective à la SARL, d'ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l'égard de MM. Jean et André X... et de M. Y..., de prononcer la faillite personnelle de ces mêmes dirigeants et de les condamner au paiement des dettes sociales ; que le tribunal a accueilli pour partie ces demandes ;

Sur le second moyen, pris en sa première branche, du pourvoi formé par M. Y..., en ce qu'il reproche à l'arrêt d'avoir ouvert une procédure unique de redressement judiciaire à l'encontre de M. Y... et de M. X..., qui est préalable :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt d'avoir ouvert une procédure unique de redressement judiciaire à son encontre et à l'encontre de M. Jean X..., alors, selon le moyen, qu'en l'absence de confusion des patrimoines des trois sociétés X..., et de leurs dirigeants, le redressement judiciaire de M. Y..., prononcé en application de l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 ne pouvait qu'être distinct de celui de M. X... ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu que la cour d'appel n'a pas ouvert une procédure unique de redressement judiciaire à l'égard de M. X... et de M. Y... ; que le moyen manque en fait ;

Sur le pourvoi formé par M. Z..., en qualité de liquidateur de la SA, de la SEE et de la SARL et en qualité de représentant des créanciers au redressement judiciaire de MM. André et Jean X... et de M. Y... :

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. A..., désigné en qualité d'administrateur provisoire de l'étude de M. Z..., qui a repris l'instance engagée par ce dernier, fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la demande d'extension de la liquidation judiciaire de la SA et de la SEE à la SARL, alors, selon le moyen :

1 / que les juges du fond sont tenus par l'objet et les termes du litige tels que définis par les parties ; que l'arrêt croit pouvoir affirmer que le liquidateur n'invoquait pas une confusion de patrimoine entre la SARL et la SEE ; qu'en statuant ainsi, bien qu'il ressorte expressément des écritures de celui-ci, qu'il demandait aux juges du second degré comme aux premiers juges, d'étendre à la SARL les procédures ouvertes à l'encontre de la SA et de la SEE, la cour d'appel a dénaturé les conclusions du liquidateur et violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ;

2 / que la cour d'appel qui constate que la seule activité de la SARL ayant été transférée à la SA, et que le loyer n'a jamais été payé mais était inscrit en compte courant, lequel n'a jamais été soldé ni même déclaré au passif de la SA, refuse de reconnaître une confusion de patrimoines faute pour ces opérations de constituer, selon elle, des flux financiers anormaux ; qu'en statuant ainsi sans vérifier si l'absence de toute contrepartie par la SARL ne caractérisait pas à elle seule l'existence d'une confusion de patrimoines, consacrée par des relations financières exorbitantes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 7 de la loi du 25 janvier 1985 ;

3 / que la confusion de patrimoines suppose que l'une au moins des deux sociétés n'exécute pas son objet social et ne dispose pas d'un patrimoine propre ; que l'arrêt, en l'espèce, constate, d'une part, que la SARL par la mise en location-gérance de son fonds, puis par sa vente, exerçait l'activité de bailleur, et, d'autre part, qu'elle n'avait perçu ni les loyers ni le prix de vente du fonds ; qu'en refusant malgré tout de reconnaître l'existence d'une confusion de patrimoines, bien que la SA ne fasse que poursuivre l'activité de la SARL, sans rechercher si malgré tout la SARL exécutait son objet social et disposait d'un patrimoine propre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 7 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu, en premier lieu, que les conclusions dont la dénaturation est alléguée n'étant pas produites, le moyen, dépourvu de justification, n'est pas recevable ;

Attendu, en second lieu, qu'après avoir relevé, par motifs propres, que la SARL et la SA, dont les comptabilités étaient distinctes, avaient exploité successivement et non simultanément le même fonds de commerce et avaient eu, à compter de la signature de l'acte de location-gérance, des activités nettement séparées, l'une d'exploitation du fonds de commerce, l'autre de bailleur, l'arrêt constate que les loyers, dont le caractère excessif n'est pas démontré, n'ont pas été payés mais portés au compte courant de la SARL dans la SA, sans que la SARL ne "produise" au passif de la SA pour le montant de sa créance ; que l'arrêt relève ensuite que le prix de vente du fonds de commerce, cédé ultérieurement par la SARL à la SA, n'a pas été payé mais porté au compte courant de la SARL dans la SA, sans que le liquidateur ne démontre que la SA, alors en cessation des paiements, aurait remboursé ce compte courant ; qu'ayant ainsi écarté la confusion des patrimoines des deux sociétés, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer les recherches visées au moyen que ses constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Et sur le second moyen :

