AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Socamett, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 2 octobre 1997 par la cour d'appel de Grenoble (chambre commerciale), au profit :
1 / de M. X..., ès qualités de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la société à responsabilité limitée AZ interim, domicilié ...,
2 / de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Grenoble, dont le siège est ...,
défendeurs à la cassation ;
EN PRESENCE :
1 / de M. Francis Y..., demeurant ...,
2 / de M. Stéphane Z..., demeurant ...,
M. X..., ès qualités, défendeur au pourvoi principal, a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 18 janvier 2000, où étaient présents : M. Dumas, président, M. Badi, conseiller rapporteur, MM. Grimaldi, Tricot, Mmes Aubert, Vigneron, Tric, Besançon, Lardennois, Collomp, conseillers, Mme Graff, M. de Monteynard, conseillers référendaires, M. Jobard, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Badi, conseiller, les observations de la SCP Monod et Colin, avocat de la société Socamett, de la SCP Peignot et Garreau, avocat de M. Y... et de M. Z..., de la SCP Rouvière et Boutet, avocat de l'URSSAF de Grenoble, de la SCP Urtin-Petit et Rousseau-Van Troeyen, avocat de M. X..., ès qualités, les conclusions de M. Jobard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Statuant tant sur le pourvoi incident relevé par le liquidateur judiciaire de la société AZ intérim que sur le pourvoi principal formé par la société Socamett ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société AZ intérim ayant été mise en redressement judiciaire le 19 février 1993, puis en liquidation judiciaire, l'URSSAF de Grenoble a demandé au juge-commissaire, le 21 décembre 1994, à être relevée de la forclusion ; que sa demande a été accueillie par décision du 12 janvier 1995 contre laquelle la société Socamett a exercé un recours devant le tribunal tandis que le liquidateur en relevait appel-nullité ; que ce dernier a été déclaré irrecevable par arrêt du 10 janvier 1996 et que le pourvoi formé contre cette décision a été rejeté ; que le liquidateur a ensuite relevé appel du jugement par lequel le tribunal a rejeté le recours de la société Socamett et que celle-ci en a relevé appel incident ;
Sur le second moyen du pourvoi principal :
Attendu que la société Socamett fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à l'URSSAF la somme de 20 000 francs en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, alors, selon le pourvoi, qu'une partie ne peut être condamnée au profit d'une autre qui n'a rien demandé contre elle ; qu'ainsi, en condamnant la société Socamett à verser une somme en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile à l'URSSAF qui s'était bornée à formuler sa demande à ce titre contre le liquidateur "ou qui mieux le devra" sans identifier les autres parties au litige touchées par cette demande, la cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du Code précité ;
Mais attendu que si le juge ne peut allouer sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile une somme à une partie que si celle-ci en a fait la demande, le prononcé sur des choses non demandées ne constitue pas un cas d'ouverture à cassation mais une irrégularité qui ne peut être réparée que selon la procédure prévue aux articles 463 et 464 du nouveau Code de procédure civile ; que le moyen est irrecevable ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable le recours formé contre l'ordonnance du juge-commissaire du 12 janvier 1995 relevant l'URSSAF de la forclusion, l'arrêt retient qu'il a été formé le 9 novembre 1995 postérieurement au délai de dix jours à compter de la décision, prévu à l'article 156 de décret du 27 décembre 1985 ;
Attendu qu'en relevant d'office ce moyen sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident :
Vu l'article 1351 du Code civil et l'article 53, alinéa 2, de la loi du 25 janvier 1985, dans sa rédaction applicable en la cause ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable l'appel du jugement formé par le liquidateur, l'arrêt, après avoir constaté que l'appel-nullité contre l'ordonnance du juge-commissaire avait été déclaré irrecevable puis relevé que le liquidateur soutenait que le juge-commissaire saisi après l'expiration du délai prévu à l'article 53, alinéa 2, de la loi du 25 janvier 1985 n'avait plus le pouvoir de statuer sur une demande en relevé de forclusion, retient que "le succès de la tierce opposition de la société Socamett n'est pas de nature à remettre en cause l'autorité de la chose jugée à l'égard du liquidateur" ;
Attendu qu'en statuant ainsi alors que la chose jugée par l'arrêt du 10 janvier 1996 avait pour objet l'appel de l'ordonnance du juge-commissaire, et que le liquidateur poursuivait l'annulation du jugement ayant confirmé l'ordonnance du 12 janvier 1995, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevables l'appel du liquidateur et le recours de la société Socamett, l'arrêt rendu le 2 octobre 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne l'URSSAF de Grenoble aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de la société Socamett et de l'URSSAF de Grenoble ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf février deux mille.