AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Christiane Y..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 6 avril 1998 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale), au profit de M. François X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
M. X... a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 30 octobre 2001, où étaient présents : M. Chagny, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Bailly, conseiller rapporteur, M. Lanquetin, conseiller, Mme Trassoudaine-Verger, conseiller référendaire, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Bailly, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme Y..., de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de M. X..., les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que Mme Y... a été engagée par Mme X... en qualité de secrétaire ; qu'elle a été convoquée à un entretien préalable tenu le 28 décembre 1993, qui n'a pas été suivi de l'envoi d'une lettre de licenciement ; que, n'ayant pas repris son travail après cet entretien, Mme Y... a été convoquée à un nouvel entretien préalable le 4 février 1994 et licenciée le 10 février 1994 pour abandon de poste du 2 janvier au 4 février 1994 ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal de la salariée :
Vu les articles L. 122-14-2 et L. 122-14-3 du Code du travail ;
Attendu que pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu que le contrat de travail ne pouvant être rompu que par une lettre de licenciement, la salariée aurait dû reprendre son travail le 3 janvier 1994 ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que lors du premier entretien préalable l'employeur avait invité la salariée à reprendre ses affaires personnelles et à lui restituer les clés, ce dont il résultait, d'une part, qu'il avait prononcé un licenciement purement verbal entraînant, malgré son irrégularité, la rupture du contrat de travail, d'autre part et par voie de conséquence, qu'en l'absence d'énonciation d'un ou plusieurs de motifs de licenciement dans une lettre de licenciement répondant aux prévisions de l'article L. 122-14-2 du Code du travail, cette rupture était dépourvue de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que Mme Y... n'avait pas commis de faute grave et de l'avoir condamné en conséquence à payer à cette salariée une indemnité compensatrice de préavis et une indemnité de licenciement ;
Mais attendu que l'arrêt devant être cassé en sa disposition relative à l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement, dont les chefs de condamnation critiqués par l'employeur constituent l'application, il n'y a pas lieu de statuer sur le pourvoi incident ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté Mme Y... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 6 avril 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Rejette le pourvoi incident de M. X... ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille un.