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11/07/2000 | FRANCE | N°96-13668

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 11 juillet 2000, 96-13668


Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 17 janvier 1996), qu'en exécution d'une convention passée avec les consorts X..., actionnaires de la société Prio Carbo, la société Kinvope a pris le contrôle de celle-ci en souscrivant à une augmentation de capital avec renonciation des premiers actionnaires à leur droit préférentiel de souscription ; que le rapport spécial prévu par l'article 186 de la loi du 24 juillet 1966 avait été établi par la société LCRA, commissaire aux comptes ; que la société Kinvope, faisant valoi

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Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 17 janvier 1996), qu'en exécution d'une convention passée avec les consorts X..., actionnaires de la société Prio Carbo, la société Kinvope a pris le contrôle de celle-ci en souscrivant à une augmentation de capital avec renonciation des premiers actionnaires à leur droit préférentiel de souscription ; que le rapport spécial prévu par l'article 186 de la loi du 24 juillet 1966 avait été établi par la société LCRA, commissaire aux comptes ; que la société Kinvope, faisant valoir que les consorts X... lui avait dissimulé l'existence d'un procès dirigé contre la société Prio Carbo, qui avait, après la prise de contrôle, entraîné sa condamnation et dont le rapport spécial du commissaire aux comptes ne faisait pas mention, les a assignés en paiement d'une somme égale au montant de la condamnation prononcée contre la société ;

Attendu que la société LCRA reproche à l'arrêt de l'avoir condamnée, in solidum avec les consorts X... à payer à la société Kinvope une certaine somme à titre de dommages-intérêts, alors, selon le pourvoi, 1° qu'en cas d'augmentation de capital réservée à un bénéficiaire déterminé, la prime d'émission a pour objet, comme le droit préférentiel de souscription auquel elle se substitue, d'assurer l'égalité des droits des anciens et des nouveaux actionnaires ; que le rapport spécial établi par le commissaire aux comptes à l'intention des anciens actionnaires vise à informer ces derniers de l'atteinte éventuelle portée à leurs droits sociaux pour leur permettre de renoncer à leur droit préférentiel de souscription en connaissance de cause ; qu'en estimant que la certification des éléments de calcul de la prime d'émission aurait été insuffisante sans constater l'existence d'une quelconque atteinte aux droits sociaux des anciens actionnaires dont l'information aurait été omise, la cour d'appel a violé les dispositions combinées des articles 186 de la loi du 24 juillet 1966, 155-1 du décret du 23 mars 1967 et 1382 du Code civil ; 2° qu'en imputant à faute du commissaire aux comptes l'absence de vérification de l'existence de procès opposant la société Prio Carbo à des tiers sans constater que non seulement le prix d'émission des actions nouvelles aurait été excessif au regard de la finalité de la prime d'émission, qui est exclusivement d'assurer l'égalité des droits des anciens et nouveaux actionnaires, mais que le procès Mariot aurait été ignoré des anciens actionnaires et que l'état d'avancement de la procédure aurait justifié la constitution d'une provision pour litige à la date d'établissement du rapport spécial, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des mêmes textes, ensemble l'article 14 du Code de commerce et l'article 8, avant dernier alinéa, du décret du 29 novembre 1983 ; 3° qu'ayant constaté que la convention du 22 janvier 1988, réservant à la société Kinvope une augmentation de capital fixée à 507 575 francs, revêtait un caractère définitif entre les parties et que le rapport spécial relatif à la suppression du droit préférentiel de souscription lui était postérieur, la cour d'appel, qui n'en n'a pas déduit que la mention du procès Mariot dans le rapport n'eut pas permis à la société Kinvope de revenir sur l'accord précédemment conclu par elle, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au plan du lien de causalité, en violation de l'article 1382 du Code civil ; 4° qu'à supposer que l'avancement de la procédure Mariot eut justifié la constitution d'une provision pour litige à la date d'établissement du rapport spécial relatif à la suppression du droit préférentiel de souscription et, par conséquent, une information spéciale des actionnaires en place, ces derniers n'eussent pas nécessairement suivi les suggestions du commissaire aux comptes tendant à l'éventuelle minoration du prix des actions nouvelles dès lors que leur acquéreur ne pouvait dès lors subir qu'une perte de chance de payer un prix d'action minoré ; qu'en identifiant le préjudice au montant total des indemnités payées par la société Prio Carbo à son adversaire dans l'instance litigieuse, dont la société Kinvope, actionnaire, ne sollicitait au demeurant qu'une quote-part par confirmation du jugement, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil par fausse application ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir exactement rappelé que dans sa mission d'information des actionnaires que lui confient les articles 186 de la loi du 24 juillet 1966 et 155-1 du décret du 23 mars 1967, le commissaire aux comptes ne peut se contenter d'entériner les informations qu'il reçoit, la cour d'appel, qui a constaté que le commissaire aux comptes ne s'est pas, comme il l'aurait dû, informé sur l'existence de litiges en cours, a pu en déduire qu'il n'avait pas rempli sa mission ;