Attendu que le liquidateur fait encore grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes de condamnation du dirigeant de la SARL, M. André X..., au titre des articles 180, 182, 185 et 189 de la loi du 25 janvier 1985, alors, selon le moyen, que la cour d'appel qui relève que plusieurs faits pris séparément sont insusceptibles de conférer à M. André X... la qualité de gérant de fait, sans rechercher si réunis ces éléments ne caractérisaient pas une telle activité, a privé sa décision de base légale au regard des articles 180, 182, 185 et 189 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que la cour d'appel, procédant à une analyse de l'ensemble des faits qui lui étaient soumis, a retenu que le liquidateur ne rapportait pas la preuve que M. André X... aurait été le dirigeant de fait de la SA et de la SEE ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le pourvoi formé par M. Jean X... :

Sur le premier moyen, pris en ses quatre dernières branches :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir ouvert une procédure de redressement judiciaire à son encontre, alors, selon le moyen :

1 / qu'en cas de redressement judiciaire d'une personne morale, le tribunal ne peut ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l'égard de tout dirigeant de fait ou de droit que dans les hypothèses prévues par l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 ; qu'en retenant, pour prononcer son redressement judiciaire, le fait qu'il avait un intérêt personnel à la poursuite de l'exploitation déficitaire dans la mesure où elle permettait le remboursement des prêts dont il s'était porté caution sans constater qu'il avait poursuivi abusivement cette exploitation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 ;

2 / qu'en retenant, pour prononcer son redressement judiciaire, qu'il avait un intérêt personnel à la poursuite de l'exploitation déficitaire dans la mesure où elle permettait le remboursement des prêts dont il s'était porté caution sans constater l'existence de pertes devant conduire nécessairement à la cessation des paiements, ce qu'il contestait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 ;

3 / que l'absence de comptabilité à compter d'une certaine date, a fortiori, juste avant le prononcé du jugement déclaratif de la personne morale ne peut être assimilée à l'absence de toute comptabilité ou à une comptabilité fictive, seuls faits figurant parmi ceux sanctionnés par l'article 182-5 de la loi du 25 janvier 1985, dans sa rédaction antérieure aux modifications apportées par la loi du 10 juin 1994 ; qu'en retenant à son encontre l'absence de fourniture des documents comptables de la SA, pour l'année 1993, société déclarée en redressement judiciaire par un jugement du 18 février 1994, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

4 / qu'il faisait valoir que le bilan de la SA pour 1993 devait être établi avant mai 1994 ; que la SA a été déclarée en redressement judiciaire le 18 février 1994 ; que la SA a communiqué à l'administrateur conformément à l'article 46 du décret du 27 décembre 1985 l'ensemble de ses documents comptables ; qu'en lui faisant grief de n'avoir pas fourni les documents comptables de la SA pour l'année 1993 sans répondre à ses conclusions signifiées le 25 avril 1997, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir retenu, par motifs adoptés, qu'au moment de la transmission de l'exploitation à la SEE, le fonds de commerce était déjà déficitaire, les cotisations dues par la SA à l'URSSAF s'élevant au mois de mars 1993 à 1 236 312 francs, l'arrêt constate que le redressement judiciaire de la SA a été ouvert le 18 février 1994 sur assignation de cet organisme ; qu'ayant ensuite relevé, par motifs adoptés, que le montage financier avait permis de protéger les intérêts familiaux en assurant le paiement régulier des engagements financiers de la SA, pour lesquels M. Jean X... s'était porté caution, l'arrêt en déduit que celui-ci, qui a perçu de la SEE, en qualité de chef de fabrication, un salaire annuel de 177 348 francs, avait un intérêt personnel à la poursuite de l'exploitation déficitaire ; qu'ainsi, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la quatrième branche, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le second moyen, pris en ses cinq branches :

Attendu que M. X... fait encore grief à l'arrêt d'avoir prononcé sa faillite personnelle, dit qu'il lui est fait interdiction pendant une période de dix ans à compter de la signification du jugement, de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole ou toute personne morale et que la présente condamnation entraîne les interdictions et déchéances applicables aux personnes qui étaient déclarées en état de faillite au sens donné à ce terme antérieurement au 1er janvier 1968 ainsi que l'application des articles 193, 194 et 195 de la loi du 25 janvier 1985, alors, selon le moyen :

