AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Barilla, société à responsabilitée limitée, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 30 octobre 1997 par la cour d'appel de Versailles (12e chambre, 1re section), au profit de la société Paris Ouest approvisionnement (Parouest), société anonyme, dont le siège est ...,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 21 mars 2000, où étaient présents : M. Dumas, président, Mme Mouillard, conseiller référendaire rapporteur, M. Poullain, conseiller, M. Lafortune, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Mouillard, conseiller référendaire, les observations de la SCP Monod et Colin, avocat de la société Barilla, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la société Paris Ouest approvisionnement (Parouest) et de M. X..., ès qualités, les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à M. X..., agissant ès qualités de liquidateur judiciaire de sa reprise d'instance au lieu et place de la société Parouest ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'en 1992, la centrale d'achats Auchan et son fournisseur, la société Barilla France, ont conclu des accords qui prévoyaient, d'une part, l'application de conditions tarifaires particulières et, d'autre part, les modalités de leur coopération commerciale ; que, de son côté, "Auchan" a conclu un contrat de partenariat avec le "groupe Abihssira" dont fait partie la société Paris ouest approvisionnement (société Parouest) ; que la société Barilla France ayant livré des marchandises à la société Parouest, un litige a opposé les parties, la société Parouest refusant d'acquitter certaines factures en invoquant la compensation avec une créance qu'elle prétendait détenir contre son fournisseur en vertu de l'accord de coopération commerciale que ce dernier avait conclu avec la centrale d'achat Auchan, et la société Barilla France estimant au contraire qu'à la différence des conditions tarifaires, les accords de coopération commerciale devaient faire l'objet d'accords particuliers entre elle-même et chaque magasin pris individuellement, ce qui n'était pas le cas en l'espèce ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la société Barilla France fait grief à l'arrêt de l'avoir déclarée débitrice envers la société Parouest de deux factures n° 13228 et 19406 "concernant l'ouverture du magasin d'Issy-les-Moulineaux" alors, selon le pourvoi, qu'elle faisait valoir que l'accord conclu le 27 février 1992 dans le cadre de l'ouverture du magasin d'Issy-les-Moulineaux pour une durée de deux ans avait été rompu par Parouest en mars 1993, Barilla ayant été "déréférencée" du magasin concerné, et que les factures concernées mentionnaient cette rupture ;
que la société Parouest n'a pas contesté avoir rompu ledit accord la liant à Barilla, et n'a fait aucune observation sur la portée de la mention manuscrite constatant cette rupture ; qu'en considérant, cependant, que Barilla ne justifiait pas suffisamment cette rupture, pourtant non contestée par la partie adverse, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel était saisie d'une demande de la société Parouest fondée sur deux factures établies au titre d'un accord préalablement passé avec la société Barilla France ; que, dès lors que la société Barilla France prétendait que cet accord avait été rompu antérieurement, les juges se devaient d'apprécier, ainsi qu'il l'ont fait, si la preuve de la rupture alléguée était rapportée, peu important à cet égard que la société Parouest n'ait rien répliqué ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 1165 du Code civil ;
Attendu que, pour déclarer la société Barilla débitrice de la société Parouest au titre de deux factures de 1992, n° 12644, n° 13216, et de deux factures de 1993, n° 9350016 et n° 9350036, la cour d'appel se borne à énoncer que ces factures correspondent à des opérations de coopération commerciale, que celles-ci sont négociées chaque année entre la centrale d'achat Auchan et la société Barilla France et qu'elles font l'objet d'accords écrits qui s'imposent à cette dernière dans ses relations avec les adhérents du "groupe Auchan", dont fait partie la société Parouest ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans préciser à quel titre la qualité d'"adhérent du groupe Auchan" conférait à la société Parouest le droit de revendiquer le bénéfice des accords de coopération commerciale convenus avec ce dernier par la société Barilla France et alors qu'il ne ressort pas de ses constatations que la société Barilla France ait expressément accepté d'étendre à la société Parouest les bénéfices de ces accords, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ;
Et attendu qu'en application de l'article 625 du nouveau Code de procédure civile, la cassation de ce chef de l'arrêt relatif à la demande que la société Parouest avait formée contre la société Barilla France atteint, par voie de conséquence, la condamnation de cette dernière à payer une indemnité à la société Parouest sur le fondement de l'article 700 du même Code ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 octobre 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne M. X..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de la société Barilla France et de M. X..., ès qualités ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille.