AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la Société bordelaise de crédit industriel et commercial (SBCIC), dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 16 avril 1998 par la cour d'appel de Pau (2e chambre I), au profit de M. Pierre Y..., demeurant ..., pris ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de M. Pierre X...,
défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 27 février 2001, où étaient présents : M. Dumas, président, Mme Collomp, conseiller rapporteur, M. Leclercq, conseiller, M. Feuillard, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Collomp, conseiller, les observations de la SCP Parmentier et Didier, avocat de la Société bordelaise de crédit industriel et commercial (SBCIC), les conclusions de M. Feuillard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt déféré, que la Société bordelaise de Crédit industriel et commercial (SBCIC) a fait assigner M. X... en paiement du solde débiteur de son compte courant et du montant escompté de deux lettres de change tirées par l'intéressé et qui, restées impayées à leurs échéances, avaient été inscrites, sans être contre-passées, sur un compte d'impayés ; que M. X... lui a notamment opposé la prescription d'un an prévue par l'article 179 du Code de commerce ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 179 du Code de commerce devenu l'article L 511-78 de ce Code :
Attendu que pour débouter la SBCIC de sa demande en paiement des deux lettres de change litigieuses, la cour d'appel retient qu'à supposer même que le courrier de M. X... du 31 décembre 1992 puisse valoir aveu de non-paiement des effets, la prescription de l'action cambiaire avait en tout état de cause, été acquise le 31 décembre 1993 de sorte que l'action, initiée seulement le 21 mars 1994, était irrecevable ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, alors que, reposant sur une présomption de paiement, la prescription abrégée instituée par l'article 179 du Code de commerce devenu son article L. 511-78 ne peut être invoquée par celui qui reconnaît n'avoir pas acquitté le montant des lettres de change qui lui est réclamé, sans rechercher, comme elle y avait été invitée, si dans ses conclusions, M. X... n'avait pas reconnu ne pas avoir payé les effets pour lesquels il était poursuivi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article précité ;
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 1134 du Code civil ;
Attendu que pour débouter la SBCIC de sa demande en paiement des lettres de change impayées en tant que fondée sur les contrats d'escompte, l'arrêt retient que le montant de leur escompte est compris dans le solde du compte bancaire déjà fixé à la somme de 62 241,22 francs ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait par ailleurs que les effets litigieux n'avaient pas fait l'objet d'une contre-passation mais que leur montant avait été inscrit sur un compte impayé centralisant les incidents de paiement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 avril 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ;
Condamne M. Y... ès qualités aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq avril deux mille un.