AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-six avril deux mille, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller LE CORROLLER, les observations de la société civile professionnelle GHESTIN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GERONIMI ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X...Yohann, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de DIJON, chambre correctionnelle, en date du 16 juin 1999, qui l'a débouté de ses demandes après relaxe d'Eric Y... du chef de la contravention de violences ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 222-11 et 122-5 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Eric Y... des fins de la poursuite du chef de violences volontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours ;
" aux motifs qu'il résulte des pièces de la procédure que le prévenu, qui est portier dans une discothèque, a été obligé d'expulser de l'établissement Yohann X..., qui était ivre, et qui, durant toute la soirée, avait eu un comportement particulièrement difficile à supporter pour les autres clients ; qu'à la porte, Eric Y... a donné deux coups de poing à Yohann X..., qui est tombé et a été blessé ;
" que Yohann X...se souvient seulement s'être retourné vers Eric Y... ; que, d'après ce dernier, Yohann X...s'est jeté sur lui et il n'a fait que se défendre ; que, selon les amis de Yohann X..., au moins un des deux coups de poing était inutile, mais que, d'après les deux barmans, Eric Y... a frappé Yohann X...parce que celui-ci essayait de lui porter un coup ;
" qu'au vu de ces éléments, il apparaît à la Cour qu'Eric Y... a agi en état de légitime défense et qu'il convient de le relaxer des fins de la poursuite ;
" que, par voie de conséquence, les parties civiles doivent être déboutées ;
" 1) alors que la légitime défense nécessite la réalité d'une agression ; qu'en s'abstenant de caractériser une agression de Yohann X...contre Eric Y..., qui aurait légitimé les coups portés par ce dernier, la cour d'appel a privé sa décision de motifs ;
" 2) alors que l'agression doit être actuelle, ce qui signifie que la légitime défense ne saurait être préventive ; qu'en énonçant qu'Eric Y... a pu porter les coups contre Yohann X..., au motif que ce dernier l'aurait menacé, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 3) alors que la légitime défense ne peut être admise que si la riposte était strictement nécessaire ; qu'en se bornant à constater que Yohann X...avait menacé Eric Y..., sans caractériser la nécessité de deux coups de poing violents portés par ce dernier, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 4) alors que la légitime défense est exclue lorsque la riposte est disproportionnée à l'attaque ; qu'en estimant qu'Eric Y... avait agi en légitime défense en portant deux coups violents à Yohann X...pour écarter une simple menace de ce dernier, la cour d'appel a encore violé les textes susvisés " ;
Attendu que, pour débouter la partie civile de ses demandes, après relaxe du prévenu, l'arrêt attaqué retient que Yohann X..., qui se trouvait en état d'ivresse et cherchait à porter un coup à Eric Y..., est seul à l'origine des coups qui lui ont été portés par ce dernier lequel n'a fait que se défendre en adaptant sa riposte à l'agression dont il faisait l'objet ;
Qu'en cet état, les juges du fond, qui ont pu estimer que la défense était en proportion avec l'agression et admettre le péril actuel commandant la nécessité de la blessure faite, ont justifié leur décision ;
Qu'en effet l'état de légitime défense exclut toute faute et ne peut donner lieu à une action en faveur de celui qui l'a rendu nécessaire par son agression ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L. 131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Gomez président, M. Le Corroller conseiller rapporteur, M. Roman conseiller de la chambre ;
Avocat général : M. Géronimi ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;