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09/05/2001 | FRANCE | N°00-87713

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 09 mai 2001, 00-87713


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le neuf mai deux mille un, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire DESPORTES, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHEMITHE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... René,

contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 26 octobre 2000, qui, sur renvo

i après cassation, pour prêt illicite de main-d'oeuvre et travail clandestin, l'a condam...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le neuf mai deux mille un, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire DESPORTES, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHEMITHE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... René,

contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 26 octobre 2000, qui, sur renvoi après cassation, pour prêt illicite de main-d'oeuvre et travail clandestin, l'a condamné à 1 an d'emprisonnement avec sursis, à 10 000 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 324-9, L. 324-10 et L. 362-3 du Code du travail dans leur rédaction aux faits de la cause commis en 1989-1990, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré René Y... coupable d'avoir recouru à un travailleur clandestin ;

"aux motifs qu'Arif X... a été condamné définitivement pour travail clandestin sous couvert d'une entreprise mise au nom de son épouse, de sorte que les documents produits par René Y... tendant à établir que celle-ci n'était pas en situation de travail clandestin sont inopérants ; que les autres éléments constitutifs de l'infraction ne sont pas contestés ;

"alors, d'une part, que la seule condamnation d'Arif X... pour travail clandestin ne saurait justifier à elle seule celle de René Y... pour recours à un travailleur clandestin ; que, dès lors, en s'appuyant sur la condamnation devenue définitive d'Arif X... sans définir en quoi les éléments constitutifs du délit de recours à un travailleur clandestin étaient réunis s'agissant de René Y..., la cour d'appel a privé sa décision de tout motif ;

"alors, d'autre part, que l'article L. 324-9 du Code du travail n'incriminait à l'époque que le recours direct aux services d'un travailleur clandestin ; qu'en l'espèce, René Y..., dans ses conclusions régulièrement déposées, a fait valoir que l'entreprise de Fadime X... à laquelle il avait fait appel n'était pas un travailleur clandestin ; que, dès lors, la cour d'appel, en n'indiquant pas en quoi René Y... aurait directement eu recours à Arif X..., a privé sa décision de base légale ;

"alors, enfin, que l'infraction est caractérisée par le fait d'avoir recouru sciemment aux services de celui qui exerce une activité de travail clandestin ; qu'en l'espèce, il n'est pas constaté que René Y..., dont la cour d'appel a relevé qu'il avait produit des documents attestant qu'il avait pu de bonne foi croire que l'entreprise X... était en situation régulière, aurait eu connaissance du caractère clandestin de l'activité d'Arif X... ;

que, dès lors, l'arrêt attaqué, qui n'a pas caractérisé l'élément intentionnel du délit de travail clandestin, se trouve privé de base légale" ;

Attendu que, pour déclarer René Y... coupable de travail clandestin sur le fondement des dispositions des articles L. 324-9 et L. 324-10 du Code du travail dans leur rédaction antérieure à la loi du 31 décembre 1991, applicables en la cause, la cour d'appel retient que, pour l'exécution de travaux de construction, le prévenu a eu recours, sous le couvert d'un contrat de sous-traitance conclu avec Fadim X..., aux services de l'époux de celle-ci, Arif X..., lequel n'était pas immatriculé au répertoire des métiers ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, qui caractérisent en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, le délit reproché au prévenu, les juges ont justifié leur décision au regard des textes susvisés, qui n'excluent pas la répression en cas de recours à un entrepreneur clandestin par personne interposée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 125-3 et L. 152-2 du Code du travail, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré René Y... coupable d'avoir bénéficié, en 1989-1990, de prêt de main-d'oeuvre à des fins lucratives hors du cadre légal du travail temporaire ;

"aux motifs que les travailleurs de l'équipe X... étaient placé sous les directives du chef de chantier de René Y... ; qu'ils exerçaient des tâches dépourvues de spécificité et que le contrat de sous-traitance entre l'entreprise de René Y... et celle d'Arif X... était inexistant ;

"alors, d'une part, que le demandeur faisait valoir dans ses conclusions régulièrement déposées que son entreprise n'ayant pas sous-traité la totalité de son marché, elle restait en conséquence présente sur le chantier lorsque l'entreprise X... y travaillait également ; qu'en retenant que les travailleurs de l'entreprise X... étaient placés sous les directives du chef de chantier de l'entreprise Y..., sans répondre à ce chef déterminant de ses conclusions, qui démontraient que les ordres donnés par l'entreprise Y... ne concernaient pas l'activité sous-traitée, respectant ainsi l'indépendance de l'entreprise X..., la cour d'appel a privé sa décision de motifs ;

"alors, d'autre part, que le contrat de sous-traitance est caractérisé essentiellement par le caractère défini et spécifique du travail fourni ; qu'en retenant, pour considérer que le contrat de sous-traitance passé par René Y... avait pour but réel le prêt de personnel, qu'Arif X... n'apportait pas un matériel lui appartenant, sans rechercher si, comme le soutenait René Y... dans ses conclusions d'appel, l'entreprise sous-traitante n'était pas effectivement chargée du coulage du béton, travail spécifique justifiant la sous-traitance, le matériel utilisé étant directement livré sur le chantier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué, incomplètement reprises aux moyens, mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit de prêt illicite de main-d'oeuvre dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne peut être admis ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-27 du Code pénal et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement du tribunal correctionnel de Narbonne dans toutes ses dispositions, y compris en ce qu'il a prononcé une peine d'emprisonnement avec sursis et une amende ;

"aux motifs que la peine d'emprisonnement avec sursis et l'amende sont justifiées par l'ampleur et la gravité des faits ;

"alors qu'il résulte de l'article 132-24 du Code pénal que les peines doivent être prononcées en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur ; et que, s'agissant d'une amende, la juridiction doit déterminer son montant en tenant compte également des ressources et des charges de l'auteur de l'infraction ; que, en l'espèce, en se bornant à confirmer la peine d'amende dans son principe et son quantum sans se prononcer sur les ressources du prévenu, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de la règle de l'individualisation de la peine, et a privé sa décision de tout motif" ;

Attendu que la détermination de la peine par les juges, dans les limites prévues par la loi, relève d'une faculté dont ils ne doivent aucun compte et à laquelle l'article 132-24 du Code pénal n'apporte aucune restriction ;

D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 2 et 593 du Code de procédure pénale, 1382 du Code civil, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement rendu le 19 janvier 1996 par le tribunal correctionnel de Narbonne qui a déclaré la constitution de partie civile de la Fédération nationale des salariés de la construction et du bois CFDT recevable et qui, en conséquence, a condamné René Y... à lui verser la somme de 3 000 francs à titre de dommages et intérêts ;

"alors, d'une part, que les syndicats ne sont recevables à se constituer partie civile devant les juridictions pénales que lorsque l'infraction a porté atteinte à l'intérêt collectif de la profession représentée par le syndicat ; qu'en s'abstenant de rechercher l'existence d'une telle atteinte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"alors, d'autre part, que, pour allouer des dommages et intérêts, les juges du fonds doivent contrôler l'existence d'un préjudice personnel, directement né de l'infraction ; qu'en s'abstenant de rechercher si la Fédération nationale des salariés de la construction et du bois CFDT avait subi un préjudice du fait des agissements de René Y..., la cour d'appel n'a pas caractérisé le lien de causalité entre la faute et le dommage" ;

Attendu qu'il ne résulte d'aucune énonciation de l'arrêt attaqué, ni d'aucunes conclusions régulièrement déposées par le prévenu que celui-ci ait contesté devant les juges du second degré la demande de réparation présentée par le syndicat partie civile ; qu'il ne peut être admis à le faire pour la première fois devant la Cour de Cassation ;

D'où il suit que le moyen est irrecevable ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Joly conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Desportes conseiller rapporteur, Mme Mazars conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Chemithe ;

Greffier de chambre : Mme Nicolas ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 00-87713
Date de la décision : 09/05/2001
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, chambre correctionnelle, 26 octobre 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 09 mai. 2001, pourvoi n°00-87713


Composition du Tribunal
Président : Président : M. JOLY conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2001:00.87713
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