AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société à responsabilité limitée Polypetrol, société de droit allemand, dont le siège est Berliner, Promenade 2 D 6600 Saarbrucken (Allemagne),
en cassation d'un arrêt rendu le 28 avril 1998 par la cour d'appel de Montpellier (2e chambre civile, section B), au profit de M. Alain X..., demeurant ..., pris tant en son nom personnel qu'en qualité de liquidateur amiable de la société à responsabilité limitée Société générale routière (SGR),
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 3 juillet 2001, où étaient présents : M. Dumas, président, Mme Gueguen, conseiller référendaire rapporteur, M. Leclercq, conseiller, M. Feuillard, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Gueguen, conseiller référendaire, les observations de la SCP Vincent et Ohl, avocat de la société Polypetrol, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. X..., ès qualités, les conclusions de M. Feuillard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches réunies :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 28 avril 1998) que la société Polypetrol a fait assigner M. X... pour obtenir sa condamnation personnelle au paiement d'une certaine somme en invoquant les fautes commises par celui-ci dans l'exécution de sa mission de liquidateur amiable de la société SGR ; que par jugement du 19 novembre 1996, le tribunal de commerce de Perpignan ayant fait droit à cette demande, M. X... a fait appel de cette décision en soulevant la prescription de l'action en responsabilité contre le liquidateur en application des articles 400 alinéa 2 et 247 de la loi du 24 juillet 1966 ;
Attendu que la société Polypetrol fait grief à l'arrêt d'avoir infirmé la décision du tribunal en déclarant sa demande irrecevable, alors, selon le moyen :
1 / que le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité engagée à l'encontre d'un liquidateur de société ne peut commencer à courir qu'au jour où les droits des victimes du fait dommageable imputé à ce liquidateur ont été définitivement reconnus par une décision de justice ; que la cour d'appel, pour déclarer prescrite l'action en responsabilité engagée à titre personnel contre le liquidateur d'une société commerciale, a retenu que les fautes d'abstention énumérées dans l'assignation du 2 mai 1996 n'avaient pu être commises qu'à l'occasion de son mandat de liquidateur amiable de la société SGR, et que ce mandat fixé sans précision de durée avait pris fin le 29 novembre 1992 ; qu'en statuant ainsi, et bien que suivant jugement du tribunal de commerce de Perpignan du 23 décembre 1993, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 23 février 1995, M. X... avait été condamné es-qualité de liquidateur amiable de la société Générale Routière à payer à la société Polypetrol la somme de 231 258,61 francs, la cour d'appel a violé les articles 247 et 400 de la loi du 24 juillet 1966 ;
2 / qu'elle avait invoqué le jugement du tribunal de commerce de Perpignan du 23 décembre 1993 et l'arrêt confirmatif de la cour d'appel de Montpellier du 23 février 1995, condamnant M. X... es-qualité de liquidateur amiable de la Société générale routière à lui payer la somme de 231 258,61 francs ; que la cour d'appel qui, pour accueillir l'exception de prescription opposée par M. X..., a retenu que les fonctions de liquidateur de ce dernier avaient pris fin en novembre 1992, sans tenir compte des décisions intervenues entre elle et M. X... en qualité de liquidateur, dont ce dernier avait invoqué l'autorité de la chose jugée, a privé sa décision de base légale au regard des articles 400 et 247 de la loi du 24 juillet 1966 ;
Mais attendu qu'ayant indiqué dans ses conclusions d'appel, que le fondement juridique déclaré de son action était l'article 1382 du Code civil, et que la prescription invoquée par M. X... était irrecevable, celui-ci s'étant volontairement placé en dehors de la loi du 24 juillet 1966, la société Polypetrol ne peut désormais soulever un moyen dont les deux branches sont incompatibles avec ses prétentions dans l'instance d'appel ;
d'où il suit que le moyen, pris en ses deux branches, est irrecevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Polypetrol aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Polypetrol à verser la somme de 12 000 francs ou 1 829,39 euros à M. X..., et rejette la demande de celle-ci ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf octobre deux mille un.