AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
I - Sur le pourvoi n° Z 99-44.946 formé par :
1 / M. Mohamed E..., demeurant ...,
2 / M. A...
X... Idir, demeurant 25, rue du Bois Joly, 92000 Nanterre,
3 / M. Lahoussine B..., demeurant ...,
4 / M. Pascal D..., demeurant ...,
5 / M. Maurice Z..., demeurant ...,
6 / M. Philippe C..., demeurant ... Saint-Georges,
en cassation d'un arrêt rendu le 24 juin 1999 par la cour d'appel de Paris (18e chambre sociale, section C), au profit de la société Renault, société anonyme, dont le siège est ... Choisy-le-Roi,
défenderesse à la cassation ;
II - Sur le pourvoi n° U 99-44.987 formé par M. Alain Y..., demeurant ... le Grand,
en cassation du même arrêt rendu au profit de la société Renault,
défenderesse à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 28 juin 2000, où étaient présents : M. Le Roux-Cocheril, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Bourgeot, conseiller référendaire rapporteur, Mmes Lemoine Jeanjean, Quenson, conseillers, M. Besson, conseiller référendaire, M. Duplat, avocat général, Mme Guénée-Sourie, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Bourgeot, conseiller référendaire, les observations de la SCP Delaporte et Briard, avocat de la société Renault, les conclusions de M. Duplat, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu leur connexité, joint les pourvois n° U 99-44-987 et Z 99-44-946 ;
Sur le premier moyen, commun aux pourvois :
Vu l'article R. 517-3, alinéa 1, du Code du travail ;
Attendu qu'aux termes de ce texte, le conseil de prud'hommes statue en dernier ressort lorsque le chiffre de la demande n'excède pas un taux fixé par décret ;
Attendu, selon la procédure, que M. Y... et six autres salariés de la société Renault ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement d'une prime en application de l'article 18 de l'accord relatif à la couverture sociale des salariés, conclu entre les organisations syndicales et la Régie nationale des usines Renault le 5 juillet 1991 qui prévoit que lors du départ en congé de maternité il est alloué à la femme enceinte une somme de 7 500 francs ; que la société Renault ayant relevé appel de la décision du conseil de prud'hommes qui l'a condamnée à payer diverses sommes aux salariés, la cour d'appel a déclaré l'appel recevable et infirmé la décision entreprise ;
Attendu que pour déclarer l'appel recevable, I'arrêt attaqué énonce que les demandes des salariés tendent à ce que l'article 18 de l'accord du 5 juillet 1991 soit, en application de l'article L. 140-2 du Code du travail et de l'article 119 du traité de Rome, déclaré nul en ce qu'il réserve le bénéfice de l'allocation qu'il institue aux seules salariées de sexe féminin, qu'elles présentent donc un caractère indéterminé, que le jugement inexactement qualifié en dernier ressort est susceptible d'appel ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la demande formée devant la juridiction prud'homale, quels qu'aient pu être les moyens invoqués à son appui, avait pour objet le versement d'une prime dont le montant était évalué par les salariés à une somme inférieure à la limite du taux de compétence en dernier ressort de cette juridiction et que, dès lors, le jugement rendu était insusceptible d'appel, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu que, conformément à l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour de Cassation est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen, commun aux pourvois :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 juin 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare irrecevable l'appel interjeté par la société Renault à l'encontre du jugement du conseil de prud'hommes de Villeneuve Saint-Georges en date du 7 avril 1998 ;
Condamne la société Renault aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Renault à payer à chacun des salariés la somme de 3 000 francs ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze octobre deux mille.