AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre mai deux mille, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller PELLETIER, les observations de la société civile professionnelle GUIGUET, BACHELLIER et de la VARDE, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de BASSE-TERRE, chambre correctionnelle, en date du 14 septembre 1999, qui, pour agressions sexuelles aggravées, l'a condamné à 3 ans d'emprisonnement dont 2 ans avec sursis et mise à l'épreuve, et qui a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 310, 444, alinéa 3, et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a admis la validité du jugement rendu ensuite d'un débat au cours duquel Mme Y..., épouse X..., qui n'avait pas été citée comme témoin, a été entendue ;
"aux motifs que ni le jugement ni les notes d'audience du tribunal ne révèlent les circonstances dans lesquelles Mme Y..., épouse X..., a été amenée à déposer devant celui-ci ; que ceci étant, rien n'interdisait au tribunal de procéder à une telle audition s'il l'estimait utile à la manifestation de la vérité ; qu'enfin, contrairement à ce qu'allègue le prévenu dans ses conclusions, il ne résulte pas des notes d'audience que Mme Y... a été entendue "comme témoin", aucune mention de la prestation d'un serment ne figurant dans lesdits notes ; qu'il n'est pas plus établi par ces mêmes notes d'audience que Mme Y... a été interrogée directement par un assesseur du tribunal et non par le président ;
"alors que si le président du tribunal correctionnel peut entendre les personnes non citées, mais présentes à l'ouverture des débats, lorsque les parties en requièrent l'audition comme témoins, il ne saurait s'arroger le pouvoir discrétionnaire, que l'article 310 du Code de procédure pénale n'attribue qu'au président de la cour d'assises, d'entendre d'office une personne quelconque même si la déposition de celle-ci lui paraît utile à la manifestation de la vérité ;
qu'en retenant que le tribunal avait pu régulièrement entendre Mme Y... sans constater que l'audition de cette dernière aurait été requise par l'une des parties, la cour d'appel n'a pas donné une base légale à sa décision" ;
Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief d'une prétendue irrégularité commise pendant les débats devant le tribunal, qui, à la supposer établie, ne pouvait avoir pour seule conséquence que l'annulation du jugement entrepris et l'évocation de l'affaire par la cour d'appel en application de l'article 520 du Code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-22, 222-27, 222-28-2 , 222-29-1 , 222-30-2 , 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré X... coupable d'avoir, courant 1990, 1991, 1992, puis d'août 1994 à octobre 1995, agressé sexuellement sa fille née le 24 août 1979 ;
"aux motifs qu'il existe des charges précises et concordantes qui établissent que, au cours de la période visée à la prévention, X... s'est bien rendu coupable d'atteintes sexuelles sur la personne de sa fille A... en usant, sinon de violence, en tout cas de contrainte eu égard à l'emprise qu'il exerçait sur elle pour lui imposer ces agressions contre son gré ;
"alors que, pour entrer en voie de condamnation du chef du délit d'agression sexuelle, les juges du fond doivent caractériser en quoi les atteintes sexuelles reprochées au prévenu auraient été commises avec violence, contrainte, menace ou surprise, sans pouvoir déduire l'absence de consentement de la victime de la seule minorité de celle-ci ou de la seule qualité d'ascendant ou de personne ayant autorité de l'auteur ; qu'en se bornant à affirmer, pour déclarer X... coupable d'avoir commis ce délit sur sa fille mineure, qu'il aurait profité de l'emprise qu'il exerçait sur elle pour lui imposer des attouchements, sans qu'il résulte de ses constatations qu'elle ait déduit l'existence de cette emprise de circonstances distinctes de la minorité de la partie civile et de la qualité d'ascendant du prévenu, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Gomez président, M. Pelletier conseiller rapporteur, MM. Le Gall, Farge, Palisse, Mme Ponroy, M. Arnoud, Mme Koering-Joulin conseillers de la chambre, M. Sassoust, Mme Caron conseillers référendaires ;
Avocat général : Mme Commaret ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;