AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Le Centre matériel général, société anonyme dont le siège social est Zone d'activité du Champ Mâle, 58640 Varennes-Vauzelles,
en cassation d'un arrêt rendu le 20 novembre 1996 par la cour d'appel de Bourges (1re Chambre civile), au profit de la Société lyonnaise de crédit-bail (Slibail), société anonyme dont le siège social est ...,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 4 décembre 2001, où étaient présents : M. Dumas, président, Mme Garnier, conseiller rapporteur, M. Métivet, conseiller, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Garnier, conseiller, les observations de Me Thouin-Palat, avocat de la société Le Centre matériel général, de la SCP Vier et Barthélémy, avocat de la société Slibail, les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bourges, 20 novembre 1996), que, par contrat de crédit-bail, la société Slibail a donné en location à M. X... un tractopelle fourni par la société Le Centre matériel général (société CMG) ; qu'ayant appris, après prononcé du redressement judiciaire de M. X..., que cet engin avait été revendu par le locataire au fournisseur qui lui avait livré un autre matériel, la société Slibail a poursuivi judiciairement la société CMG en paiement d'une certaine somme ;
Attendu que la société CMG fait grief à l'arrêt de sa condamnation, alors, selon le moyen :
1 / que les motifs de l'arrêt laissent incertain le fondement juridique de la décision rendue et ne permettent pas à la Cour de Cassation d'exercer son contrôle sur la nature et la justification de la condamnation prononcée, dont on ne sait s'il s'agit du prix de la chose d'autrui irrégulièrement vendue et acquise ou de la réparation du préjudice qu'aurait éprouvé le véritable propriétaire du fait de cette vente ;
que l'arrêt est ainsi dépourvu de base légale au regard des articles 1134, 1382 et 1599 du Code civil ;
2 / que la vente de la chose d'autrui est inopposable au véritable propriétaire, qui conserve tous ses droits, ne dispose pas d'une action en nullité et ne peut prétendre à des dommages-intérêts que dans la mesure où la revendication du bien lui appartenant ne le rétablit pas intégralement dans ses droits ; que, dès lors, l'arrêt ne pouvait fonder sa décision ni sur la nullité de la vente contestée ni sur le préjudice subi, faute de constater que le véritable propriétaire avait exercé sans succès ou avec un succès limité l'action en revendication, à laquelle il aurait été mis dans l'obligation de recourir; que la décision attaquée a violé les articles 1134, 1382 et 1599 du Code civil ;
3 / que l'arrêt ne pouvait en tout état de cause condamner la société CMG à des dommages-intérêts, sans tenir compte des circonstances de fait de nature à atténuer sa faute et sans donner la moindre justification quant à la nature et à l'importance du préjudice éventuellement subi et au montant des dommages-intérêts correspondants; que la décision attaquée est ainsi dépourvue de base légale au regard des articles 1134, 1382 et 1599 du Code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant été saisie par voie de conclusions d'une demande fondée sur la responsabilité pour faute, la cour d'appel, qui a légalement justifié sa décision, a pu statuer comme elle a fait ;
Attendu, en second lieu, que, sous couvert de griefs non fondés de violation de la loi et de manque de base légale, le pourvoi ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de Cassation les appréciations souveraines des juges du fond sur l'existence et le montant du préjudice ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Le Centre matériel général aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Le Centre matériel général à payer à la société Slibail la somme de 1 200 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf janvier deux mille deux.