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08/01/2002 | FRANCE | N°98-20181

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 08 janvier 2002, 98-20181


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / la société Comast, société de droit italien dont le siège est 68-38 Via Marabotto, 16156 Gênes (Italie),

2 / la société Joma SRL, société de droit italien dont le siège est 29, Viale Campania, 20113 Milan (Italie),

en cassation d'un arrêt rendu le 2 juillet 1998 par la cour d'appel de Versailles (13e Chambre civile), au profit :

1 / de Mme Laurence Z..., demeurant "Le Clémenceau", ..., pr

ise ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan du Groupe Kaisui, 8, place Gabriel Péri, 9...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / la société Comast, société de droit italien dont le siège est 68-38 Via Marabotto, 16156 Gênes (Italie),

2 / la société Joma SRL, société de droit italien dont le siège est 29, Viale Campania, 20113 Milan (Italie),

en cassation d'un arrêt rendu le 2 juillet 1998 par la cour d'appel de Versailles (13e Chambre civile), au profit :

1 / de Mme Laurence Z..., demeurant "Le Clémenceau", ..., prise ès qualités de co-commissaire à l'exécution du plan du Groupe Kaisui, 8, place Gabriel Péri, 92000 Nanterre,

2 / de MM. X... et Y..., administrateurs provisoires de la société civile professionnelle (SCP) d'administrateurs judiciaires A... et Gouletquer, demeurant ..., pris en leur qualité de commissaires à l'exécution du plan du Groupe Kaisui,

défendeurs à la cassation ;

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 13 novembre 2001, où étaient présents : M. Dumas, président, M. Badi, conseiller rapporteur, M. Tricot, conseiller, Mme Moratille, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Badi, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat des sociétés Comast et Joma SRL, de Me Le Prado, avocat de Mme Z..., ès qualités, les conclusions de M. Jobard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 juillet 1998), que la société Kaisui France a été mise en redressement judiciaire et que, postérieurement à l'arrêt du plan de cession au profit de la société Sagem, la société Comast, aux droits de laquelle se trouve la société Joma, a revendiqué, sur le fondement d'une clause de réserve de propriété contenue dans un contrat du 15 février 1994, des moules et outillages impayés ainsi que des pièces fabriquées à l'aide des moules ;

que la société Comast a formé un recours contre la décision du juge-commissaire n'ayant accueilli la demande que pour les moules et les outillages, puis a relevé appel du jugement ayant confirmé cette décision ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que les sociétés Comast et Joma font grief à l'arrêt d'avoir décidé que les conditions de l'action en revendication n'étaient pas réunies et d'avoir rejeté toutes leurs demandes, alors, selon le moyen, que si les conditions de l'opposabilité d'une clause de réserve de propriété aux organes d'une procédure collective ouverte en France sont régies par la loi du 25 janvier 1985, le sens et la portée de la convention par laquelle les parties sont convenues de retarder le transfert de propriété des biens qui en font l'objet doivent être déterminés par référence à la loi applicable à cette convention ; qu'il n'est pas contesté que les parties avaient stipulé que le contrat serait accompli à l'issue d'un complet paiement, la société Comast se réservant la propriété jusqu'à complet paiement, selon l'article 1523 du Code civil italien, et qu'en cas de litige, le tribunal compétent serait celui de Gênes ; qu'en recherchant le sens et la portée de la clause de réserve de propriété par application du droit français, après avoir écarté la mise en oeuvre du droit italien, au motif que la requête de la société Comast doit s'apprécier au regard des dispositions de la loi du 25 janvier 1985 applicable aux revendications et qu'il convient de rejeter comme non fondées les prétentions des sociétés Comast et Joma aux fins d'application du droit italien au litige, la cour d'appel a violé l'article 121 de la loi du 25 janvier 1985 par fausse application et a violé l'article 3 de la convention de Rome du 19 juin 1980 par refus d'application ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article 7, alinéa 2, de la convention précitée que les dispositions de celle-ci ne pourront porter atteinte à l'application des règles de la loi du pays du juge qui régissent impérativement la situation, quelle que soit la loi applicable au contrat ;

que l'action en revendication à l'encontre d'une société soumise à une procédure collective ayant été portée devant un juge français tenu d'appliquer les règles qui régissent impérativement cette situation, c'est à bon droit que la cour d'appel a écarté l'application du droit italien ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur les quatre dernières branches du moyen :

Attendu que les sociétés Comast et Joma font le même reproche à l'arrêt, alors, selon le moyen :

