AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le onze mai deux mille, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SAMUEL, les observations de la société civile professionnelle NICOLAY et de LANOUVELLE, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général FROMONT ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X...Marie-Thérèse, partie civile,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de BORDEAUX, en date du 13 avril 1999, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, contre personne non dénommée des chefs de vol et violences aggravées a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 222-11, 311-1 du Code pénal, 202, 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef de coups et violences volontaires et de vol ;
" aux motifs propres et adoptés qu'à l'appui de sa plainte du 30 juin 1994, Marie-Thérèse X...produisait un certificat médical qui, ne révélant aucune lésion ni hématome, faisait état de douleurs et de syndrome anxio-dépressif justifiant une incapacité totale de travail personnel de 10 jours ; qu'au cours de l'information diligentée, Eric Z... et Nadine Y...reconnaissaient que le 30 juin 1994 ils s'étaient dirigés vers la plaignante qui attendait à l'arrêt de bus en précisant avoir voulu obtenir une explication avec elle à la suite des différents incidents qui les avaient opposés et de plaintes qu'elle avait déposées ; qu'ils soutenaient néanmoins que la plaignante s'était mise à hurler et que, si des injures avaient été proférées de part et d'autre, à aucun moment ils ne l'avaient frappée et ne lui avaient soustrait un bijou ; que le seul témoin présent, le chauffeur de bus, prétendait que la plaignante avait été agressée verbalement par Nadine Y...et Eric Z... et ajoutait qu'à aucun moment il n'avait vu ceux-ci porter des coups sur celle-ci ou lui soustraire quoi que ce soit ; qu'au vu de ces éléments, le procureur de la République faisait connaître, le 6 février 1995, à la plaignante qu'il n'entendait pas engager de poursuites ; que le 30 juin 1997, soit trois ans jour pour jour, après les faits, Marie-Thérèse X...déposait plainte avec constitution de partie civile des chefs de vol et coups et blessures avec violences ; que l'information diligentée n'apportait aucun élément nouveau permettant de corroborer les déclarations de la victime ; qu'elle révélait seulement que la partie civile était en conflit permanent avec ses voisins en leur reprochant de troubler sa tranquillité et de l'agresser physiquement et psychologiquement ;
" alors que, dans son mémoire régulièrement déposé le 29 mars 1999, la partie civile avait exposé que le conducteur de bus, témoin qui avait assisté à l'ensemble des faits, a reconnu que Marie-Thérèse X...se rendait à l'arrêt de bus, lorsqu'est arrivé " en trombe ", un véhicule de marque Audi appartenant à Eric Z... ; qu'il a précisé que ce véhicule s'était arrêté brusquement puis avait fait marche arrière afin d'aller dans la direction de Marie-Thérèse X...; qu'il a poursuivi en indiquant que le couple était alors descendu de ce véhicule pour injurier Marie-Thérèse X...en des termes particulièrement vulgaires et choquants ; que celle-ci s'était alors réfugiée dans le bus où elle avait été poursuivie par les occupants de la voiture et où selon lui " les insultes ont continué " ;
que même s'il indiquait ne pas avoir vu Marie-Thérèse X...être agressée, il précisait que les agresseurs avaient l'air " violents " ; qu'il précisait également que ceux-ci gesticulaient ; qu'il précisait aussi ne pas avoir entendu Marie-Thérèse X...insulter ou provoquer ses antagonistes qui eux étaient très virulents ; qu'il résultait donc du témoignage du chauffeur de bus que Nadine Y...et Eric Z... n'avaient pas hésité à poursuivre la plaignante en voiture d'abord et ensuite à pied, et à venir la menacer dans le bus où elle s'était réfugiée ; que, dès lors, s'agissant d'une personne étrangère à l'éventuelle querelle de voisinage existant entre les protagonistes, le juge d'instruction ne pouvait que retenir ce témoignage, et ce d'autant que Marie-Thérèse X...produisait un certificat médical attestant d'une incapacité totale de travail de 10 jours ; que, dès lors, il est parfaitement démontré que l'infraction prévue par l'article 222-11 du Code pénal était constituée ; qu'en effet, il convient de préciser que selon une jurisprudence constante et plus que centenaire, en entend par violences également les actes qui, sans atteindre matériellement la personne, sont cependant de nature à provoquer une sérieuse émotion ; que tel est évidemment le cas ;
qu'en s'abstenant d'examiner ce moyen péremptoire fondé sur le choc émotif causé à la partie civile par l'infraction dénoncée, l'arrêt attaqué ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre d'accusation, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile appelante, a exposé les motifs pour lesquels elle a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis les délits reprochés ;
Que la demanderesse se borne à critiquer la valeur de ces motifs, sans justifier d'aucun des griefs que l'article 575 du Code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son pourvoi contre un arrêt de chambre d'accusation, en l'absence de recours du ministère public ;
Que, dès lors, le moyen est irrecevable, et qu'il en est de même du pourvoi, par application du texte précité ;
Par ces motifs,
DECLARE le pourvoi IRRECEVABLE ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L. 131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Gomez président, M. Samuel conseiller rapporteur, M. Schumacher conseiller de la chambre ;
Avocat général : Mme Fromont ;
Greffier de chambre : Mme Ely ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;