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22/02/2000 | FRANCE | N°98-30234

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 22 février 2000, 98-30234


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

I - Sur le pourvoi n° N 98-30.234 formé par Mme Lucie Y..., demeurant ...,

II - Sur le pourvoi n° P 98-30.235 formé par :

1 / M. Alain Z...,

2 / Mme Z...,

demeurant tous deux ...,

en cassation d'une ordonnance rendue le 31 mars 1998 par le président du tribunal de grande instance de Valenciennes, au profit du directeur général des Impôts, domicilié ...,

défendeur à la cassation ;

Les demandeurs invoqu

ent, à l'appui de leurs pourvois, deux moyens de cassation identiques annexés au présent arrêt ;

LA COUR, compos...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

I - Sur le pourvoi n° N 98-30.234 formé par Mme Lucie Y..., demeurant ...,

II - Sur le pourvoi n° P 98-30.235 formé par :

1 / M. Alain Z...,

2 / Mme Z...,

demeurant tous deux ...,

en cassation d'une ordonnance rendue le 31 mars 1998 par le président du tribunal de grande instance de Valenciennes, au profit du directeur général des Impôts, domicilié ...,

défendeur à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leurs pourvois, deux moyens de cassation identiques annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 11 janvier 2000, où étaient présents : M. Dumas, président, Mme Mouillard, conseiller référendaire rapporteur, M. Poullain, conseiller, Mme Piniot, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Mouillard, conseiller référendaire, les observations de Me Jacoupy, avocat de Mme Y... et de M. et Mme Z..., de Me Foussard, avocat du directeur général des Impôts, les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Joint les pourvois n° N 98-30.234 et P 98-30.235 qui attaquent la même ordonnance et présentent des moyens identiques ;

Attendu que, par ordonnance du 31 mars 1998, le président du tribunal de grande instance de Paris a, en vertu de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, autorisé des agents de l'administration des Impôts à effectuer une visite et une saisie de documents dans les locaux privés et professionnels de la société Biorevital France, de M. Alain Z..., de Mme Z... et de Mme Lucie Y..., à Paris, en vue de rechercher la preuve de la fraude fiscale de M. Alain Z... et de la société Biorevital France ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Mme Lucie Y... ainsi que M. et Mme Z... font grief à l'ordonnance d'avoir ainsi statué, alors, selon les pourvois, que le secret médical recouvre l identité des patients et s oppose à ce que l Administration, par le biais de l exercice de son droit de communication, obtienne d une banque la photocopie d un chèque remis par le patient à son médecin ; qu'ainsi, en déclarant "apparemment licite" l'origine de la photocopie d un chèque, dont il relevait, par ailleurs, qu il pouvait "correspondre à des recettes non comptabilisées" du M. Z..., ce dont il résultait qu il présumait que ce chèque émanait d un patient de ce médecin, le juge délégué par le président du tribunal de grande instance de Paris a violé l article 226-13 du Code pénal ;

Mais attendu qu'ayant relevé que la copie du chèque visée par le moyen avait été obtenue par l'Administration dans l'exercice de son droit de communication auprès d'une banque qui tient les comptes d'une société tierce, c'est à bon droit que le président du Tribunal a considéré que cette pièce avait une origine apparemment licite ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, pris en ses six branches :

Attendu que Mme Lucie Y... ainsi que M. et Mme Z... reprochent encore à l'ordonnance d'avoir statué comme elle a fait, alors, selon les pourvois, d'une part, que le juge délégué, qui constatait que les pièces soumises à son appréciation étaient au nombre de 26 et a omis d analyser les pièces 16, 17 et 22, a privé sa décision de base légale au regard de l article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ; alors, d'autre part, qu'en se fondant sur ce qu il résultait d une attestation de MM. C... et E..., inspecteur et contrôleur des Impôts, que 9 factures concernant la construction du navire "Michèle" adressées à M. Z... ou à B... Bart leur avaient été présentées par la société Sermac lors de son contrôle (pièce 1) et d une attestation de ces mêmes agents (pièce 15) que le gérant de la société Sermac, M. D..., leur aurait verbalement indiqué que M. Z... lui avait déclaré dissimuler deux tiers de ses recettes professionnelles et adresser en Suisse des mandats postaux internationaux à Mme X..., le juge délégué a méconnu le principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuves à lui-même et a violé l article 1315 du Code Civil ; alors, en outre, que le juge délégué n a pas motivé sa décision de dire qu il existait des présomptions que la société Biorevital France s est soustraite au paiement de l impôt, violant ainsi l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, de plus, qu'en affirmant, d un côté, que M. Z... exerçait la profession de "chirurgien esthétique" et, de l'autre, qu il était "installé comme médecin libéral", le juge délégué a entaché son ordonnance d une contradiction de motifs, violant encore l article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, de surcroît, que l administration fiscale n a pas soumis au juge, à l appui de sa demande non contradictoire d autorisation de visite et de saisie, la lettre de Mme A..., inspecteur des Impôts, du 15 décembre 1989, avisant M. Z... de l abandon de plusieurs chefs de redressement, et qu il en résulte que l autorisation a été délivrée au vu d une demande ne répondant pas aux prescriptions légales et donc en violation des

dispositions de l article L. 16 B II du Livre des procédures fiscales ; alors, enfin, qu'il ne résulte d aucune des mentions de l ordonnance que les pièces produites par l administration fiscale aient été mises à la disposition des personnes titulaires d un recours, pendant le délai de recours, au greffe du tribunal de grande instance, de sorte qu a été violé l article 6.1 de la Convention européenne des droits de l Homme ;

Mais attendu, d'une part, que le président du Tribunal ayant motivé sa décision au vu de pièces fournies par l'Administration au soutien de sa requête, dont il a fourni l'énumération et qu'il a analysées, il ne peut lui être fait grief d'avoir ignoré certaines pièces qu'il n'a pas jugées utiles à son raisonnement ;

Attendu, d'autre part, que les agents de l'administration des Impôts, qui tiennent de l'article L. 45 du Livre des procédures fiscales le pouvoir de contrôler l'ensemble des impôts ou taxes dus par les contribuables et qui doivent justifier de l'origine licite des pièces qu'ils soumettent au président du Tribunal au soutien de leur requête en autorisation de visite domiciliaire, peuvent relater dans des attestations ou des procès-verbaux, selon les circonstances, les opérations et constatations qu'ils sont conduits à effectuer au cours de leurs investigations ; qu'il appartient seulement au président, lorsque de tels documents lui sont remis, d'en apprécier la valeur probante ;

Attendu, en outre, que le président a relevé, justifiant par là-même sa décision, qu'eu égard aux liens qui unissent M. Z... aux associés de la société Biorevital France, il y a lieu de présumer que cette société, non seulement participe à la dissimulation des recettes de M. Z..., mais aussi se livre à l'occultation de ses propres recettes ;

Attendu, de plus, qu'en relevant que M. Z... pratiquait la chirurgie esthétique dans le cadre d'un exercice libéral, le président ne s'est pas contredit ;

Attendu, de surcroît, qu'il n'est pas démontré en quoi la production du document dont la dissimulation est alléguée aurait été de nature à remettre en cause l'appréciation par le juge de l'existence de présomptions de fraude fiscale visées par la requête ;

Attendu, enfin, que si le droit légalement reconnu aux parties d'avoir accès a posteriori aux pièces du dossier présenté par l'Administration demanderesse à une autorisation de visite domiciliaire qui leur fait grief ne peut être soumis à contestation, l'organisation matérielle de la communication de ces pièces relève, non de la procédure organisée par l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, mais d'une mesure d'administration judiciaire, de sorte que le président n'est pas tenu de l'ordonner dans son ordonnance ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne les demandeurs aux pourvois aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux février deux mille.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 98-30234
Date de la décision : 22/02/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Visites domiciliaires - Ordonnance autorisant la visite - Eléments d'information - Pièces fournies par l'administration - Licéité - Procédure relative - Procédure relative à leur contestation.


Références :

Livre des procédures fiscales L45, L16-B

Décision attaquée : Président du tribunal de grande instance de Valenciennes, 31 mars 1998


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 22 fév. 2000, pourvoi n°98-30234


Composition du Tribunal
Président : Président : M. DUMAS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:98.30234
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