Et attendu, en second lieu, qu'ayant relevé, d'un côté, que le rapport litigieux, indépendamment de sa mission d'information et de protection des actionnaires, avait, en confirmant de façon fallacieuse à la société Kinvope que les éléments dont elle disposait jusqu'alors étaient exacts, alors que si elle avait été informée de l'existence d'un litige qui lui avait été caché, elle aurait pu refuser de mettre en exécution, sans modification, la convention passée avec les consorts X... et, d'un autre côté que la société Kinvope avait dû payer le montant de la condamnation résultant du procès Mariot, la cour d'appel a pu statuer comme elle a fait ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 96-13668
Date de la décision : 11/07/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

SOCIETE (règles générales) - Augmentation de capital - Droit préférentiel de souscription - Suppression - Délibération de l'assemblée générale - Rapport spécial du commissaire aux comptes - Contenu .

SOCIETE ANONYME - Augmentation de capital - Commissaire aux comptes - Rapport spécial - Contenu

SOCIETE ANONYME - Augmentation de capital - Droit préférentiel de souscription - Suppression - Délibération de l'assemblée générale - Rapports préalables - Rapport spécial du commissaire aux comptes - Contenu

SOCIETE ANONYME - Commissaire aux comptes - Mission - Augmentation de capital - Rapport spécial - Contenu

Ayant exactement rappelé que dans sa mission d'information des actionnaires que lui confient les articles 186 de la loi du 24 juillet 1966 et 155-1 du décret du 23 mars 1967, le commissaire aux comptes ne peut se contenter d'entériner les informations qu'il reçoit, la cour d'appel qui constate que le commissaire aux comptes ne s'est pas informé sur l'existence de litiges en cours, a pu en déduire qu'il n'avait pas rempli sa mission. Ayant relevé d'un côté que le rapport spécial du commissaire aux comptes prévu par l'article 186 de la loi du 24 juillet 1966 avait confirmé de façon fallacieuse à une société ayant pris le contrôle d'une autre en souscrivant, en exécution d'une convention passée avec les actionnaires, à une augmentation de capital avec renonciation des premiers actionnaires à leur droit préférentiel de souscription, que les éléments d'information dont elle disposait étaient exacts, alors que si elle avait été informée du litige qui lui avait été caché, elle aurait pu refuser de mettre à exécution la convention, et constaté d'un autre côté que cette société avait dû payer le montant de la condamnation résultant du litige dissimulé, la cour d'appel a pu mettre cette même somme à la charge du commissaire aux comptes.


Références :

Décret 67-237 du 23 mars 1967 art. 155-1
Loi 66-537 du 24 juillet 1966 art. 186

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 17 janvier 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 11 jui. 2000, pourvoi n°96-13668, Bull. civ. 2000 IV N° 144 p. 130
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2000 IV N° 144 p. 130

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Dumas .
Avocat général : Avocat général : M. Lafortune.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Métivet.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Boré, Xavier et Boré, M. Blondel, la SCP Coutard et Mayer.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:96.13668
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