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29/02/2000 | FRANCE | N°98-87642

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 février 2000, 98-87642


REJET des pourvois formés par :
- X... Jeannine, la fédération des syndicats généraux de l'Education nationale (SGEN-CFDT), parties civiles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 4 novembre 1998, qui, statuant sur l'appel interjeté par le procureur général du jugement du tribunal de grande instance de Paris ayant condamné Bernard Y..., pour délit de violences, à 3 mois d'emprisonnement avec sursis et 15 000 francs d'amende, et prononcé sur les intérêts civils, a déclaré leurs appels incidents irrecevables.
LA COUR,
Joignant les pourvo

is en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits, en demande et en dé...

REJET des pourvois formés par :
- X... Jeannine, la fédération des syndicats généraux de l'Education nationale (SGEN-CFDT), parties civiles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 4 novembre 1998, qui, statuant sur l'appel interjeté par le procureur général du jugement du tribunal de grande instance de Paris ayant condamné Bernard Y..., pour délit de violences, à 3 mois d'emprisonnement avec sursis et 15 000 francs d'amende, et prononcé sur les intérêts civils, a déclaré leurs appels incidents irrecevables.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 2, 3, 497, 498, 505 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevable l'appel du procureur général près la cour d'appel de Paris ;
" aux motifs que le procureur général tient des articles 497.6°, et 505 du Code de procédure pénale le droit de relever appel d'un jugement dans les 2 mois de son prononcé ; que les autres parties au procès pénal bénéficient également d'un droit d'appel par application des dispositions de l'article 497.1° à 5°, du Code de procédure pénale dans le délai de 10 jours, conformément à l'article 498 du même Code ; qu'elles ne peuvent, dans ces conditions, alléguer une rupture d'égalité des armes alors qu'il leur était loisible de relever appel de la décision dans le délai qui leur est propre ; qu'elles ne peuvent étendre à la matière correctionnelle une argumentation tirée de l'appel en matière de contravention de police où le procureur général, par application du dernier alinéa de l'article 546 du Code de procédure pénale, est la seule des parties à pouvoir relever appel de toutes les décisions des tribunaux de police, sans distinction tenant à la classe de contravention ; qu'il apparaît, dès lors, que l'appel du procureur général n'est pas incompatible avec les dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
" alors que le principe du procès équitable, tel qu'il résulte de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, impose que les parties disposent des mêmes droits ; qu'il doit en être ainsi, spécialement, de l'exercice des voies de recours ; que, selon les articles 497 et 498 du Code de procédure pénale, la faculté d'appeler appartient notamment à la partie civile, dans un délai de 10 jours à compter du prononcé du jugement contradictoire ; que, selon l'article 505 dudit Code, le procureur général peut former son appel par signification, soit au prévenu, soit à la personne civilement responsable du délit, dans le délai de 2 mois à compter du jour du prononcé du jugement ; qu'il s'en déduit qu'en l'absence d'appel interjeté dans le délai de 10 jours, les parties au procès, en cas d'appel ultérieur du procureur général, sont privées du droit d'interjeter appel et même, pour la partie civile, de toute possibilité de présenter des observations à hauteur d'appel ; que, dès lors, les dispositions de l'article 505 s'avèrent incompatibles avec le principe conventionnel énoncé ci-dessus " ;
Sur le second moyen de cassation (subsidiaire), pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 2, 3, 497, 498, 500, 505 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable l'appel des parties civiles, Jeannine X... et le SGEN-CFDT ;
" aux motifs que, si l'article 500 du Code de procédure pénale a prévu, en cas d'appel dans les conditions des articles 498 et 499 du Code précité, un délai supplémentaire pour relever appel, tel n'est pas le cas dans l'hypothèse de l'appel du procureur général dans les conditions de l'article 505, et qu'il n'appartient pas au juge d'ajouter à la loi ; que, de surcroît, si la constitution de partie civile par voie principale met en mouvement l'action publique, l'action civile telle que définie par l'article 2 du Code de procédure pénale demeure néanmoins une action en réparation du dommage causé par l'infraction ; qu'en effet, la défense de l'intérêt général est dévolue au représentant de la puissance publique et que, si la victime peut s'y associer pour venir à son soutien et pour obtenir la réparation de son dommage, elle ne peut s'y substituer ; que l'appel reconnu à la partie civile par l'article 497.3°, est d'ailleurs limité à ses intérêts civils seulement ; qu'en l'espèce, les premiers juges ont fait droit aux demandes des parties civiles ; que ces dispositions sont devenues définitives et qu'elles sont insusceptibles d'être remises en cause par l'appel du procureur général qui, par nature, ne porte que sur les dispositions pénales ; que les parties civiles ont ainsi obtenu la satisfaction de leurs demandes et n'ont plus d'intérêt à agir ; que, dès lors, l'intérêt moral qu'elles allèguent au soutien de leur demande pour être présentes en cause d'appel relève de leur volonté de poursuivre, devant la juridiction du second degré, l'action à caractère pénal engagée devant le premier juge et qui n'appartient plus qu'au ministère public ; que la demande des parties civiles tendant à voir déclarer leur appel recevable sera en conséquence rejetée ;
" alors que, d'une part, le principe du procès équitable, tel qu'il résulte de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, impose que les parties disposent des mêmes droits ; qu'il doit en être ainsi, spécialement, de l'exercice des voies de recours ; que l'article 505 du Code de procédure pénale prévoit la possibilité pour le procureur général d'interjeter appel d'un jugement rendu en matière correctionnelle dans le délai de 2 mois à compter de son prononcé quand le délai d'appel imparti aux parties au procès est de 10 jours à compter de cette date ; que la faculté d'appel du procureur général dans le délai susvisé ne saurait donc être compatible avec le principe conventionnel énoncé ci-dessus qu'en impartissant un délai supplémentaire aux parties au procès pour également interjeter appel du jugement ; qu'en refusant cette possibilité aux parties civiles demanderesses, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
" alors que, d'autre part, la partie civile a intérêt à faire déclarer la culpabilité du prévenu relativement aux faits poursuivis, indépendamment de toute réparation du dommage par la voie de l'action civile ; que la Cour pouvant, selon les dispositions de l'article 515, sur l'appel du procureur général, soit confirmer le jugement, soit l'infirmer en tout ou en partie dans un sens favorable ou défavorable au prévenu, les parties civiles demanderesses avaient un intérêt certain à être présentes en cause d'appel, quels que soient les dommages et intérêts qu'elles avaient obtenus, contrairement à l'affirmation de l'arrêt attaqué " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour déclarer le procureur général recevable en son appel et les parties civiles irrecevables en leurs appels incidents, la juridiction d'appel se prononce par les motifs repris aux moyens ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que ni le prévenu ni les parties civiles, lesquelles tiennent de la loi la faculté de faire appel quant à leurs intérêts civils seulement, n'ont relevé appel dans le délai qui leur était imparti, la cour d'appel a fait l'exacte application des dispositions des articles 497, 498, 500 et 505 du Code de procédure pénale qui ne sont pas incompatibles avec les dispositions conventionnelles invoquées ;
Que, de surcroît, l'action civile étant éteinte, les demanderesses sont sans qualité pour contester l'appel du procureur général ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 98-87642
Date de la décision : 29/02/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° APPEL CORRECTIONNEL OU DE POLICE - Appel correctionnel - Appel du ministère public - Appel du procureur général - Convention européenne des droits de l'homme - Article 6 - Principe du procès équitable - Compatibilité.

1° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 - 1 - Droit de toute personne à ce que sa cause soit entendue équitablement - Appel correctionnel ou de police - Appel correctionnel - Appel du procureur général - Comptabilité 1° MINISTERE PUBLIC - Procureur général près la cour d'appel - Appel - Appel correctionnel - Convention européenne des droits de l'homme - Article 6 - Principe du procès équitable - Compatibilité.

1° Ne sont pas incompatibles avec le principe du procès équitable découlant de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, les dispositions des articles 497, 498, 500 et 505 du Code de procédure pénale qui accordent un droit d'appel non seulement à toutes les parties à l'instance pénale mais aussi au procureur général(1).

2° APPEL CORRECTIONNEL OU DE POLICE - Appel correctionnel - Appel du ministère public - Appel du procureur général - Appel incident de la partie civile - Irrecevabilité.

2° MINISTERE PUBLIC - Procureur général près la cour d'appel - Appel - Appel correctionnel - Appel incident de la partie civile - Irrecevabilité.

2° L'appel formé par le procureur général dans le délai de l'article 505 du Code de procédure pénale ne donne pas ouverture à l'appel incident de la partie civile.

3° APPEL CORRECTIONNEL OU DE POLICE - Appel correctionnel - Appel du ministère public - Appel du procureur général - Partie civile non appelante - Extinction de l'action civile - Contestation de l'appel du procureur général - Irrecevabilité.

3° MINISTERE PUBLIC - Procureur général près la cour d'appel - Appel - Appel correctionnel - Partie civile non appelante - Extinction de l'action civile - Contestation de l'appel du procureur général - Irrecevabilité.

3° L'action civile étant indépendante de l'action publique, la partie civile, qui n'a pas fait appel du jugement devenu définitif, emportant extinction de l'action civile, est sans qualité pour contester la recevabilité de l'appel du procureur général.


Références :

3° :
3° :
Code de procédure pénale 497, 498, 500, 505
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 6

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 04 novembre 1998

CONFER : (1°). (1) A comparer: Chambre criminelle, 1998-06-17, Bulletin criminel 1998, n° 196, p. 544 (annulation et irrecevabilité sans renvoi) et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 29 fév. 2000, pourvoi n°98-87642, Bull. crim. criminel 2000 N° 86 p. 252
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2000 N° 86 p. 252

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : M. Launay.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Mazars.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, M. Guinard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:98.87642
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