1 / qu'il suffit, pour que la clause de réserve de propriété soit opposable à l'acheteur et aux autres créanciers, qu'elle figure dans un écrit régissant un ensemble d'opérations commerciales convenues entre les parties, et qu'elle ait été établie au plus tard au moment de la livraison ; que l'article 121 de la loi du 25 janvier 1985 ne fait pas de la détermination du prix, lequel peut être indéterminé dans un contrat d'entreprise, une condition de validité ou d'opposabilité de la clause de réserve de propriété ; que la cour d'appel a relevé que la clause de réserve de propriété figurait dans le contrat du 15 février 1994 ; que ce contrat, précisait "le contrat s'accomplit par le payement de la dernière tranche (article 1523 du Code civil). Comast conserve la propriété jusqu'à l'encaissement de son crédit" ; qu'en se fondant sur ce que le contrat ne mentionnait aucunement les conditions financières de la production des produits d'essai, devant faire l'objet de discussion entre les parties, et que la société Comast ne rapportait pas la preuve de l'acceptation de la clause de réserve de propriété pour les produits d'essai dont les conditions de vente n'étaient pas déterminées, la cour d'appel a violé l'article 121 de la loi du 25 janvier 1985 ;

2 / que la résolution du contrat peut être poursuivie à l'encontre de l'administrateur judiciaire qui ne respecte pas les termes de celui-ci ; que le contrat conclu le 15 février 1994 entre les sociétés Kaisui, Comast et Joma prévoyait que la société Joma aurait le droit de vendre les coffrets fabriqués par les moules à tous ses clients hors d'Europe en s'approvisionnant chez les fournisseurs de la société Kaisui au prix d'achat de cette société ; que l'administrateur judiciaire de la société Kaisui a cédé les moules litigieux sans faire accepter expressément par le cessionnaire l'obligation d'accès aux produits fabriqués ainsi stipulée au profit de la société Joma ; qu'en rejetant la demande en résolution formée par les sociétés Comast et Joma, laquelle tendait à obtenir, consécutivement à cette résolution, la restitution des moules, ou, à tout le moins, de leur prix, aux motifs que "toutes les demandes tendant à faire dire et juger qu'il y a eu résiliation aux torts et griefs de M. A... et de Mme Z...... doivent être purement et simplement écartées comme ne relevant pas du champ d'application des articles 121 et 122 de la loi du 25 janvier 1985", la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 du Code civil ;

3 / que l'aveu est la déclaration par laquelle une personne reconnaît pour vrai et comme devant être tenu pour avéré à son égard, un fait de nature à produire contre elle des effets juridiques ; que la cour d'appel affirme qu'il résulte de la propre communication de pièces des sociétés Comast et Joma que les marchandises dont le solde du prix est revendiqué n'ont pas été livrées et ont été conservées, que l'aveu de la rétention des moules et outillages résulte d'un courrier adressé à M. A... le 23 mai 1995 et d'une facture au titre des frais, ainsi que des conclusions d'appel desdites sociétés ; qu'il ne résulte aucunement des documents auxquels la cour d'appel s'est référée que les sociétés Comast et Joma aient avoué retenir les biens qu'elles revendiquaient ; que le courrier du 23 mai se réfère uniquement à "des inserts et à des outillages de grilles" et non aux moules et coffrets de pré-série revendiqués ; que les conclusions des appelantes ne comportaient aucun aveu ; qu'il ne ressort aucunement de la facture adressée à la société Sagem relativement à un moule de façade et à des moules de satellites entreposés chez la société Comast que celle-ci ait été relative aux moules revendiqués par les appelantes ; qu'ainsi la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1356 du Code civil ;

4 / que prive sa décision de base légale la cour d'appel qui procède à des constatations contradictoires ; que pour débouter les sociétés Comast et Joma de leur action en revendication sur les moules et autres produits, ou à défaut, sur le prix de ceux-ci, livrés à la société Kaisui, puis revendus à la société Sagem en application d'un plan de cession, et ce, tandis que M. A..., ès qualités, s'était reconnu débiteur du paiement du prix revendiqué, la cour d'appel énonce que la société Comast aurait fait l'aveu de la rétention des moules et outillages dans un courrier adressé à M. A... le 23 mai 1995, mais relève immédiatement que les moules en cause ont été vendus à la société Sagem qui les "détient effectivement" ; qu'ainsi la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 115 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel, qui n'était saisie que d'une contestation relative à une revendication de marchandises vendues avec clause de réserve de propriété stipulée dans le contrat du 15 février 1994, n'avait pas le pouvoir de se prononcer sur la résiliation de ce contrat ;

Attendu, en second lieu, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que la cour d'appel a retenu que la preuve de l'acceptation par la société Kaisui de la clause de réserve de propriété pour les produits d'essai n'était pas rapportée et qu'il résultait des pièces communiquées par les sociétés Comast et Joma et de leurs écritures d'appel que la livraison des marchandises revendiquées n'était pas établie ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Comast et la société Joma SRL aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, les condamne à payer à Mme Z... la somme de 1 800 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit janvier deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 98-20181
Date de la décision : 08/01/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CONFLIT DE LOIS - Convention de Rome du 19 juin 1980 - Article 7, alinéa 2 - Action en revendication - Clause de réserve de propriété - Loi applicable - Procédure collective - Revendication devant un juge français - Loi française.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (13e Chambre civile), 02 juillet 1998


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 08 jan. 2002, pourvoi n°98-20181


Composition du Tribunal
Président : Président : M. DUMAS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:98.20181
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