AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Jean-Marie X..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 25 novembre 1997 par la cour d'appel de Besançon (chambre sociale), au profit de M. Hervé Y..., agissant sous l'appellation "Moulin de Villers-les-Luxeuil", grains-engrais-aliments de bétail, dont le siège est 70300 Luxeuil-les-Bains,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 1er mars 2000, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Funck-Brentano, conseiller référendaire rapporteur, MM. Chagny, Lanquetin, conseillers, M. Frouin, conseiller référendaire, Mme Barrairon, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Funck-Brentano, conseiller référendaire, les observations de la SCP Defrenois et Levis, avocat de M. Y..., les conclusions de Mme Barrairon, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 122-14-2, L. 122-14-5, L. 321-1-1, L. 321-6, L. 322-3 et L. 511-1, alinéa 3, du Code du travail ;
Attendu qu'il résulte de l'application combinée de ces textes, que la lettre, notifiant au salarié son licenciement pour motif économique, tout en lui proposant d'adhérer à une convention de conversion, doit être motivée ; qu'à défaut d'énonciation d'un motif suffisamment précis, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que, M. X... a été engagé en qualité de chauffeur-livreur le 1er juin 1992 par M. Y..., qu'il a été convoqué à un entretien préalable en vue de son licenciement pour motif économique le 20 novembre 1995, qu'il a été licencié le 30 novembre 1995, qu'il a adhéré à la convention de conversion proposée par l'employeur le 12 décembre 1995, qu'il a saisi la juridiction prud'homale en réclamant, notamment, des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que pour rejeter la demande du salarié, en paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel énonce que l'acceptation par le salarié de la convention de conversion proposée par l'employeur entraîne la rupture amiable du contrat de travail qui ne constitue pas un licenciement, qu'elle couvre les vices de forme pouvant affecter la procédure initiale, que le salarié n'est pas fondé à discuter la motivation de la lettre de notification de la rupture amiable de son contrat de travail ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la lettre litigieuse qui notifiait à l'intéressé son licenciement tout en lui proposant d'adhérer à une convention de conversion, se bornait à énoncer un motif économique sans mentionner les raisons économiques prévues par la loi et leur incidence sur l'emploi ou le contrat de travail, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions rejetant la demande du salarié en paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 25 novembre 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. Y... à payer à M. X... la somme de 5 000 francs ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept avril deux mille.