AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-six avril deux mille, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller LE CORROLLER, les observations de Me BLANC, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GERONIMI ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X...Mireille, épouse Y..., partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 13ème chambre, en date du 21 mai 1999, qui, dans la procédure suivie contre Christine Z..., épouse A..., du chef de violences volontaires, a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 309, 321 anciens du Code pénal, 222-11 nouveau du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a retenu un partage de responsabilité au profit de Christine A...après l'avoir déclarée coupable de violences volontaires suivies d'une incapacité de plus de huit jours ;
" aux motifs, adoptés des premiers juges, que les faits poursuivis imputables à Christine A...avaient été commis à l'issue d'un conflit de voisinage entretenu de longue date par Mireille Y...; que le récit des faits par les protagonistes, aussi confus soit-il, faisait apparaître que Mireille Y...avait participé à provoquer la bagarre par son comportement et ses paroles ;
" et aux motifs, propres, que si Christine A...reconnaissait avoir frappé sa voisine, Mireille Y...avait provoqué l'affrontement et ainsi contribué, par son comportement, à envenimer la situation ;
" alors, d'une part, que ne constitue pas une provocation à même d'entraîner un partage de responsabilité l'existence de différends remontant à plusieurs années ou d'interpellations ou paroles de la part de la victime ayant envenimé la situation ;
" alors, d'autre part, qu'en s'étant fondée sur un certificat médical établi en 1994, soit trois ans après les faits, pour en déduire que l'incapacité temporaire de travail de trois jours dont souffrait Christine A...était imputable à Mireille Y...et que celle-ci avait frappé Christine A...en premier, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs ;
" alors, en outre, que le juge correctionnel doit répondre aux moyens péremptoires de nature à influer sur la solution du litige ; qu'en ne s'étant pas prononcée sur la déposition de Mme B... expressément invoquée par Mireille Y...selon laquelle Christine A...était à l'origine de l'affrontement, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs ;
" alors, enfin, et en tout état de cause, qu'en retenant un partage de responsabilité sans statuer sur la part de responsabilité imputable à chacune des parties, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale " ;
Sur le moyen pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 593 du Code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que les juges du fond n'ont pu, sans se contredire, énoncer d'une part, qu'il y avait lieu à partage de responsabilité et déclarer, d'autre part, la prévenue responsable du préjudice subi sans préciser dans quelles proportions et tout en sursoyant à statuer sur ce préjudice ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs,
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 21 mai 1999, mais en ses seules dispositions civiles, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nîmes, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Gomez président, M. Le Corroller conseiller rapporteur, MM. Roman, Mistral, Blondet, Ruyssen conseillers de la chambre, Mme Ferrari conseiller référendaire ;
Avocat général : M. Géronimi ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;