1 / que le Tribunal ne peut prononcer la faillite personnelle de tout dirigeant de fait ou de droit d'une personne morale que dans les hypothèses prévues par l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 ; qu'en se déterminant pour prononcer sa faillite personnelle par le fait qu'il avait un intérêt personnel à la poursuite de l'exploitation déficitaire dans la mesure où elle permettait le remboursement des prêts dont il s'était porté caution sans constater qu'il avait poursuivi abusivement cette exploitation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 182-4 de la loi du 25 janvier 1985 ;

2 / qu'en retenant pour prononcer sa faillite personnelle qu'il avait un intérêt personnel à la poursuite de l'exploitation déficitaire dans la mesure où elle permettait le remboursement des prêts dont il s'était porté caution sans constater l'existence de pertes devant conduire nécessairement à la cessation des paiements, ce qu'il contestait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 182-4 de la loi du 25 janvier 1985 ;

3 / que l'absence de comptabilité à compter d'une certaine date, a fortiori juste avant le prononcé du jugement déclaratif de la personne morale ne peut être assimilée à l'absence de toute comptabilité ou à une comptabilité fictive, seuls faits figurant parmi ceux sanctionnés par l'article 182- 5 de la loi du 25 janvier 1985, dans sa rédaction antérieure aux modifications apportées par la loi du 10 juin 1994 ; qu'en retenant à son encontre l'absence de fournitures des documents comptables pour l'année 1993 de la SA déclarée en redressement judiciaire par un jugement du 18 février 1994, la cour d'appel a violé le texte susmentionné ;

4 / qu'il faisait valoir que le bilan de la SA pour 1993 devait être établi avant mai 1994 ; que la SA a été déclarée en redressement judiciaire le 18 février 1994 ; que la SA a communiqué à l'administrateur conformément à l'article 46 du décret du 27 décembre 1985 l'ensemble de ses documents comptables ; qu'en lui faisant grief de n'avoir pas fourni les documents comptables de la SA pour l'année 1993 sans répondre à ses conclusions signifiées le 25 avril 1997, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

5 / que les dispositions de l'article 189-5 de la loi du 25 janvier 1985, applicables aux personnes mentionnées à l'article 185 de la même loi, ont pour objet de permettre de tirer les conséquences du comportement d'un dirigeant d'une entreprise qui, tandis que cette entreprise se trouvait, en fait, dans l'impossibilité de faire face à son actif disponible, n'a pas, dans les quinze jours, déclaré l'état de cessation des paiements ; que le juge qui fait application de ce texte doit fixer la date de cessation des paiements, n'étant pas lié par le jugement d'ouverture l'ayant fixé provisoirement ; qu'en considérant que le grief de défaut de déclaration de la cessation des paiements dans le délai de quinzaine devait être retenu à son encontre dès lors que la date de cessation des paiements avait été fixée par le jugement d'ouverture, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Mais attendu, qu'abstraction faite du motif surabondant évoqué à la cinquième branche, les critiques, formulées en termes identiques au premier moyen, dirigées contre les motifs ayant conduit la cour d'appel à prononcer la faillite personnelle de M. X... en raison de la poursuite d'une exploitation déficitaire ont déjà été écartées ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le premier moyen du pourvoi formé par M. Y..., pris en ses quatre branches :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt d'avoir ouvert une procédure de redressement judiciaire à son encontre, d'avoir prononcé sa faillite personnelle et d'avoir dit qu'il lui est fait interdiction pendant une période de cinq ans, à compter de la signification du jugement, de diriger, gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole, et toute personne morale, alors, selon le moyen :

1 / qu'en statuant par référence aux faits de l'espèce résultant des écritures adverses, et du jugement, et par un motif d'ordre général tiré de sa profession d'origine, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle, privant sa décision de base légale au regard des articles 182 et 185 et suivants de la loi du 25 janvier 1985 ;

2 / que ne caractérise pas les faits prévus par l'article 182-4 de la loi du 25 janvier 1985 supposant que la cessation des paiements soit l'aboutissement de la poursuite d'une activité déficitaire par son dirigeant, la cour d'appel qui constate que la SEE était déjà exsangue à la date de sa création et, partant, dès avant son exploitation par M. Y..., et ce parce qu'elle reprenait en location-gérance le fonds de la SA, elle-même en cessation des paiements à la date de conclusion du contrat de location-gérance qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article 182-4 susvisé ;

