AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par le directeur général des Impôts, domicilié au ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, ...,
en cassation d'un jugement rendu le 18 novembre 1997 par le tribunal de grande instance de Créteil, au profit de M. Jean-Marc X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 21 mars 2000, où étaient présents : M. Dumas, président, M. Huglo, conseiller référendaire rapporteur, M. Poullain, conseiller, M. Lafortune, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Huglo, conseiller référendaire, les observations de Me Thouin-Palat, avocat du directeur général des Impôts, les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ensemble l'article 1840 N quater du Code général des impôts ;
Attendu, selon le jugement déféré, que M. X... a fait l'objet d'un avis de mise en recouvrement le 28 février 1995 pour défaut de paiement de la taxe différentielle sur les véhicules pour l'année 1994 ;
que cet avis de mise en recouvrement visait également l'amende prévue à l'article 1840 N quater du Code général des impôts ; qu'il a assigné devant le tribunal de grande instance le directeur des services fiscaux du Val-de-Marne en annulation de la décision de rejet de sa réclamation ;
Attendu que, pour accueillir la demande en ce qu'elle tendait à le décharger des pénalités, le Tribunal retient que l'application de la sanction prévue à l'article 1840 N quater du Code général des impôts doit être écartée comme se heurtant à l'article 6 de la Convention susvisée, dès lors que n'est prévu aucun recours de pleine juridiction permettant au Tribunal de se prononcer sur son principe et son montant ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'article 1840 n° quater susvisé n'est incompatible avec l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l'homme que dans la seule mesure où le juge saisi d'un recours à l'encontre de la sanction prise envers un contribuable par l'Administration ne peut pas se prononcer sur le principe et le montant de l'amende et qu'il appartenait, dès lors, au Tribunal d'apprécier la proportionnalité de la sanction au comportement du contribuable, le Tribunal a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a prononcé l'annulation des pénalités fiscales appliquées à M. X... pour la taxe due au titre de l'année 1994, le jugement rendu le 18 novembre 1997, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Créteil ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de grande instance de Paris ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille.