AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Messaoud Y..., demeurant "Le Rabelais", ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 16 décembre 1997 par la cour d'appel de Paris (21e Chambre, Section A), au profit de M. Achour X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 1er mars 2000, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Chagny, Lanquetin, conseillers, MM. Frouin, Funck-Brentano, conseillers référendaires, Mme Barrairon, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Carmet, conseiller, les observations de Me Blanc, avocat de M. Y..., les conclusions de Mme Barrairon, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que M. Y... a embauché M. X... en qualité de cuisinier, à compter du 15 mars 1993, par deux contrats de travail à durée déterminée ; que les relations de travail ayant cessé le 16 juin 1994, la juridiction prud'homale, après avoir requalifié le contrat en contrat à durée indéterminée, a condamné l'employeur à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à un reliquat de salaire ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 16 décembre 1997) de l'avoir condamné à un rappel de salaire, alors, selon le moyen, que si l'acceptation des bulletins de paie sans protestation ni réserve par le salarié ne vaut pas renonciation à percevoir les sommes qui lui sont dues, elle fait présumer à elle seule le paiement des sommes portées sur ces bulletins sans que l'employeur ait à l'établir par d'autres moyens ; qu'il appartient alors au salarié de détruire par la preuve contraire la présomption de paiement qu'il a instituée en acceptant de les recevoir ; qu'en ayant énoncé que les bulletins de paie ne suffisaient pas à établir le paiement des salaires et en ayant, en conséquence, reproché à M. Y... de s'être contenté de produire ces bulletins, qui mentionnaient le paiement des salaires en espèces et avaient été reçus sans réserve par M. X..., la cour d'appel a violé les articles L. 143-4 du Code du travail et 1315 du Code civil ;
Mais attendu que la remise de bulletin de paie ne constitue pas une présomption de paiement des salaires ; qu'appréciant souverainement les éléments de fait qui lui étaient soumis, la cour d'appel a retenu que la créance de salaire était établie ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, d'une part, qu'en cas de rupture d'un contrat de travail conclu pour une durée déterminée et requalifié en contrat à durée indéterminée, il appartient au juge d'apprécier la légitimité de la rupture de ce contrat ; qu'en ayant énoncé que du seul fait de l'absence de lettrede licenciement, le licenciement devait être réputé sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les articles L. 122-3-1 et L. 122-14-4 du Code du travail ; alors, d'autre part, et en tout état de cause, qu'en s'étant bornée à énoncer que la seule échéance du terme ne pouvait pas justifier la rupture du contrat de travail, sans avoir recherché, ainsi qu'elle y était invitée par les conclusions de M. Y... qui invoquait l'impossibilité de poursuivre le contrat de travail compte tenu de la détérioration des relations, fondée sur des éléments précis tels qu'un abandon de poste, des injures et le non-respect des horaires par M. X..., si la situation ne constituait pas un motif légitime de rupture, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des mêmes textes ;
Mais attendu qu'en l'absence de lettre de licenciement énonçant les motifs de la rupture, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept avril deux mille.