La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/11/2001 | FRANCE | N°98-15597

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 20 novembre 2001, 98-15597


Attendu, selon le jugement attaqué, que, par acte du 29 décembre 1987, la SARL Civa (la société) a acquis, en qualité de marchand de biens, différents lots dépendant d'un immeuble, sous le bénéfice du régime d'exonération prévu par l'article 1115 du Code général des impôts, en prenant l'engagement de les revendre dans un délai de cinq ans ; que certains lots n'ayant pas été revendus dans ce délai, l'administration fiscale a notifié à la société un redressement de droits d'enregistrement ; que pour tenir compte de certaines critiques formulées par la société, l'Adminis

tration a, dans la réponse aux observations du contribuable, réduit le mo...

Attendu, selon le jugement attaqué, que, par acte du 29 décembre 1987, la SARL Civa (la société) a acquis, en qualité de marchand de biens, différents lots dépendant d'un immeuble, sous le bénéfice du régime d'exonération prévu par l'article 1115 du Code général des impôts, en prenant l'engagement de les revendre dans un délai de cinq ans ; que certains lots n'ayant pas été revendus dans ce délai, l'administration fiscale a notifié à la société un redressement de droits d'enregistrement ; que pour tenir compte de certaines critiques formulées par la société, l'Administration a, dans la réponse aux observations du contribuable, réduit le montant des sommes ainsi réclamées ; qu'après la mise en recouvrement de ces rappels, la société a formé une réclamation pour obtenir la décharge totale de ceux-ci ; que cette réclamation ayant été rejetée la société a assigné le directeur des services fiscaux de Paris centre ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que la société fait grief au jugement du rejet de sa demande, alors, selon le moyen, qu'en application des articles L. 57 et R. * 57-1 du Livre des procédures fiscales, une notification de redressement, pour être motivée, doit mentionner les textes qui justifient les redressements notifiés ; que pour justifier des redressements consécutifs à la déchéance du régime prévu en faveur des marchands de biens par l'article 1115 du Code général des Impôts, la notification de redressement doit se référer expressément aux dispositions de l'article 1840 G quinquies du Code général des impôts, qui, seules définissent la déchéance dudit régime et ses conséquences ; qu'en l'espèce, il résulte du jugement attaqué que la notification de redressement du 16 février 1993 se réfère au seul article 1115 pour justifier la remise en cause du régime prévu en faveur des marchands de biens dont elle a bénéficié lors de l'acquisition immobilière du 29 décembre 1987 ; que, dès lors, en regardant cette notification de redressement comme suffisamment motivée, bien qu'elle ne vise pas l'article 1840 G quinquies pour justifier les redressements litigieux et qu'elle s'y réfère uniquement pour motiver le droit supplémentaire de 6 %, le tribunal de grande instance de Paris a violé les articles L. 57 et R.* 57-1 précités ;

Mais attendu que le jugement retient que le feuillet 2 de la notification de redressement indique qu'il s'agit de la remise en cause du régime des marchands de biens, en visant l'article 1115 du Code général des impôts, que le feuillet 1 renvoie expressément aux dispositions de l'article 1840 G quinquies du Code général des impôts pour la perception du droit supplémentaire de 6 %, et que les feuillets 1 et 3 précisent l'assiette et le calcul des droits rappelés ainsi que la motivation en fait du redressement ; qu'ainsi, les juges du fond ont, à bon droit, décidé que la notification de redressement était suffisamment motivée ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article R.* 256-1 du Livre des procédures fiscales et l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que l'avis de mise en recouvrement doit comporter les indications nécessaires à la connaissance des droits, taxes, redevances, impositions ou autres sommes qui en font l'objet, ainsi que les éléments du calcul et le montant des droits et pénalités, indemnités ou intérêts de retard qui constituent la créance ; que toutefois, les éléments du calcul peuvent être remplacés par le renvoi au document sur lequel ils figurent lorsque ce document a été établi ou signé par le contribuable ou son mandataire ou lui a été notifié antérieurement ;