3 / qu'il appartient au juge saisi d'une demande tendant à voir prononcer la faillite personnelle d'un dirigeant social pour absence de déclaration de l'état de cessation des paiements de la personne morale dans un délai de quinze jours, de procéder par lui-même à l'appréciation de la date de la cessation des paiements sans pouvoir se borner à retenir sans l'examiner, celle retenue par le jugement d'ouverture de la procédure collective ; qu'ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 189-5 de la loi du 25 janvier 1985 ;

4 / qu'il ne peut être reproché à un dirigeant dont la société est déjà assignée en redressement judiciaire, dès avant la date de cessation des paiements, ou en tous les cas dès avant l'expiration du délai de quinze jours pour déclarer l'état de cessation des paiements, de ne pas saisir à nouveau le Tribunal de cette question par voie de déclaration ; que, dès lors, en statuant de la sorte, au regard de la seule date du jugement d'ouverture rendu moins de deux mois après la date de la cessation des paiements, sans vérifier si à la date de l'assignation de l'URSSAF, le délai de quinze jours, pour procéder à la déclaration de la cessation des paiements était déjà expiré, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 189-5 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu qu'après avoir relevé, par motifs adoptés, qu'au moment de sa transmission à la SEE, le 26 janvier 1993, le fonds de commerce était déjà déficitaire, l'arrêt retient que dès le début de son exploitation, la SEE était dans l'impossibilité de faire face à ses charges courantes, ne payait pas ses cotisations de sécurité sociale et se trouvait donc en état de cessation des paiements ; qu'ayant constaté que l'exploitation s'était poursuivie jusqu'à l'ouverture de la procédure collective, intervenue le 18 février 1994 sur assignation de l'URSSAF, l'arrêt en déduit que M. Y..., qui, de par ses fonctions, savait que la SEE était exsangue dès le commencement de l'exploitation, avait poursuivi celle-ci dans un intérêt personnel, constitué par l'avantage que représentait un salaire annuel de 223 942 francs ; qu'ainsi, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les troisième et quatrième branches, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi formé par M. Jean X..., pris en sa deuxième branche, :

Vu l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction applicable en la cause ;

Attendu qu'en décidant, par motifs adoptés, que le passif de M. X... comprendrait outre son passif personnel, celui de la SA et de la SEE, tout en constatant qu'il n'avait que la simple qualité de chef de fabrication au sein de la SEE et sans constater qu'il avait dirigé en fait cette société, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Sur le second moyen du pourvoi formé par M. Y..., pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction applicable en la cause ;

Attendu qu'après avoir ouvert le redressement judiciaire de M. Y..., en tant que dirigeant de droit de la SEE, la cour d'appel décide que le passif à prendre en compte comprend, outre son passif personnel, celui de la SA et de la SEE ;

Attendu qu'en statuant ainsi, sans avoir constaté que M. Y... avait commis, en sa qualité de dirigeant de la SA, l'un des faits énumérés par l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 et sans avoir prononcé, en conséquence, le redressement judiciaire de M. Y... en tant que dirigeant de cette personne morale, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen du même pourvoi, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction applicable en la cause ;

Attendu qu'en cas de redressement judiciaire prononcé à l'égard du dirigeant d'une personne morale, en application du texte susvisé, la date de cessation des paiements est celle fixée par le jugement d'ouverture du redressement judiciaire de la personne morale ;

Attendu qu'en décidant que la date de cessation des paiements de M. Y... est celle fixée par le jugement d'ouverture de la SA, soit le 28 janvier 1993, et non celle fixée par le jugement d'ouverture du redressement judiciaire de la SEE, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

REJETTE le pourvoi formé par M. Z..., ès qualités ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que le passif à prendre en compte, comprendrait outre le passif personnel de M. Jean X..., celui de la SEE X... et que le passif personnel de M. Jean Y... comprendrait celui de la SA X... et aussi en ce qu'il a dit que la date de cessation des paiements de M. Y... était celle fixée par le jugement d'ouverture de la SA X..., l'arrêt rendu le 26 mars 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne M. A..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de M. A..., ès qualités, de M. André X... et de la SARL X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq février deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 98-15366
Date de la décision : 05/02/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes (2e chambre B), 26 mars 1998


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 fév. 2002, pourvoi n°98-15366


Composition du Tribunal
Président : Président : M. DUMAS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:98.15366
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