AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Horizon TV, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 13 janvier 2000 par la cour d'appel de Paris (21e chambre, section B), au profit de M. Philippe X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 24 octobre 2001, où étaient présents : M. Le Roux-Cocheril, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Besson, conseiller référendaire rapporteur, M. Texier, Mme Quenson, conseillers, Mme Bourgeot, conseiller référendaire, M. Kehrig, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Besson, conseiller référendaire, les observations de Me Choucroy, avocat de la société Horizon TV, les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Vu les articles L. 122-1-1.3 et D. 121-2 du Code du travail ;
Attendu que M. X... a été engagé le 1er février 1995 par la société Horizon TV, en qualité de chargé de production, aux termes d'un contrat de travail à durée déterminée prévoyant qu'il viendrait à expiration le 30 juin 1995 ; que les parties ont conclu, le 28 juillet 1995, pour la période du 28 août 1995 au 26 juillet 1996, puis le 25 juillet 1996, pour la période du 26 août 1996 au 25 juillet 1997, deux nouveaux contrats à durée déterminée, pour la conduite de missions analogues ;
qu'au terme des relations contractuelles, M. X... a réclamé une indemnité de précarité pour chacun de ses contrats de travail, qui lui a été refusée ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale afin d'en obtenir le paiement ou, à titre subsidiaire, de voir requalifier ses contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée ;
Attendu que, pour requalifier la relation de travail en une relation à durée indéterminée, et condamner la société Horizon TV à payer diverses sommes à ce titre et au titre de la rupture de la relation contractuelle, l'arrêt énonce que, pour justifier le recours à un contrat de travail à durée déterminée d'usage, l'employeur fait valoir que son activité principale est de produire et de réaliser une émission intitulée "Savoir Faire" sur des chaînes télévisuelles, et qu'elle est sous l'entière dépendance desdites chaînes avec lesquelles elle signe des contrats à durée limitée dans le temps, non renouvelables par tacite reconduction ;
qu'elle rappelle par ailleurs, que le secteur de l'audiovisuel est au nombre des activités pour lesquelles le recours à des contrats de travail à durée déterminée est autorisé par l'article D. 121-2 du Code du travail ; qu'elle n'établit cependant nullement qu'il serait d'usage de ne recourir pour la promotion d'une émission de télévision maintenue sur la grille des programmes pendant plusieurs années, comme c'est le cas de l'émission "Savoir Faire", à des contrats de travail à durée déterminée; qu'elle ne conteste pas, d'ailleurs, avoir offert le 25 septembre 1997 à M. X... un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de commercial chargé de la commercialisation et la production de plusieurs reportages télévisés ; qu'elle n'allègue pas que les contrats passés avec la société de télévision pour la diffusion de ces produits aient été, en ce qui concerne leur limitation dans le temps, d'une nature différente de ceux conclus pour la diffusion de l'émission "Savoir Faire" ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que M. X... avait été embauché afin de promouvoir une émission de télévision unique, et alors qu'un programme télévisuel lorsqu'il est soumis aux aléas d'accords à durée limitée passés avec des chaînes de télévision, revêt un caractère précaire, ce dont il résulte que l'emploi occupé par le salarié en qualité de chargé de production de la seule émission "Savoir Faire" était par nature temporaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen unique ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a requalifié la relation de travail ayant existé entre les parties en une relation à durée indéterminée, et condamné la société Horizon TV à payer une indemnité de requalification, ainsi que diverses sommes au titre de la rupture de la relation contractuelle, l'arrêt rendu le 13 janvier 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille un.