AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre mai deux mille, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller ARNOULD, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X...Patrick,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 13ème chambre, en date du 27 septembre 1999, qui, pour vol aggravé, l'a condamné à 1 an d'emprisonnement ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 63-4, 67, 591 et 593 du Code de procédure pénale, de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble violation des droits de la défense ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité de la procédure pour violation des dispositions de l'article 63-4 du Code de procédure pénale régulièrement soulevée par le prévenu ;
" aux motifs qu'il résulte du procès-verbal n 16 que le gardien de la paix a voulu prendre attache téléphonique avec l'avocat choisi par la personne gardée à vue et que cette attache étant infructueuse il a contacté la permanence des avocats au barreau de Créteil ; que c'est en vain que sont produites des attestations des secrétaires de l'avocat choisi confirmant leur présence au cabinet de celui-ci et l'absence d'appel du commissariat ; que la présence des secrétaires n'implique pas nécessairement que l'une ou l'autre ait pu matériellement répondre à chaque appel téléphonique, eu égard à leur charge de travail ; que, bien au contraire, le fait que le secrétariat ait été en fonction au moment de cet appel explique que le fonctionnaire de police n'ait pas eu en ligne un répondeur téléphonique, mais que la ligne ait sonné sans réponse ; que le numéro de l'avocat choisi par le gardé à vue étant vérifié et exact, un appel sans réponse effectué par le service enquêteur satisfait pleinement aux formalités prévues aux articles 63-1 et 63-4 du Code de procédure pénale, sauf à ce que la loi mette expressément à la charge de ce service des diligences de recherches sur place, au cabinet, ce qui n'est aucunement le cas ;
" alors, d'une part, que l'article 63-4 du Code de procédure pénale, qui autorise la personne gardée à vue depuis plus de 20 heures à s'entretenir avec l'avocat de son choix, impose aux policiers d'effectuer toutes démarches utiles pour tenter de joindre cet avocat ; qu'en l'espèce, il résulte seulement des pièces de la procédure (le procès-verbal n 16) que le gardien de la paix a pris " attache téléphonique avec Me Y... Thomas au barreau de Paris " et que " l'attache téléphonique est infructueuse " ; que ces seules énonciations ne caractérisent pas les démarches utiles entreprises par les services de police pour contacter l'avocat choisi par la personne gardée à vue ;
" alors, d'autre part, que ne sauraient être pris en compte, pour établir la régularité de la garde à vue, des éléments complémentaires fournis et établis après l'accomplissement de cette mesure ; que la cour d'appel ne pouvait pas se fonder sur l'attestation rédigée, à la demande du ministère public et invoquée par lui à l'appui de son appel (cf. mémoire du procureur p. 2, alinéa 5), le 29 juillet 1998 par le gardien de la paix Nicot qui affirmait-ce qui ne faisait pas dans les procès-verbaux de la garde à vue-qu'il avait personnellement effectué les diligences nécessaires pour contacter l'avocat choisi et que son appel téléphonique était resté sans réponse " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Patrick X..., interpellé le 9 juillet 1998, à 15 heures 15, a été placé en garde à vue à compter de ce moment dans le cadre d'une enquête de flagrant délit diligentée contre lui, pour vol aggravé ;
que les droits attachés à cette mesure lui ont été notifiés le même jour à 15 heures 45 ; que, lors de cette notification, il a demandé à s'entretenir avec l'avocat qu'il a choisi ; que le 10 juillet, à 9 heures, l'un des enquêteurs, après avoir tenté en vain de prendre l'attache téléphonique de l'avocat désigné, a pris celle de la permanence des avocats au barreau de Créteil pour l'informer que l'intéressé demandait à s'entretenir avec l'avocat de permanence ; qu'il a eu cet entretien, le même jour, à 10 heures 50 ;
Attendu qu'en écartant, par les motifs reproduits au moyen, l'exception de nullité selon laquelle le demandeur n'aurait pas été mis en mesure de s'entretenir avec l'avocat de son choix, l'arrêt attaqué n'encourt pas les griefs allégués ;
Qu'en effet, si l'article 63-4 du Code de procédure pénale impose à l'officier de police judiciaire de prévenir, par tous moyens, l'avocat choisi par la personne gardée à vue, il ne lui fait pas obligation de rendre effectif l'entretien avec cet avocat ;
Que le moyen, dès lors, ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 311-1, 311-4 et 311-14 du Code pénal, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Patrick X...coupable de vol facilité par l'état d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur ;
" alors que la cour d'appel n'a nullement caractérisé la circonstance aggravante ainsi retenue, faute de préciser en quoi la victime était particulièrement vulnérable, si cet état était apparent ou connu de l'auteur, et si cet état avait facilité la commission du délit " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit de vol facilité par la particulière vulnérabilité de la victime dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Gomez président, M. Arnould conseiller rapporteur, MM. Le Gall, Farge, Pelletier, Palisse, Mmes Ponroy, Koering-Joulin conseillers de la chambre, M. Sassoust, Mme Caron conseillers référendaires ;
Avocat général : Mme Commaret ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;