AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Gallego, société anonyme dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 22 février 1999 par la cour d'appel de Pau (Chambre sociale), au profit de M. Bernard X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 11 juillet 2001, où étaient présents : M. Boubli, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Bouret, conseiller rapporteur, M. Coeuret, conseiller, M. Richard de la Tour, conseiller référendaire, M. Kehrig, avocat général, Mme Marcadeux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Bouret, conseiller, les observations de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de la société Gallego, les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que M. X..., employé de la société Gallego, a été licencié pour motif économique par lettre du 30 janvier 1995 ; que, par lettre du 22 février 1995, il a été dispensé de l'exécution du préavis ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué (Pau, 22 février 1999) d'avoir dit que le licenciement de M. X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1 / que le licenciement de M. X... lui a été notifié le 22 février 1995 ; qu'en déclarant qu'il était intervenu le 31 mars 1995, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-1 du Code du travail ;
2 / que l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement s'apprécie à la date de celui-ci ; qu'en déclarant non fondé le licenciement économique intervenu le 22 février 1995 sans vérifier, à cette date, la réalité et la gravité de la diminution de commandes invoquées au seul motif que le 7 avril suivant, la situation se serait améliorée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 321-1 du Code du travail ;
3 / que le salarié n'a jamais invoqué une carence de l'employeur dans son obligation de formation mais soutenu au contraire dans ses écritures d'appel "avoir satisfait à la formation de plaquiste" ;
qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes du litige, a violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ;
4 / qu'en relevant d'office, et sans rouvrir les débats pour provoquer les explications des parties, le moyen pris d'une carence de l'employeur dans son obligation de formation, la cour d'appel a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;
5 / que la formation professionnelle, qui permet au salarié d'acquérir "une qualification correspondant aux besoins de l'économie prévisibles à court et moyen terme", s'acquiert à l'initiative du salarié ;
qu'en reprochant à l'employeur de ne pas justifier "avoir satisfait à son obligation de formation", sans rechercher si le salarié avait sollicité celle-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 321-1 et L. 900-3 du Code du travail ;
6 / que les lettres circulaires adressées aux entreprises du groupe en vue du reclassement des salariés étaient accompagnées "d'une liste détaillée des neuf salariés dont le licenciement (était) envisagé avec les renseignements les concernant" dont leur emploi et qualification ;
qu'elles précisaient par ailleurs que les propositions sollicitées ne devaient pas nécessairement porter sur des emplois équivalents à ceux occupés au sein de l'entreprise par les salariés concernés mais pouvaient intégrer des emplois de qualification inférieure ou nécessitant une formation dont les modalités seraient examinées avec la société Gallego ; qu'en énonçant que cette mesure était insuffisante, faute de mentionner "les aptitudes professionnelles des salariés concernés", la cour d'appel a violé les articles L. 321-1 et L. 321-4-1 du Code du travail ;
7 / qu'en se déterminant par un motif inopérant au regard de M. X..., dont les aptitudes étaient limitées à l'emploi de serrurier qu'il occupait effectivement, la cour d'appel a violé derechef les textes susvisés, ensemble l'article L. 122-14-3 du Code du travail ;
8 / que les entreprises économiquement liées au sein d'un groupe de sociétés sont juridiquement indépendantes ; qu'en énonçant que le refus non fondé d'une entreprise du groupe de reclasser un salarié de l'employeur engageait "la responsabilité de (celui-ci) qui était dans un lien de droit lui permettant de vérifier l'effectivité de la réponse négative, sauf à engager la responsabilité du groupe ou de sa filiale", la cour d'appel a violé derechef les textes susvisés, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, après avoir relevé que l'employeur s'était borné à envoyer des lettres circulaires aux entreprises du groupe, sans engager une recherche effective des postes disponibles, a retenu qu'il n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel elle appartient ;
qu'ainsi, abstraction faite des motifs surabondants visés par le moyen, et sans encourir les autres griefs du moyen, elle a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Gallego aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette l'ensemble des demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille un.