Attendu que pour rejeter la demande d'annulation de l'avis de mise en recouvrement du 26 mai 1993, le tribunal rappelle que le total des droits figurant sur celui-ci tient compte de l'abandon partiel consécutif aux observations du contribuable, et retient que la totalité des éléments d'imposition a pu être appréhendée par la société dès la notification de redressement et qu'elle ne conteste pas que la modification intervenue en sa faveur a été portée à sa connaissance avant l'envoi de l'avis de mise en recouvrement, de sorte qu'elle a été en mesure de contester utilement l'ensemble de l'imposition mise en recouvrement, ce qui répond à la finalité des exigences de l'article R.* 256-1 du Livre des procédures fiscales ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il avait constaté que l'avis de mise en recouvrement se référait uniquement à la notification de redressement et non à la réponse aux observations du contribuable qui avait modifié, en les réduisant, le montant des droits rappelés, le tribunal a violé l'article R.* 256-1 du Livre des procédures fiscales, sans que puisse être appliqué l'article 25-II-B de la loi de finances rectificative du 30 décembre 1999, invoqué par le défendeur, sous peine de violer les dispositions de l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme en ce qui concerne le droit à un procès équitable, dès lors que l'instance était déjà en cours à la date d'entrée en vigueur de cette loi de validation ;

Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour de Cassation peut, en cassant sans renvoi, mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 9 février 1998, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Annule en conséquence l'avis de mise en recouvrement n° 93 05 00007 émis le 26 mai 1993 à l'encontre de la société Civa.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 98-15597
Date de la décision : 20/11/2001
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° IMPOTS ET TAXES - Redressement et vérifications (règles communes) - Redressement contradictoire - Notification - Textes - Visa - Marchand de biens.

1° Le redressement fondé sur la remise en cause du régime prévu en faveur des marchands de biens par l'article 1115 du Code général des impôts est suffisamment motivé dès lors que sa notification vise ledit article, renvoie expressément aux dispositions de l'article 1840 G quinquies du même Code pour la perception du droit supplémentaire de 6 %, et précise la motivation en fait du redressement, ainsi que l'assiette et le calcul des droits.

2° IMPOTS ET TAXES - Recouvrement (règles communes) - Avis de mise en recouvrement - Contenu - Loi du 30 décembre 1999 - Article 25-II-B - Application dans le temps.

2° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 - 1 - Equité - Impôts et taxes - Recouvrement - Avis de mise en recouvrement - Loi du 30 décembre 1999 - Application dans le temps.

2° Le tribunal, qui rejette la demande d'annulation d'un avis de mise en recouvrement après avoir constaté que celui-ci se référait uniquement à la notification de redressement et non à la réponse aux observations du contribuable qui avait modifié, en les réduisant, le montant des droits rappelés, viole l'article R.* 256-1 du Livre des procédures fiscales, sans que puisse être appliqué l'article 25-II-B de la loi de finances rectificative du 30 décembre 1999, invoqué par le défendeur, sous peine de violer les dispositions de l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme en ce qui concerne le droit à un procès équitable, dès lors que l'instance était déjà en cours à la date de l'entrée en vigueur de cette loi de validation.


Références :

1° :
2° :
2° :
Code général des impôts 1115, 1840 G quinquies
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 6.1
Livre des procédures fiscales R256-1
Loi de finances rectificative 99-1173 du 30 décembre 1999 art. 25-II-B

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Paris, 09 février 1998


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 20 nov. 2001, pourvoi n°98-15597, Bull. civ. 2001 IV N° 185 p. 178
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2001 IV N° 185 p. 178

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Dumas .
Avocat général : Avocat général : M. Lafortune.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Gueguen.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Delaporte et Briard, Mme Thouin-Palat.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2001:98.15597
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award