AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. X...
Y..., demeurant ...,
en cassation d'une décision rendue le 15 juin 1998 par le tribunal du contentieux de l'incapacité de Marseille, au profit de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Vaucluse, dont le siège est ...,
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 30 novembre 2000, où étaient présents : M. Gougé, conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président, Mme Guilguet-Pauthe, conseiller référendaire rapporteur, MM. Ollier, Thavaud, Mme Ramoff, M. Dupuis, Mme Duvernier, M. Duffau, conseillers, MM. Petit, Leblanc, conseillers référendaires, M. Duplat, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Guilguet-Pauthe, conseiller référendaire, les observations de Me Delvolvé, avocat de M. Y..., les conclusions de M. Duplat, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Attendu qu'aux termes de ce texte, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial ;
Attendu que le tribunal du contentieux de l'incapacité a rejeté le recours formé par M. Y... contre une décision de la Caisse primaire d'assurance maladie maintenant à 5% , à la date de la demande de révision pour aggravation, le 31 janvier 1997, le taux d'incapacité permanente partielle résultant de l'accident du travail dont il avait été victime le 19 septembre 1994 ;
Attendu qu'il résulte de la décision attaquée que ce tribunal était présidé par un représentant du directeur régional des affaires sanitaires et sociales ; que ce fonctionnaire, soumis à une autorité hiérarchique, a, du fait de ses fonctions administratives, des liens avec la caisse primaire, partie au litige ; qu'en vertu des dispositions de l'article R. 143-4 du Code de la sécurité sociale, il désigne le médecin expert appartenant à cette juridiction ; qu'en application de l'article R. 143-11 du même Code, sa voix est prépondérante en cas de partage ; que ces éléments étaient de nature à faire naître, dans l'esprit du justiciable, des doutes légitimes sur l'indépendance et l'impartialité du tribunal ;
D'où il suit que la cause n'a pas été entendue par un tribunal indépendant et impartial au sens de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui a ainsi été violée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, la décision rendue le 15 juin 1998, entre les parties, par le tribunal du contentieux de l'incapacité de Marseille ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite décision et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal du contentieux de l'incapacité de Montpellier ;
Condamne la Caisse primaire d'assurance maladie du Vaucluse aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la décision cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille un.