AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf février deux mille, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire FERRARI, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Pierre,
contre l'arrêt n° 41 de la cour d'appel de BORDEAUX, chambre correctionnelle, du 19 janvier 1999, qui, pour tromperie, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, 100 000 francs d'amende, a ordonné une mesure de publication et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 213-1 du Code de la consommation, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Pierre X... coupable de tromperie au préjudice de la SA Champion et de la SA Champiland ;
"alors, d'une part, que le fait de vendre une marchandise à un prix supérieur à sa valeur réelle n'est pas en lui-même constitutif du délit de tromperie ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que Pierre X... avait revendu à ses cocontractants des truffes chinoises au prix de truffes d'origine française ; qu'en fondant ainsi le délit de tromperie sur le fait que le prix de la marchandise vendue par Pierre X... était supérieur à sa valeur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"alors, d'autre part, que le délit de tromperie sur l'origine de la marchandise suppose que celle-ci soit vendue avec l'indication d'un lieu d'origine ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations des juges du fond que les truffes étaient vendues sous la dénomination "truffes fraîches" ou "truffes fraîches melanosporum", ce qui ne constitue pas une indication d'origine ;
qu'en le déclarant néanmoins coupable de tromperie sur l'origine pour avoir vendu de la truffe chinoise aux lieu et place de la truffe d'origine française, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"et alors, enfin, qu'en retenant que Pierre X... s'était rendu coupable de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise, sans rechercher en quoi les truffes chinoises, indépendamment de la différence de prix, étaient intrinsèquement différentes des truffes françaises, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 213-1 du Code de la consommation, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Pierre X... coupable de tromperie au préjudice de la SA Champion ;
"alors que Pierre X... faisait valoir, dans ses conclusions d'appel, que les truffes prélevées pour analyse chez la société Champion se trouvaient dans un panier en vrac, sans indication du fournisseur, et que cette société ayant elle-même indiqué qu'elle avait trois fournisseurs de truffes, il n'était pas établi que les truffes prélevées et analysées provenaient de sa société ;
qu'en se bornant à retenir que les analyses effectuées sur les truffes prélevées chez la société Champion étaient d'origine asiatique, sans répondre à ce moyen déterminant des conclusions d'appel de Pierre X..., la cour d'appel a privé sa décision de motifs" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable et ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice découlant de cette infraction ;
D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en discussion l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause et des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Gomez président, Mme Ferrari conseiller rapporteur, M. Roman conseiller de la chambre ;
Avocat général : M. Launay ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;