AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par le Conseil régional des notaires du ressort de la cour d'appel de Nîmes, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 28 juillet 1998 par la cour d'appel de Nîmes (1re Chambre civile), au profit :
1 / de la société ICS assurances venant aux droits de la société Sprinks, dont le siège est ..., représentée par M. Meille, administrateur judiciaire,
2 / de la compagnie Axa Global Riks, venant aux droits de la compagnie Uni Europe, dont le siège est ...,
défenderesses à la cassation ;
M. Chavinier a déclaré reprendre l'instance, ès qualités de liquidateur de la société ICS SA, en lieu et place de M. Meille,
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 9 octobre 2001, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Aubert, conseiller rapporteur, M. Bouscharain, conseiller, M. Sainte-Rose, avocat général, Mme Aydalot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Aubert, conseiller, les observations de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat du Conseil régional des notaires, de la SCP Peignot et Garreau, avocat de la société ICS assurances, venant aux droits de la société Sprinks, de la SCP Rouvière et Boutet, avocat de la compagnie Axa Global Riks, venant aux droits de la compagnie Uni Europe, les conclusions de M. Sainte-Rose, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à M. Chavinier de ce qu'il reprend, ès qualités de liquidateur de la société ICS SA, la procédure en lieu et place de M. Meille, en vertu de sa désignation par le tribunal de Nanterre ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, qui est préalable :
Vu les articles L. 114-1 du Code des assurances et 28 de l'ordonnance du 28 juin 1945 ;
Attendu que, par un acte du 17 octobre 1994, le Conseil régional des notaires du ressort de la cour d'appel de Nîmes a demandé, d'une part, à la société SIS Assurance, aux droits de laquelle sont venues ensuite la société Sprinks Assurances, puis la société ICS SA, en liquidation et représentée par M. Chavinier, liquidateur, et, d'autre part, à son défaut, à la société GIE Uni Europe, aux droits de laquelle figure la compagnie Axa Global Riks, assureurs auprès desquels il avait successivement souscrit diverses garanties, le paiement d'une somme qu'il avait dû payer en règlement du déficit d'exploitation de l'Office notarial de M. X..., sanctionné d'une peine de suspension temporaire, prononcée le 29 mai 1992, puis d'une interdiction temporaire de 4 ans en vertu d'un jugement du 13 juillet suivant ;
Attendu que, pour déclarer prescrites ces demandes, l'arrêt, après avoir relevé que la garantie visait, en cas d'interdiction temporaire ou de destitution d'un notaire, la prise en charge du déficit d'exploitation de l'Office incombant au conseil régional des notaires concerné en application de l'article 28 de l'ordonnance du 28 juin 1945, énonce que l'événement qui donne naissance à l'action est constitué par les fautes de gestion du notaire qui ont engendré le déficit considéré et que cet événement s'était réalisé au plus tôt en juin 1991, et au plus tard le 29 mai 1992, date de la suspension provisoire, de sorte que l'action était prescrite au jour de l'assignation, la date de la prise en charge effective du déficit, simple conséquence de l'événement donnant naissance à l'action, ne pouvant constituer le point de départ du délai de la prescription ;
Attendu, cependant, que le point de départ de la prescription biennale de l'action appartenant à l'assuré pour réclamer la garantie de l'assureur se situe au jour où cet assuré a eu connaissance de la réalisation du risque de nature à entraîner le jeu de la garantie ;
qu'en omettant de rechercher la date à laquelle avait été établi le déficit d'exploitation de l'office en cause et qu'il revenait audit Conseil régional de prendre en charge, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les trois autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 juillet 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne les sociétés ICS SA et Axa Global Riks aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes formées par les sociétés ICS SA et Axa Global Risks ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille un.